Pour La Presse, est-ce vraiment le bon choix?

Publié le 16/09/2015 à 18:24

Pour La Presse, est-ce vraiment le bon choix?

Publié le 16/09/2015 à 18:24

Samedi dernier, mon édition -papier- de La Presse comptait pas moins de huit cahiers et dépliants publicitaires. Le samedi, le quotidien en format costaud est devenu un concurrent du Publisac.

Sauf que ses heures sont comptées, tout au moins en semaine.

L’édition du jeudi 31 décembre 2015 sera la dernière de La Presse, version imprimée. On conserve pour l’instant l’édition papier du samedi, pour des raisons sur lesquelles je reviendrai plus loin. Mais pour l’essentiel, le plus ancien quotidien francophone d’Amérique tire un trait sur le papier journal l’année de son 131 e anniversaire.

PLUS : La Presse abandonne le papier en semaine

Personne ne devrait être surpris, même si certains seront déçus. Il s’agit là d’une disparition annoncée.

En mai 2014, à la clôture de l’assemblée annuelle de la Corporation Power, André Desmarais, avait répondu qu’à terme, on envisageait l’élimination de la version papier de ce qu’était alors le vaisseau amiral de Gesca, La Presse, du temps du réseau de ses quotidiens à travers le Québec.

Sauf que depuis, plein de questions ont surgi, notamment celles-ci.

Va pour le passage, mais les revenus publicitaires suivront-ils?

La disparition de l’essentiel des revenus d’abonnement fera-t-elle mal?

Les abonnés plus âgés, quand même moins portés sur les machins électroniques, migreront-ils?

Et quel sera le sort des autres quotidiens qui ne disposent pas d’une version électronique?

Au moins, pour la dernière question, la réponse est venue en mars dernier lorsque Power a cédé tous ses quotidiens hors Montréal à Martin Cauchon. Reste à voir leur avenir. Dans l'immédiat, on va continuer de se partager des textes avec La Presse pendant quelques années, mais le cordon ombilical a été tranché.

Demeurait en jeu le sort de La Presse dans sa version traditionnelle, alors en sursis. On connaît maintenant l’échéance.

L’éditeur du journal et maître d’œuvre de cette métamorphose, Guy Crevier, signale qu’en 2015, 75% des revenus du quotidien seront venus de sa version tablette. En publicité, puisque son accès est gratuit. Si c’est le cas, les revenus de l’édition imprimée ne devaient pas faire le poids devant les coûts du papier-journal, de l’impression, de la distribution et de tous les autres postes de dépenses conventionnels.

Mais le pari demeure énorme.Peut-on, de façon plausible, imaginer qu’un média qui donne son contenu produit par 250 journalistes et salariés de la rédaction, sans compter tout le reste du personnel, puisse au moins faire ses frais ?

Pour y parvenir, La Presse+ va devoir connaître un immense succès auprès du groupe d’âge qui compose près des deux-tiers de son lectorat, les 25-54 ans (selon Guy Crevier lui-même). Plus encore, les annonceurs devront eux-mêmes être convaincus de leur intérêt… et de leur curiosité envers leurs offres.

Mais le défi demeure de taille quant aux plus jeunes et aux plus âgés.

Les plus jeunes s’informent moins par les médias traditionnels (peu importe la plate-forme). De là les gains publicitaires que réalisent, d’ailleurs, les Facebook(Nasdaq, FB) de ce monde, qui réduisent d’autant les pointes de la tarte publicitaire. Pas sûr que les jeunes vont se ruer sur La Presse+.

À l’autre extrémité du spectre démographique, les aînés sont manifestement davantage attachés à leur journal en papier. Plusieurs sont amateurs de technos, c’est vrai, mais bien d’autres seront désarçonnés par ce changement. IIs ne suivront pas.

Des mécontents chez les annonceurs

Se pose aussi la question des annonceurs. Certains n’apprécieront pas. Autant pour eux que les questions démographiques, on doit aujourd’hui se frotter les mains  au Journal de Montréal, qui va recueillir les mécontents, et les revenus qui vont avec.

L’édition papier du samedi va demeurer, entre autres parce qu’elle génère d’importants revenus publicitaires (y compris les dépliants dont je parlais au début), et aussi, parce qu’elle peut aider à conserver des liens avec un lectorat moins friand de contenu numérique. En affaires, une importante base de données possède une grande valeur. Mieux vaut la conserver.

Curieusement, cette annonce de La Presse survient le lendemain du jour où The Toronto Star lançait sa propre version tablette, le Star Touch, à partir de la technologie développée par La Presse. Ce qui représente, pour le plus lu des quotidiens canadiens, un beau coup de chapeau.

Sauf que… le Star s’est empressé d’ajouter qu’on n’entrevoyait pas abandonner de sitôt l’édition en papier. Contrairement à La Presse.

Manifestement, leurs calculs ne sont pas les mêmes. Qui des deux a raison?

Allez, je plonge: je reconnais l’audace des dirigeants de La Presse, mais je préfère le modèle des gens de Toronto. Il m’apparaît plus viable pour longtemps.

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