C'est l'angélisme du budget fédéral qui inquiète

Publié le 27/03/2016 à 20:14

C'est l'angélisme du budget fédéral qui inquiète

Publié le 27/03/2016 à 20:14

Le ministre des Finances du Canada, Bill Morneau. (Photo: Jérôme Lavallée)

Nous aurons donc droit à un déficit global de 113 millards de dollars durant les cinq prochaines années, pour ce qui est des finances fédérales, si les projections du ministre Bill Morneau s'avèrent justes.

Si.

C'est la première de deux grandes questions. L'autre, c'est qu'arrive-t-il après?

Commençons par la première.

Si le passé est garant de l'avenir, nous avons des raisons d'être préoccupés. En campagne électorale, les libéraux évoquaient de «modestes» déficits de moins de 10 milliards de dollars par année et un retour à l'équilibre d'ici la fin de leur mandat. Et c'est entre autres sur cette assurance qu'ils ont été élus.

Remarquez, ils ne sont pas les seuls à s'être fourvoyés. Le directeur parlementaire du budget lui-même, Jean-Denis Fréchette, disait à l'automne que les déficit pour l'année financière qui commence seraient probablement moindres qu'annoncés... mais il ne pouvait évidemment pas deviner les mesures annoncées dans le budget.

Sauf qu'on y est allé pour la totale, en reconnaissant du même coup que les calculs de la campagne ne tenaient pas la route. Pire, on a également admis que la pseudo somme nulle résultant de la baisse d'impôts pour la classe moyenne et la hausse pour les ménages à revenus élevés ne se réaliserait pas... et que, dans les faits, il manquerait environ 1,5 milliard de dollars.

Ce n'est pas qu'une petite erreur de calcul et dans ce cas, on ne peut mettre le blâme sur la baisse des prix du pétrole. Pour reprendre l'expression, on a oublié que, collectivement, nous sommes plus riches en pauvres que pauvres en riches.

Il est donc hasardeux de se fier à ces projections sur cinq ans. Jusqu'ici, les libéraux n'ont fait que se tromper dans leurs calculs. Même la mise à jour de l'automne dernier, il y a à peine six mois, était dans le champ.

PLUS : Comment, et quand résorbera-t-on le déficit d'Ottawa ?

Remarquez, au contraire, le vent pourrait même virer de bord, le redressement pourrait survenir sans qu'on l'ait vu venir, selon l'évolution de la situation internationale et indépendamment du «plan de match» libéral.

De là la deuxième question, encore plus embêtante. De plan de match, il n'y en a pas. En tout cas, s'il y en a un, on ne nous l'a pas présenté. Le raisonnement du gouvernement Trudeau tient de l'angélisme. Faisons le bien et Dieu nous le rendra... Le problème, encore une fois, c'est qu'on nous demande de prendre le champ sans fournir la moindre indication de l'itinéraire. Tout au plus entrevoit-on la diminution progressive du déficit au fil des ans. Au terme du mandat libéral, il devrait avoir baissé de moitié, de 29,4 milliards $ en 2016 à 14,3 milliards $ en 2020. Comme ambition, c'est plutôt mince.

Ensuite?

Seul le ciel le sait... Parce que les stratèges libéraux, eux, semblent incapables de voir plus loin.

Il va donc nous falloir nous croiser les doigts collectivement.

En soi, étant donné la santé relative des finances fédérales, un déficit, même de bonne ampleur, n'est pas désastreux. C'est d'en faire une habitude insouciante qui risque de le devenir. Et tant qu'on n'aura pas signalé une volonté claire de revenir aussi tôt que possible à l'équilibre, le doute subsistera quant au sérieux de ceux qui viennent de prendre le pouvoir à Ottawa. 

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