En Bourse, l'excès de confiance est un grand défaut

Publié le 08/02/2019 à 14:36

En Bourse, l'excès de confiance est un grand défaut

Publié le 08/02/2019 à 14:36

Photo:123rf

BLOGUE INVITÉ. Plus je côtoie des investisseurs, et ça fait 27 ans que je fais ce métier, plus je trouve que les pires sont ceux qui ont certaines connaissances de la Bourse et de l’investissement, mais qui se croient des experts.

Selon moi, le principal problème de ces investisseurs est qu’ils s’imaginent être plus savants que les autres. Cet excès de confiance en leurs moyens les incite à poser des gestes dangereux et à prendre de mauvaises décisions à répétition. Je vous donne quelques exemples que j’ai fréquemment constatés au fil des ans.

- Ils croient être capables de faire bien mieux que les indices boursiers. Pour ces investisseurs, les rendements boursiers annuels composés de quelque 10% de la Bourse depuis 100 ans sont aisément surpassables. Ils s’imaginent qu’il est facile de réaliser des rendements de 15%, 20% ou 25% année après année. Pourtant, le meilleur investisseur des temps modernes, Warren Buffett, a réalisé un rendement annuel composé de près de 20% pendant plus de cinquante ans – est-il réaliste de croire faire aussi bien que lui?

- Ils croient être en mesure de réaliser des rendements rapides. Pour ces investisseurs, le discours misant sur le long terme à la Bourse est de la foutaise. Ils pensent être en mesure de réaliser des rendements attrayants rapidement, en quelques mois, sinon en quelques semaines.

- Ils croient être en mesure d’identifier les titres qui seront les prochaines vedettes boursières. Pour cette raison, ils auront tendance à investir une part disproportionnée de leur portefeuille dans ces quelques titres. Après tout, la diversification d’un portefeuille est surtout utile à ceux qui ne s’y connaissent pas en Bourse.

- Ils investissent surtout dans les plus petites sociétés. Pourquoi perdre son temps avec de grands «blue chips» dont les titres sont peu susceptibles d’offrir des rendements explosifs alors qu’on peut investir dans de petites minières ou dans de futures sociétés technologiques et voir leur titre décupler?

- Ils croient être en mesure de voir venir les corrections de la Bourse et d’anticiper ses rebonds. Pourquoi investir à long terme, lorsqu’on peut investir seulement quand les marchés sont à la hausse?

À ce sujet, connaissez-vous des gens qui ont vendu leurs actions avant la baisse de près 20% du marché boursier à la fin de 2018 et, surtout, qui ont racheté avant le rebond récent? Je doute qu’il y en ait beaucoup.

- Ils investissent sur marge. Pourquoi ne pas profiter de l’argent des autres lorsque les taux sont si bas (et déductibles d’impôt) et lorsqu’on est confiant de réaliser des rendements de 20% par année? Ils peuvent aussi utiliser les produits dérivés pour augmenter leurs rendements et la vitesse à laquelle ils les obtiennent.

- Ils ne diversifient pas suffisamment leur portefeuille. Pourquoi diversifier son portefeuille lorsqu’on est confiant d’être en mesure d’identifier les futures stars boursières?

- Ils ont tendance à se laisser influencer par un peu tout le monde. Ces investisseurs ont souvent l’impression qu’ils ont trouvé le filon ou la bribe d’information qui les séparera des autres investisseurs et qui les rendra riches. Ils oublient probablement que les informations qui se rendent aux journaux ou aux réseaux sociaux sont plus souvent qu’autrement déjà connus des marchés et incorporées dans le cours des titres visés.

En somme, les excès de confiance mènent souvent à une substantielle prise de risque.

J’ajouterais qu’on peut souvent reconnaître ces investisseurs par le fait qu’ils aiment beaucoup parler de leurs succès, mais qu’ils ont tendance à ne raconter que leurs bons coups.

Pour ma part, je suis convaincu qu’il y a essentiellement deux classes d’investisseurs qui réussiront en Bourse à long terme:

La première catégorie, que j’appellerais celle des «investisseurs humbles», est composée des gens qui n’y connaissent pas grand-chose et qui en sont très conscients. Leurs attentes de rendements sont modestes et ils investissent pour le long terme dans l’espoir de combattre l’inflation à long terme. Ils font peu de transactions, n’investissant que les sommes dont ils n’auront pas besoin dans un avenir rapproché. Ils sont conscients de l’importance de diversifier leur portefeuille et d’en minimiser les frais. Ils considéreront les indices boursiers ou confieront leur portefeuille à un gestionnaire qui a fait ses preuves.

La deuxième catégorie est celle des «investisseurs aguerris». Ils savent que la Bourse est volatile et que les émotions y jouent un rôle prépondérant, entraînant les marchés alternativement dans des excès de pessimisme et d’euphorie. Ils ont une vision à long terme et ils savent qu’en sélectionnant une brochette de sociétés de qualité, triées sur le volet après une analyse exhaustive, ils pourraient être en mesure d’obtenir des rendements attrayants, possiblement un peu mieux que ceux des marchés dans leur ensemble. Ils savent aussi que la diversification d’un portefeuille est toujours primordiale car ils sont conscients qu’une société, aussi bonne soit-elle, n’est jamais à l’abri de difficultés inattendues.

En somme, pour un investisseur, l’excès de confiance est un grand défaut, alors que la modestie est une qualité essentielle.

Philippe Le Blanc, MBA, CFA

 

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