Il faudra des acrobaties pour conserver le Cirque du Soleil


Édition du 04 Avril 2015

Il faudra des acrobaties pour conserver le Cirque du Soleil


Édition du 04 Avril 2015

Guy Laliberté avait à peine 19 ans quand il s'est joint à la troupe des Échassiers de Baie-Saint-Paul, en 1978. C'était comme accordéoniste perché sur des échasses. Trente-sept ans plus tard, il trône sur le Cirque du Soleil, devenu un empire dans l'industrie du spectacle... empire sur lequel est apposée une affiche «À vendre».

C'est dommage, mais il ne faut pas s'étonner. Après quatre décennies passées à déployer ses talents d'organisateur, l'ancien musicien de rue a le goût de passer à autre chose. Mais on peut légitimement s'interroger sur l'avenir du Cirque et, surtout, de sa présence importante dans le paysage québécois.

Le gouvernement québécois implore Guy Laliberté de tout faire pour que le siège social et les décideurs du Cirque restent ici. Sauf que le principal propriétaire du Cirque fera bien ce qu'il voudra. Surtout s'il se rappelle comment on l'a regardé de haut, lui et ses complices, quand il se promenait d'institution en institution pour trouver le soutien nécessaire à son rêve au début des années 1980. Qui allait prêter des fonds à un amuseur public qui prétendait réinventer l'univers du cirque alors dominé par des groupes internationaux ? Et n'eût été l'appui in extremis d'une caisse populaire de la basse-ville de Québec (et de l'intervention personnelle de René Lévesque, dit-on), le soleil ne se serait jamais levé pour ces jeunes saltimbanques ambitieux.

La valeur du bloc de Guy Laliberté, qui possède 90 % du capital du Cirque, est aujourd'hui estimée à 2 milliards de dollars. On aurait même pu imaginer un plus gros montant.

En novembre 2001, un texte que j'avais publié dans le défunt magazine Commerce indiquait que, dans le milieu, on évoquait une facture de 400 millions de dollars pour le rachat des parts du président et copropriétaire à 50 % du Cirque, Daniel Gauthier, qui avait décidé de s'en aller. Guy Laliberté avait d'ailleurs dû travailler fort pour réunir une telle somme. Il était donc question au bas mot d'une valeur globale de 800 M$.

Quatorze ans plus tard, après avoir rayonné aux quatre coins de la planète, la valeur du Cirque du Soleil serait un peu plus de deux fois celle qu'il avait au tournant du siècle, pas davantage ? En tenant compte de l'inflation, ce serait une progression plutôt modeste.

Il est vrai que les dernières années ont été plus difficiles et que la magie du Cirque n'agit plus automatiquement comme autrefois. Certains spectacles dont la production a été coûteuse (comme Iris ou Zarkana) n'ont pas levé. Le resserrement des finances a forcé le Cirque à mettre à pied 400 employés, en bonne partie à ses installations de Montréal. L'entreprise est poursuivie actuellement pour 1,5 M$ par une acrobate victime d'un accident. Le Cirque n'est plus invulnérable aux bavures, et sa valeur marchande en a vraisemblablement souffert.

Mais la seule vue du grand chapiteau jaune et bleu donne toujours des frissons. Le Cirque du Soleil est toujours un immense objet de fierté au Québec. C'est pourquoi l'hypothèse qu'il passe entre des mains étrangères, faute d'acheteurs québécois, suscite de l'amertume.

Mais qui, ici, pourrait réunir une telle somme ? Il faudrait un consortium, et encore. Rappelez-vous ce qui est survenu lorsque les Expos ont été acquis par un groupe d'investisseurs québécois, en 1991. Personne n'osait s'aventurer seul à investir la centaine de millions de dollars que demandait alors Charles Bronfman. Trop de cuisiniers gâtent la sauce. Cela a été le début de la fin pour le baseball majeur à Montréal.

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