Un truc ultrasimple pour générer l'idée du siècle

Publié le 19/05/2017 à 06:06

Un truc ultrasimple pour générer l'idée du siècle

Publié le 19/05/2017 à 06:06

L'idée, c'est de créer un binôme à nul autre pareil... Photo: DR

Crise économique, valse-hésitation des consommateurs, pénurie de main-d'oeuvre qualifiée,... Aucune entreprise n'échappe au gros temps, ces temps-ci. Aucune, ou presque.

Car, si la plupart des entreprises ont le réflexe de baisser les voiles lorsque les vents soufflent en furie, une poignée d'autres agissent tout autrement, en sortant la bonne voile correspondant au petit vent favorable qu'elles semblent avoir déniché comme par magie, pour ne pas dire par miracle. Oui, un petit vent favorable qui les fait filer à toute allure vers le beau temps, là où les affaires se révèlent florissantes. On peut penser à différents fleurons de la nouvelle garde québécoise, à l'image notamment de GSOFT, Mirego, ou encore Frank + Oak.

Quel est le secret de leur réussite? Eh bien, la réponse est peut-être plus simple que vous ne l'imaginez. En effet, tout est parti, au fond... d'une idée géniale! À savoir de l'identification d'un petit vent favorable que personne d'autre n'avait vu venir. C'est aussi bête que ça.

Je vous vois d'ici, vous brûlez d'envie de me demander comment ils s'y sont pris, au juste, pour trouver leur fameuse idée géniale. Parfait. Eh bien, c'est d'accord, je vais vous dévoiler un truc incroyable, oui, un truc fantastique, pour y parvenir à votre tour.

Ce truc, je l'ai déniché dans une étude intitulée Conversational peers and idea generation: Evidence from a field experiment et signée par : Sharique Hasan, professeur de comportement organisationnel à la Stanford Business School, à Palo Alto (États-Unis), et Rembrand Koning, professeur de gestion des affaires à la Harvard Business School, à Boston (États-Unis). Ce truc-là, je me permets de le souligner, est vraiment susceptible de propulser votre équipe, voire votre entreprise, vers l'avenir. Rien de moins.

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Les deux chercheurs de Stanford et de Harvard ont profité d'un événement dédié aux jeunes entrepreneurs pour regarder s'il n'y avait pas un moyen simple de booster les réunions de brainstorming. C'est que cet événement-là, qui avait lieu en Inde, réunissait une centaine d'entrepreneurs en herbe qui trépignaient d'impatience à l'idée de lancer leur propre start-up, mais qui ne savaient pas si leur projet était viable, ou pas; l'objectif était de les faire plancher ensemble sur les projets des uns et des autres, en toute transparence, afin de permettre aux porteurs des meilleurs projets de pouvoir rapidement se lancer en affaires, et aux autres, de revoir leur copie sans tarder.

Donc, MM. Hasan et Koning ont pris en charge la première des trois semaines de l'événement, qui visait juste à «échauffer les neurones des uns et des autres», et ont ainsi invité les 112 participants à «révolutionner ensemble l'industrie du mariage», en procédant par étapes :

1. Briser la glace. Réunis dans une salle dotée de 40 tables, les participants ont participé à une activité simple visant à briser la glace (ex.: se présenter aux autres personnes installées à la même table, en indiquant sa plus grande qualité ainsi que l'un de ses défauts). Puis, il a été demandé à chacun de dresser la liste la plus longue possible d'idées d'applications qui pourraient changer la donne dans l'industrie du mariage, en un temps imparti.

2. Réinventer. Les participants ont dû sélectionner eux-mêmes leurs meilleures idées d'applications, puis rédiger un court texte de présentation pour chacune d'elles. Et ce, en l'espace d'une heure. (Note : chacun a ainsi rédigé, en moyenne, 6,6 textes d'une longueur moyenne de 505 caractères.)

3. Converser de manière empathique. Les participants ont ensuite été répartis en binômes, au hasard. La mission de chaque binôme : tenir une discussion empathique d'un quart d'heure. Une quoi? Une discussion empathique, c'est-à-dire une discussion partiellement guidée visant à permettre à chacun de mieux connaître, voire comprendre, son interlocuteur; et ce, pour l'occasion, en amenant chacun à raconter à l'autre son expérience personnelle du mariage (ex.: le sien, s'il a déjà eu lieu; celui d'un ami; celui d'un proche; etc.).

4. Réinventer une nouvelle fois. Une fois la discussion empathique terminée, chaque participant a dû replancher pendant une heure sur de nouvelles idées d'applications susceptibles de bouleverser l'industrie du mariage (à la lumière, bien entendu, de la discussion qui vient d'avoir lieu). Et ce, pendant une heure.

5. Évaluer de manière anonyme. Les organisateurs ont rassemblé toutes les idées d'applications, et ont effectué un tri sélectif (quand deux idées étaient relativement semblables, seule celle qui leur semblait la mieux formulée était conservée). Ils ont alors demandé à chaque participant d'évaluer de manière anonyme les 50 idées restantes. Et ce, en fonction de trois critères:

– valeur commerciale;

– probabilité d'achat;

– nouveauté.

7. Développer. Les participants ont été répartis au hasard dans des groupes de deux ou trois individus. La mission de chaque groupe : concocter l'ébauche d'un prototype, puis mettre au point une ébauche de plan d'affaires, pour l'une des 5 idées d'applications qui sont arrivées en tête des évaluations.

8. Évaluer à nouveau. Chaque participant a dû évaluer 5 des projets finaux, en fonction d'une douzaine de critères (faisabilité, réponse à une attente réelle, etc.). Pour finir, les trois projets "gagnants" ont été présentés à tout le monde.

Bon. Je vous ai donné de façon détaillée chacune des étapes de la réflexion commune sur le meilleur moyen de «révolutionner l'industrie du mariage»; et ce, dans l'optique de vous inspirer, si jamais il vous venait l'envie de brainstormer, un beau jour, avec l'ensemble des membres de votre équipe.

Mais là n'est pas l'important. Ce que voulaient les deux chercheurs, c'était identifier une méthode simple pour booster une réflexion commune. Rien d'autre.

Or, l'expérience leur a permis de découvrir deux choses passionnantes, sachant qu'ils disposaient au préalable du profil psychologique détaillé de chacun des 112 participants :

> Être créatif ne suffit pas. Le simple fait d'être quelqu'un d'ouvert à la nouveauté – l'un des traits psychologiques considérés par les deux chercheurs, en lien direct avec la créativité d'une personne – ne suffit pas à générer des idées à la fois pertinentes et neuves. Car lorsque les participants qui se distinguaient sur ce point planchaient seuls, il n'en sortait rien de grandiose.

> La créativité bouillonne dès lors qu'on est deux. Les personnes particulièrement ouvertes à la nouveauté ne voient leur créativité bouillonner qu'à partir du moment où elles planchent en binôme. Et surtout, pas n'importe quel binôme : l'idéal, c'est que l'autre soit quelqu'un d'extraverti. Car les idées émises par un binôme créatif/extraverti sont, en général, à la fois pertinentes et neuves, pour ne pas dire exceptionnelles – en particulier, riches en détails, parfaitement formulées et hautement appréciées des autres. Tandis que celles d'un binôme créatif/introverti ne sont, en générale, que «moyennes»

Voilà. Vous connaissez à présent le secret des idées carrément géniales : elles sortent, en général, d'un duo composé d'une personne créative et d'une autre qui, sans être particulièrement créative, est extravertie. «Un tel binôme est à même de faire passer des idées généralement considérées comme «très bonne» à «géniales». Ce qui correspond, de façon chiffrée, à les propulser du 8e décile au 10e décile», disent MM. Hasan et Koning dans leur étude.

Renversant, n'est-ce pas? Il existe donc bel et bien un moyen de trouver l'idée du siècle pour votre propre industrie. Et ce moyen est tout à fait à votre portée.

Le hic? Oui, je sais, vous allez me dire qu'au sein de votre équipe vous n'avez ni employé hautement «créatif» ni employé particulièrement «extraverti». Et par conséquent, que vous êtes dans une impasse...

Minute! Les deux chercheurs ont pensé à ça. Ils ont fouillé davantage dans leurs données, histoire d'identifier un plan B pour ceux qui seraient dans votre cas de figure. Et la bonne nouvelle du jour, c'est qu'ils en ont trouvé un:

> Un binôme à la fois perspicace et cultivé. Il est possible d'obtenir des idées, certes pas géniales, mais tout de même renversantes d'intelligence, à partir du moment où l'on met ensemble deux personnes «perspicaces et cultivées». Pas besoin, donc, de forcément créer un binôme créatif/extraverti. On peut très bien en créer un dont chaque membre est doté à la fois d'un esprit pénétrant, c'est-à-dire qui comprend vite et bien à peu près n'importe quoi, et d'une solide connaissance du domaine dans lequel il lui faut innover. Car cela fera très probablement d'impressionnantes étincelles sur le plan créatif. À noter, toutefois, un point crucial : il conviendra dès lors d'adapter le processus de réflexion de ce binôme-là, en ce sens qu'il lui faudra a priori des discussions plus longues que celles du binôme créatif/extraverti, et peut-être même plus fréquentes et nombreuses, selon les deux chercheurs de Stanford et Harvard.

Vous savez tout, à présent. Oui, vous êtes désormais à même d'enfin trouver l'idée du siècle, celle qui vous permettra de clancher la concurrence à tout jamais.

Que retenir de tout cela? Ceci, à mon avis :

> Qui entend générer l'idée du siècle se doit de créer un binôme créatif/extraverti et le mettre à pied d'oeuvre. Il lui faut mettre ensemble une personne douée d'une grande créativité ainsi qu'une autre réputée pour son caractère extraverti; puis, leur demander de plancher sur un projet crucial pour l'équipe, voire l'entreprise. Car d'un tel binôme jaillira nécessairement non pas des idées farfelues, mais des idées à la fois pertinentes et neuves. À noter qu'il lui est également possible de recourir à un plan B, si jamais il n'a pas sous la main un créatif et un extraverti : des idées renversantes d'intelligence peuvent également découler de la réunion de deux personnes perspicaces et cultivées.

En passant, l'écrivain français Victor Hugo aimait à dire : «On résiste à l'invasion des armées, on ne résiste pas à l'invasion des idées».

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À propos de ce blogue

EN TÊTE est le blogue management d'Olivier Schmouker. Sa mission : aider chacun à s'épanouir dans son travail. Olivier Schmouker est chroniqueur pour le journal Les affaires, conférencier et auteur du bestseller «Le Cheval et l'Äne au bureau» (Éd. Transcontinental), qui montre comment combiner plaisir et performance au travail. Il a été le rédacteur en chef du magazine Premium, la référence au management au Québec.

Olivier Schmouker

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