L'or et la Suisse

Publié le 28/11/2014 à 13:34

L'or et la Suisse

Publié le 28/11/2014 à 13:34

(Photo: Bloomberg)

En 1999, la Suisse devenait le dernier pays à décider de délaisser la couverture-or à la suite d'un référendum gagnant à 59%. Selon le World Gold Council, les réserves de la Banque nationale suisse (BNS) sous forme d'or sont ainsi passées de 38.3% en 1999 à 7.8% aujourd'hui. Le 30 novembre prochain, les suisses devront se prononcer sur des nouvelles modalités qui viendraient changer de façon importante la gestion des réserves de la BNS et pourraient avoir une influence non négligeable sur le prix du précieux métal.

Voici les questions qui sont à l'enjeu:

1. La BNS ne pourra se départir de ses réserves d'or;

2. Toutes les réserves d'or de la BNS devront être entreposées en Suisse;

3. La BNS devra détenir au moins 20% de ses actifs en or.

Si le vote devait être favorable, la nouvelle demande pour l'or provenant de la Suisse pourrait contribuer à en gonfler les prix sensiblement. En effet, la BNS aurait cinq ans pour faire passer ses réserves d'or des 7.8% actuels aux 20% projetés, soit un achat de quelque 1 650 tonnes. Selon les calculs d'UBS, ces achats répartis sur cinq ans représenteraient près de 11% de la production annuelle mondiale du métal.

Les implications d'une telle décision seraient nombreuses. Tandis que les supporters de la proposition affirment qu'un résultat positif permettrait d'assurer la stabilité du franc suisse et l'indépendance économique du pays face à l'Europe et aux États-Unis, les autorités au pouvoir et la BNS s'y opposent. À leur avis, la rigidité qui serait ainsi imposée à la BNS n'aiderait en rien la réalisation de son mandat qui est d'assurer la stabilité des prix. Au contraire, elle aurait pour effet de fortement réduire la flexibilité de sa politique monétaire et sa capacité à réagir aux moments critiques. Par ailleurs, elle ne souhaite pas rapatrier ses réserves d'or (20% sont stockées auprès de la Banque d'Angleterre et 10% auprès de la Banque du Canada) par souci d'une saine diversification des risques.

Un sondage publié le 24 octobre par Gfs.bern prédisait 44% pour le oui, 39% pour le non et 17% d'indécis. La même firme a publié un second sondage le 19 novembre qui ne prédisait plus que 38% pour le oui, 47% pour le non et 15% d'indécis. À l'heure actuelle, bien que la proposition ne semble pas en voie d'être adoptée, elle demeure un élément d'incertitude pour le marché de l'or compte tenu de ses conséquences potentielles. Une décision négative aurait probablement un impact limité sur le marché, mais une victoire du oui pourrait en secouer les fondamentaux et justifie que l'investisseur concerné surveille le résultat d'un œil intéressé.

L'investisseur avisé

L'investisseur avisé investissant dans l'or se doit de demeurer au courant des grandes tendances qui risquent d'influencer le prix de ce dernier. L'or ne produit pas de revenu et la notion qu'il est un actif stable qui protège contre l'inflation est difficile à supporter empiriquement. Toutefois, ayant une faible corrélation aux marchés financiers, il peut contribuer à la diversification d'un portefeuille lorsqu'alloué convenablement. Plusieurs investisseurs trouveront davantage leur compte à long terme en investissant dans les entreprises opérant dans le domaine plutôt que dans le métal précieux directement.

Questions à poser

Avant de prendre une décision, renseignez-vous auprès d'un professionnel qualifié:

- Quelle est la pondération de mon portefeuille attribuée à l'or, est-elle directe (or physique) ou indirecte (FNB ou entreprises du secteur aurifère)?

- Comment cette pondération évolue-t-elle en fonction des conditions du marché, ai-je la possibilité de profiter d'occasions ponctuelles?

- Historiquement, quelle à été la contribution de l'allocation à l'or au rendement de mon portefeuille?

À propos de ce blogue

Au fil des ans, Pierre a conseillé un large éventail d'investisseurs privés et institutionnels, y compris des familles fortunées, des fondations et des fonds de pension sur la saine gestion de leurs actifs. Au-delà de sa connaissance approfondie des marchés financiers, des stratégies d'investissement et de la construction de portefeuille, il a développé une expertise plus particulière en matière de conseil aux investisseurs sur l'utilisation de stratégies de placement non traditionnelles et d'investissements internationaux. Le mandat de ce blogue est donc d'aiguiller les lecteurs dans l'exploration de pistes paraissant inhospitalières à première vue, mais pouvant mener à des expériences très gratifiantes lorsqu'on sait s'y orienter. Pierre est titulaire d'un MBA, porte les titres de Chartered Financial Analyst (CFA) et Chartered Alternative Investment Analyst (CAIA), et est également Fellow de l'Institut canadien des valeurs mobilières et de l'Institut des banquiers canadiens. Il travaille pour UBS (Canada) à titre de gestionnaire privé senior.

Pierre Czyzowicz