«Ce n'est pas tant la destination qui importe que le parcours»


Édition du 16 Juillet 2016

«Ce n'est pas tant la destination qui importe que le parcours»


Édition du 16 Juillet 2016

[Photo : Shutterstock]

Il y a de ces histoires qui nous font croire que tout ne va pas si mal au Québec.

Celle de Mario Barbaresso, par exemple. Elle est franchement inspirante, tout comme l'est son attachement pour le Québec où il vient de revenir après avoir passé une vingtaine d'années en Angleterre et aux États-Unis. La passion entrepreneuriale qu'il y a développée sera maintenant mise à contribution chez Power Survey, une PME montréalaise dont il est le président et pour laquelle il a de grandes ambitions.

C'est d'abord sa trajectoire inhabituelle et les circonstances de son retour au Québec qui rendent son histoire captivante.

En deux mots : voici un Québécois francophone d'origine italienne, né à Murdochville, en Gaspésie, qui revient au Québec après une carrière internationale pour diriger une entreprise de haute technologie. Du coup, il maintient ici le centre de décision de cette PME qui aurait fort bien pu être achetée par des étrangers. Et Mario Barbaresso revient au Québec en courant, parce qu'il trouve ici un milieu plus accueillant et encourageant, dit-il, pour les entrepreneurs comme lui. Rien de moins !

En 1958, ses parents ont troqué une petite ville près de Venise pour Murdochville. L'Italie se remettait encore péniblement de la Deuxième Guerre mondiale. Le père de Mario, Antonio, ouvrier en construction, avait appris de son frère déjà en place à Murdochville que la mine de cuivre, alors en activité, avait besoin de renfort.

La famille a donc troqué les abords de la mer Adriatique pour les montagnes de la Gaspésie et la ville minière de Murdochville. Imaginez le dépaysement...

C'est là qu'est né Mario Barbaresso. Il y fait ses études primaires et secondaires, puis ses études collégiales à Gaspé et Rimouski, avant de partir pour Montréal étudier à l'École de technologie supérieure (ÉTS), où il obtient son diplôme d'ingénieur. Il est rapidement recruté par la division ferroviaire naissante de Bombardier, puis par la multinationale ABB, où il passera 12 ans. À l'époque, l'entreprise participe activement aux grands projets industriels du Québec, ceux d'Hydro-Québec et de grands chantiers comme celui de l'Aluminerie Alouette, à Sept-Îles. Il y acquiert une solide expertise en matière de systèmes électriques.

Nortel est alors en pleine gloire et il en rejoint les rangs à la fin des années 1990, à son usine de Lachine, avant d'être dépêché en Angleterre pour y diriger la division Nortel Power. Mais elle va bientôt être vendue à la britannique Emerson... Les nouveaux propriétaires maintiennent Mario Barbaresso en poste ; mieux, ils l'envoient à Dallas, au Texas, où il supervise notamment les activités nord-américaines d'Emerson au Québec, à Raleigh (Caroline du Nord) et à Sunrise (Floride).

À force de diriger par procuration, on finit par avoir le goût d'être vraiment le capitaine du navire... Ce sera son cas. Le Gaspésien d'origine se voit offrir la présidence d'une PME texane active dans le monde de l'énergie, Benning Power, et il bondit sur l'occasion. Elle en bénéficiera : de 2003 à 2015, ses ventes passeront de 1,5 à 30 millions de dollars.

Mais au long de ces années, lui et sa femme se souviennent du Québec et sont nostalgiques. L'occasion de revenir finit par se présenter.

Loin au Nord, dans la région de Montréal, les dirigeants d'une entreprise du même secteur, Power Survey, pensent à se retirer. Elle est à vendre. Un groupe américain spécialisé en énergie, Enertech, s'y intéresse. Il lui faut de toute façon investir au Québec, puisqu'il a obtenu des fonds d'Investissement Québec (IQ) sous garantie d'intervenir ici. Il a d'ailleurs ouvert un bureau à Montréal.

En 2015, Enertech et IQ présentent ensemble une offre d'achat en proposant aux actionnaires d'origine de conserver une position minoritaire. Elle est acceptée. Mais la direction de l'entreprise devait dès lors être revue.

«Il nous fallait la meilleure personne disponible, mais encore devait-elle accepter de s'installer au Québec, c'était pour nous une condition sine qua non», dit André Petitclerc, directeur principal pour les investissements en technologies innovantes chez IQ, bien connu dans le monde des nouvelles technologies au Québec. «Le Québec est bien placé pour développer un écosystème en électricité. Nous devons miser sur des champions ; nous avons ici à la fois une entreprise et un entrepreneur de pointe. Nous avons eu une chance en or de trouver Mario au Texas et de le ramener chez nous !»

La suite pour Power Survey ? Croître, à fois de l'intérieur et par acquisitions.

La famille Barbaresso, elle, est ravie de revenir au Québec, même si, en attendant de s'installer définitivement dans un lieu qui va lui convenir, elle vit au sous-sol de la maison des parents, en banlieue de Montréal, où le papa et la mamma sont si contents de retrouver leur grand garçon parti si longtemps, si loin...

Mario Barbaresso est enthousiaste, et le mot est faible, à l'idée d'entreprendre un nouveau chapitre de sa vie. Son regard rassurant sur le Québec et sur ses valeurs ferait taire bien des sceptiques qui ne voient ici que le mauvais côté des choses.

Et quelle est sa conclusion, qui vaut pour tout un chacun ? «Ce n'est pas tant la destination qui importe, c'est le parcours...»

De mon blogue

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