Transat: je ne pleurerai pas...

Publié le 24/05/2019 à 15:30

Transat: je ne pleurerai pas...

Publié le 24/05/2019 à 15:30

Un appareil du transporteur Air Transat en plein vol.

(Photo: 123RF)

BLOGUE INVITÉ. On a fait grand cas ces derniers jours d’une entente de négociations exclusives de 30 jours entre Transat A.T. et Air Canada. À la conclusion des pourparlers, cette dernière pourrait acheter les actions de Transat à 13,00$ en espèces.

Les actionnaires de Transat sont sûrement heureux de ce dénouement. En effet, le titre s’échangeait à moins de 5,00$ l’action pas plus tard qu’à la fin de mars dernier. Ils sont ainsi susceptibles d'obtenir une forte prime si l'offre d'Air Canada va de l'avant. Mais qu’en est-il d’un actionnaire qui possède le titre depuis de nombreuses années?

J'ai écrit il y a quelques semaines un blogue («Investir: une image vaut mille mots!») dans lequel je disais qu'on pouvait souvent se faire une bonne idée de la performance d'une société en jetant un coup d'oeil au graphique de l'évolution de son titre sur une très longue période. Voici celui de Transat qui couvre une période de 20 ans, soit de 1999 à aujourd'hui:

Personnellement, j'en conclus que Transat n'a pas réellement créé de valeur pour ses actionnaires. Celui qui a acheté le titre il y a vingt ans a payé environ 6,00$ l’action. S’il obtient 13,00$ d’Air Canada, il aura un peu plus que doublé son investissement, pour un rendement annuel composé de 3,9%. De 2006 à 2009, la société a versé des dividendes qui ont totalisé 0,93$ l’action.

Il y a une dizaine d’années, nous avons détenu pendant quelque temps des actions de Transat dans certains de nos portefeuilles sous gestion. Nous avions finalement conclu que l'industrie dans laquelle elle évolue était peu attrayante à long terme, surtout en ce qui concerne les activités de transport aérien de sa filiale Air Transat. Elle requiert beaucoup de capital, alors que les barrières à l'entrée sont relativement peu élevées. Aussi, la demande est très cyclique: les voyages de tourisme sont encore plus discrétionnaires que les voyages d'affaires. En plus, la rentabilité peut constamment être affectée par des facteurs hors du contrôle de la direction tels que les taux de change et le coût du carburant.

J’ajouterais le point suivant: les administrateurs et hauts dirigeants possèdent relativement peu d’actions de la société. Selon la dernière circulaire d'information, ce groupe de 17 personnes possède 1,17 M d’actions de la société, ce qui représente une valeur de 15,3 M$ à 13,00$ l’action. Ce nombre exclut les unités d'actions différées et les options d'achat d'actions que possèdent administrateurs et dirigeants. En revanche, les salaires sont assez généreux: M. Eustache, président et chef de la société depuis 1987, a reçu un salaire annuel moyen de près de 875 000$ au cours des trois dernières années et une rémunération annuelle totale moyenne d’un peu moins de 2,5 M$.

En somme, je suis souvent un peu triste de voir disparaître des sociétés canadiennes en Bourse lorsqu’elles se font acheter. Récemment par exemple, j'ai ressenti une émotion douce-amère lorsque Solium a été achetée à forte prime. Dans le cas de Transat, je ne crois pas que les investisseurs y perdront beaucoup (c'est peut-être une toute autre histoire pour les emplois et pour les prix que devront payer les voyageurs dans le futur... Un autre sujet.).

Philippe Le Blanc, CFA, MBA

Président exécutif du conseil et chef des placements, COTE 100

 

À propos de ce blogue

Philippe Le Blanc est gestionnaire de portefeuille chez COTE 100 et éditeur de la Lettre financière COTE 100+. Il est également l’auteur du livre Avantage Bourse et coauteur de La Bourse ou la Vie.

Philippe Leblanc
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