Votre organisation est-elle, sans le savoir, raciste ou sexiste?

Publié le 30/11/2020 à 07:00

Votre organisation est-elle, sans le savoir, raciste ou sexiste?

Publié le 30/11/2020 à 07:00

Une discrimination pénalisante pour tout le monde... (Photo: Markus Spiske pour Unsplash)

BLOGUE. Lorsqu’on demande aux Québécois s’il y a «des jugements ou des comportements inappropriés» sur leur lieu de travail actuel, ils sont 81% - le taux le plus élevé au Canada - à jurer qu’il n’y a jamais rien de tout cela chez eux. Juré craché. Ni racisme ni sexisme. En aucun cas. Absolument jamais.

Le hic? C’est qu’une étude d’ADP Canada montre qu’il y a là un aveuglement monumental, involontaire ou pas, allez savoir. Car il a été posé la même question à des employés issus d’une minorité visible ainsi qu’à des femmes, et il en ressort tout à fait autre chose:

> 1 sur 3. En fait, 31% des salariés issus d’une minorité visible disent qu’ils ont déjà constaté des jugements ou des comportements inappropriés sur leur lieu de travail. Qu’ils l’ont subi eux-mêmes ou qu’ils ont vu autrui le subir. À noter que les 18-34 ans sont les plus susceptibles d'avoir vécu ou observé ce type de problématiques.

> Un frein à la carrière. Le tiers (32%) des salariés issus d’une minorité visible estiment que leur appartenance ethnique a eu et a toujours des conséquences négatives sur leur avancement professionnel, et 19% affirment même que des préjugés racistes et/ou le manque de diversité et d'inclusion ont déjà influé sur leur décision de quitter un employeur.

> 1 sur 5. Quant à elles, 19% des femmes disent avoir vécu ou observé des jugements ou des comportements inappropriés fondés sur le sexe, et 22% estiment en avoir pâti dans leur avancement professionnel.

> Poussés au silence. Le sentiment d’oppression est tel que les salariés issus d’une minorité visible et les femmes en sont amenés à faire profil bas sur leur lieu de travail. Un profil bas qui se traduit, fort souvent, par le silence. Ainsi, 31% des salariés issus d’une minorité visible avouent qu’ils ne se sentent pas à l’aise d’exprimer leurs idées et opinions au travail. Quant aux femmes, le même pourcentage est de 27%.

On le voit bien, les chiffres sont éloquents. Oui, il y a du racisme au sein de nos organisations, de manière plus ou moins larvée. Et oui, il y a également du sexisme, de manière plus ou moins larvée. Un racisme et un sexisme tels que les principales victimes en sont réduites à se taire. Par simple réflexe de survie. Ce qui montre combien la situation est grave…

Bien entendu, loin de moi l’idée de considérer tout le monde comme raciste et sexiste! Tel n’est pas ce qui ressort de cette étude d’ADP Canada. Non, l’important, c’est d’ouvrir les yeux sur une triste réalité de nos organisations. Puis, d’avoir le cran d’agir en conséquence, tous ensemble.

Tenez, la même étude met au jour une donnée lumineuse à cet égard: seulement 42% - le taux le plus faible du Canada - des Québécois pensent que leur organisation se soucie de diversité et d’inclusion, qu’elle a une politique à ce sujet. À cela s’ajoute le fait que seulement 30% des Québécois pensent que la composition des effectifs de leur organisation est vraiment diversifiée et inclusive.

Autrement dit, c’est seulement une faible minorité des Québécois qui considèrent que l’organisation pour laquelle ils travaillent a le souci d’être juste et équitable envers les employées et les employés issus d’une minorité visible. Ce qui en dit long, je le souligne encore, sur l’étendue du problème…

Comment pourrions-nous corriger le tir sans tarder? L’étude indique que 50% des organisations canadiennes ont récemment abordé le sujet de la diversité et de l’’inclusion par le biais de discussions au sein des équipes de travail. Sûrement à la suite des mouvements #MeeToo et autres #BLM. Ce qui est, de toute évidence, un pas dans la bonne direction.

«Bien que notre étude souligne que des conversations ont commencé dans la moitié des lieux de travail au Canada, les employeurs doivent être maintenant proactifs quant à la mise en place d'une culture diversifiée et inclusive au sein de leur organisation; et ce, ne serait-ce que pour respecter les droits de la personne», dit Reetu Bajaj, conseillère en ressources humaines, d’ADP Canada.

Bref, il est maintenant grand temps de passer à l’action. Ce qui peut se faire concrètement, selon les salariés interrogés dans le cadre de l’étude, par:

- un recrutement véritablement diversifié et inclusif;

- un programme de formations sur la diversité et l’inclusion en milieu de travail;

- une enquête sur l’état de la situation au sein de l’organisation ainsi que l’adoption d’éventuels correctifs à apporter.

Voilà. Il ne s’agit là que de modestes suggestions. Il appartient à chacun de trouver sa propre voie vers un meilleur équilibre, une meilleure santé managériale. Car il est clair qu’il en va de l’avenir de l’organisation elle-même. Ni plus ni moins.

«Il existe des preuves indéniables qu'une main-d'œuvre diversifiée favorise la productivité et la créativité au sein des organisations, dit Mme Bajaj. Si jamais un employeur entend attirer les talents à lui demain matin et se donner toutes les chances de croître, il est évident qu’il va lui falloir jouer l’atout de la diversité et de l’inclusion. Quant à ceux qui ne voudront rien entendre à ce sujet, eh bien, il leur faudra continuer à se plaindre de la “pénurie de main-d'œuvre”...»

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À propos de ce blogue

EN TÊTE est le blogue management d'Olivier Schmouker. Sa mission : aider chacun à s'épanouir dans son travail. Olivier Schmouker est chroniqueur pour le journal Les affaires, conférencier et auteur du bestseller «Le Cheval et l'Äne au bureau» (Éd. Transcontinental), qui montre comment combiner plaisir et performance au travail. Il a été le rédacteur en chef du magazine Premium, la référence au management au Québec.

Olivier Schmouker

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