Il nous faudrait davantage de tirailleurs malgaches


Édition du 31 Octobre 2015

Il nous faudrait davantage de tirailleurs malgaches


Édition du 31 Octobre 2015

Lors de la Première Guerre mondiale, l'armée française disposait d'une arme hors du commun : un bataillon de soldats qui n'hésitaient pas, lorsqu'on le leur demandait, à se lancer à l'assaut des positions allemandes malgré le caractère téméraire de ces charges à haut risque. On les appelait « les tirailleurs malgaches », puisqu'on les avait recrutés à Madagascar.

Le même principe s'appliquait aux régiments canadiens embrigadés dans l'armée britannique. Malgré de lourdes pertes, ils ouvraient, volontairement ou non, la voie aux autres qui allaient en profiter pour briser les lignes ennemies.

Pourquoi vous raconter cette histoire ? Parce qu'elle nous a été servie avec brio le vendredi 23 octobre, lors de la deuxième édition de la conférence sur les villes intelligentes, organisée par le Groupe Les Affaires.

« Dans un sens, les entrepreneurs émergents sont comme des tirailleurs malgaches », a déclaré devant un auditoire au départ interloqué le président et cofondateur de Potloc, Rodolphe Barrère. « Ils foncent, prennent des risques, beaucoup ne passent pas au travers, mais ils permettent de progresser », a-t-il dit en substance avant d'être applaudi pour cette image éloquente.

Rodolphe Barrère était l'un des trois panélistes d'une des séances de l'après-midi, qui aurait certainement mérité le coup de coeur de l'assistance si on lui avait demandé son opinion. M. Barrère partageait la tribune avec Philip Bénard, d'Électrobac, et Julien Vanier, de Munirent. Et la discussion était animée par Béatrice Couture, la directrice générale d'InnoCité MTL, un incubateur qui vise justement à aider les jeunes entrepreneurs à pousser leurs démarches plus loin.

Ces trois panélistes sont déjà en affaires. Mais la route est longue et semée d'embûches... Qui plus est, il nous en faudrait des milliers, de ces leaders en devenir.

En démarrant la campagne « Devenir entrepreneur », la présidente du Mouvement Desjardins, Monique Leroux, signalait qu'au cours des 10 prochaines années, pas moins de 100 000 entreprises québécoises allaient devoir changer de main, à cause des départs à la retraite. Mais encore leur faudra-t-il se trouver des repreneurs. D'où ce programme, lancé de concert avec la Banque Nationale et la Caisse de dépôt, pour promouvoir l'entrepreneuriat chez les jeunes.

L'image a été mise à mal, il est vrai, dans la foulée de la commission Charbonneau. Une association simpliste a assimilé le statut d'entrepreneur à celui d'entrepreneur en construction, et une autre, encore plus réductrice, en a fait une bande de malfrats.

Non. Il existe toutes sortes d'entrepreneurs, majoritairement intègres, qui contribuent à l'enrichissement collectif. Il y a deux ans, en septembre 2013, le gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz, déclarait : « C'est la création de nouvelles entreprises qui est le moteur naturel de la croissance ».

En d'autres termes, nous devrons non seulement encourager la relève pour assurer la poursuite des activités existantes, mais aussi stimuler davantage la création de nouvelles entreprises, dans le meilleur des mondes. Un grand défi dans les circonstances.

Et que faisaient dans cette conférence sur les villes intelligentes les trois jeunes entrepreneurs dont il a été question plus haut ? Voici : chacun à sa façon, selon la mission de son entreprise, cherche à la rendre plus efficace.

Potloc travaille à améliorer les chances de survie d'un nouveau commerce de détail en veillant à répondre à un besoin dans le quartier où il s'implante. Électrobac accélère le recyclage des appareils électroniques désuets. Et Munirent fait en sorte que les équipements municipaux souvent inutilisés puissent être partagés avec d'autres administrations municipales pour, ultimement, réduire les coûts.

Ces entrepreneurs sont-ils la réincarnation des tirailleurs malgaches ou non ? Peu importe. Il nous en faut encore plus de ce genre !

Les Molson, depuis 229 ans

C'était lors d'un autre événement présenté le 22 octobre. Au cours de la 22e édition du Grand Prix de l'entrepreneur d'EY, on a attribué pour la première fois un prix spécial à une famille d'entrepreneurs émérites. Et pas n'importe laquelle : les Molson.

Leurs affaires ont commencé en 1786 par la création de la Brasserie Molson. Aujourd'hui, 229 ans plus tard, la septième génération est toujours active. Geoff Molson préside le Club de hockey Canadien, tandis que son frère Andrew dirige Res Publica, la société mère de la firme de communications National.

C'est entre autres devant leur père, Eric Molson, que les deux frères sont montés sur scène pour recevoir leur trophée, présenté par le premier ministre du Québec, Philippe Couillard. Ils ont prononcé leur allocution presque exclusivement en français.

On avait auparavant fait état de l'engagement constant de la famille dans la vie montréalaise, autant en affaires que dans les domaines du sport, de l'éducation (École de gestion John-Molson), de la culture (Musée McCord) ou de la santé (hôpital Sainte-Justine).

Avec raison, on a souligné l'étendue de leur participation auprès des collectivités montréalaise et québécoise. L'assemblée a répondu par des applaudissements nourris et soutenus, les plus vibrants de toute cette soirée où l'on célébrait l'excellence de l'entrepreneuriat québécois. Et, c'était prévisible, on a entendu fuser du parterre : « Ça sent la coupe ! »

De mon blogue

Budget

Le coup de la TVQ, prise 2

Rappelons que le budget Leitao présenté au printemps contenait une disposition qui n'a pas fait grand bruit. Pourtant, elle heurtera durement, à partir de janvier, des dizaines de milliers de petites entreprises non manufacturières qui ne comptent pas plus de quatre employés. Combien de ces PME sont sur la ligne de feu ? Environ 75 000, selon la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Leur taux d'imposition bondira de 8 à 11,8 %, soit un saut de près de 50 % ! C'est d'autant plus dommage qu'au fédéral le nouveau gouvernement Trudeau devrait - en principe - abaisser son taux de 11 à 9 % pour l'ensemble des PME, s'il tient sa promesse.

Suivez René Vézina sur Twitter @vezinar

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