Bombardier : Montrez-moi l'argent!

Publié le 02/05/2014 à 14:13

Bombardier : Montrez-moi l'argent!

Publié le 02/05/2014 à 14:13

BLOGUE. Le titre de Bombardier a perdu 6 % de sa valeur hier après la publication des résultats du trimestre clos le 31 mars. Pourtant, les profits sont conformes aux attentes et le carnet de commandes atteint le niveau record de 76,9 G$ à la fin de la période, en hausse de 7,2 G$ par rapport au trimestre précédent.

Ce qui semble avoir déçu les investisseurs est que la société a affiché des flux de trésorerie libres (« free cash flow ») négatifs de 915 M$ au trimestre, comparativement à – 590 M$ pour la même période de l’exercice précédent. Il s’agit d’une situation qui perdure depuis quelques années pour la société. Voici ses flux de trésorerie au cours des cinq dernières années :

2013 (31 décembre) : – 907 M$

2012 (31 décembre) : – 636 M$

2011 (31 décembre) : – 1 232 M$

2010 (31 janvier) : – 215 M$

2009 (31 janvier) : + 342 M$

La dernière fois où la société a dégagé des flux de trésorerie libres positifs remonte donc à 2009. Depuis cette date, en incluant le plus récent trimestre, Bombardier cumule des flux de trésorerie libres négatifs de 3,315 G$. Inutile de dire qu’il faudra que cette tendance soit renversée rapidement, d’où l’importance du lancement de la nouvelle génération d’avions de série C. Cela dit, il est normal que pendant une période intense de développement de nouveaux produits (la série C et le Learjet 85), Bombardier puise dans ses ressources et brûle de l’encaisse. En théorie, une fois que cette période sera terminée et que les nouveaux avions commenceront à être livrés, la société pourra réduire sensiblement ses investissements et bénéficier de rentrées de fonds substantielles.

Par contre, si l’on examine le bilan, on constate que la marge de manœuvre de l’entreprise diminue dangereusement. Au 31 mars, sa dette totalise près de 7,1 G$ comparativement à 5,4 G$ au 31 janvier 2013 et sa dette nette de près de 4,6 G$ représente plus de deux fois l’avoir des actionnaires, niveau élevé à mon avis. Et c’est sans compter le déficit du fonds de pension qui, bien qu’il ait nettement diminué au cours du dernier exercice, atteint 1,65 G$ à la fin de 2013.

Comparons Bombardier à CN

Maintenant, comparons la situation de Bombardier à celle de CN. Ce sont après tout deux titres du même secteur industriel du TSX et ce sont deux sociétés qui doivent investir lourdement en immobilisations. Voici les flux de trésorerie libres dégagés par CN au cours des cinq derniers exercices :

2013 : + 1 627 M$

2012 : + 1 640 M$

2011 : + 1 720 M$

2010 : + 1 581 M$

2009 : + 1 108 M$

CN a donc dégagé des flux de trésorerie libres cumulant près de 7,7 G$ au cours des cinq dernières années. En outre, le bilan de la société est relativement sain. Au 31 décembre 2013, la société affiche une dette nette de 8,0 G$, soit 61 % de l’avoir des actionnaires (13,1 G$). Qui plus est, son fonds de pension et son régime de retraite cumulent un surplus de 1,1 G$ à la fin de 2013.

La comparaison entre Bombardier et CN est sûrement injuste car leurs modèles d’affaires diffèrent grandement. Bombardier doit consentir des investissements majeurs dans le développement de nouveaux avions pendant certaines périodes, lesquelles seront normalement suivies par des périodes où ses investissements en immobilisations seront nettement moins élevés et où elle dégagera des liquidités excédentaires substantielles. Dans le cas du CN, la société se doit d’investir année après année principalement dans le maintien de son réseau ferroviaire et dans son capital roulant. Entre les deux modèles d’affaires, celui de CN me semble beaucoup moins risqué, ce qui est d’ailleurs nettement reflété dans l’évaluation des deux titres : le titre de Bombardier s’échange à 11 fois les profits prévus en 2014 tandis que celui du CN se vend à 18,5 fois.

Philippe Le Blanc, CFA, MBA

 

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