Surqualifié pour le poste que vous occupez? Attention, danger!

Publié le 20/07/2017 à 06:06, mis à jour le 20/07/2017 à 06:14

Surqualifié pour le poste que vous occupez? Attention, danger!

Publié le 20/07/2017 à 06:06, mis à jour le 20/07/2017 à 06:14

Parfois, notre ambition dépasse le petit cadre de notre réalité... Photo: DR

Au bureau, vous sentez-vous comme un poisson rouge dans un bocal? Oui, trouvez-vous que vos talents ne sont pas utilisés comme ils devraient l'être? Et que, par voie de conséquence, vous étouffez, jour après jour, dans le minuscule espace qu'on vous a accordé? Si tel est le cas, je suis au regret de vous annoncer que vous êtes exposé à de graves dangers.

C'est ce que j'ai saisi à la lecture d'une étude intitulée Who thinks they're a big fish in a small pond and why does it matter? A meta-analysis of perceived overqualification, laquelle est signée par : Michael Harari, professeur de management à la Florida Atlantic University à Boca Raton (États-Unis), et Chockalingam Viswesvaran, professeur de management à la Florida International University à Miami (États-Unis), assisté de son étudiante Archana Manapragada. Regardons ça ensemble...

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Les trois chercheurs floridiens ont eu l'idée de se plonger dans l'ensemble des études scientifiques parues ces 25 dernières années à propos du sentiment de surqualification ressenti au travail par certains employés, histoire de recouper leurs données entre elles et d'être ainsi en mesure d'en tirer de solides conclusions. Leur objectif était double : d'une part, regarder si ce sentiment-là était vécu par un type particulier d'employés, ou pas; d'autre part, découvrir s'il avait le moindre impact sur la performance de l'employé en question.

Simple, n'est-ce pas? Eh bien, l'air de rien, ce travail de moine leur a permis de faire de belles trouvailles :

> Insatisfaction. Lorsqu'on considère qu'on est surqualifié pour le poste qu'on occupe, on est, en général, insatisfait de son quotidien au travail.

> Démotivation. Lorsqu'on s'estime surqualifié pour le poste qu'on occupe, on ne se sent pas, en général, motivé pour accomplir les tâches qui doivent l'être.

> Tension nerveuse. Lorsqu'on considère qu'on est surqualifié pour le poste qu'on occupe, on ressent, en général, une tension nerveuse durable, assez grande pour nuire à notre bien-être.

> Comportements déviants. Lorsqu'on s'estime surqualifié pour le poste qu'on occupe, on risque, fort souvent, d'adopter des comportements déviants : retards répétés le matin; départs précipités en fin de journée; vol de matériel appartenant à l'employeur; harcèlement de collègues; etc.

Bref, la surqualification représente un terrible danger pour la personne concernée. Un danger qui concerne non seulement sa performance au travail, mais aussi son bien-être dans la vie. Un danger d'autant plus grand qu'il est insoupçonné. Ni plus ni moins.

«Dès qu'il y a un fossé entre les attentes de l'employé et la réalité de son quotidien au travail, la frustration apparaît. Et avec elle, des réactions compréhensibles, mais indésirables, comme le fait de râler tout le temps, de saper l'autorité des dirigeants, ou encore de saboter les efforts communs pour atteindre un objectif», a d'ailleurs expliqué M. Harari au fil de presse Newswise.

Et de souligner : «Plus un employé s'estime surqualifié, plus il risque d'adopter un comportement déviant».

Ce n'est pas tout. La méta-analyse effectuée par les trois chercheurs floridiens leur a permis d'établir un portrait-robot sommaire des employés qui ont tendance à se considérer comme surqualifiés. Le voici, en trois traits principaux :

> Jeune. C'est la plupart du temps en début de carrière que les gens ont la sensation de ne pas être utilisés à leur plein potentiel. Au fur et à mesure qu'ils prennent de l'expérience, les gens grimpent, en général, dans la hiérarchie ou prennent davantage de responsabilités, si bien que le hiatus entre leurs qualifications et la réalité de leur quotidien au travail va en diminuant.

> Surdiplômé. Le fait d'être bardé de diplômes amène, fort souvent, les gens à considérer qu'ils disposent d'une vaste palette de talents, si bien que rares sont les postes qui leur permettent d'exercer un grand nombre d'entre eux. Ce décalage-là amène, en toute logique, de la frustration sur le plan professionnel, puis à tout ce qui s'ensuit.

> Narcissique. Lorsqu'on porte une attention excessive à soi-même, la réalité autour de soi n'est jamais satisfaisante : un jour, l'insatisfaction naît du fait que les autres n'estiment pas nos talents à leur juste valeur; un autre jour, elle découle du fait que les projecteurs ne sont pas assez braqués sur notre illustre personne, par exemple lors d'une réunion où un collègue "rival" s'évertue à briller aux yeux des autres à notre détriment; etc.

Autrement dit, si vous êtes une jeune recrue bardée de diplômes qui a un goût immodéré pour les selfies, prenez garde! C'est que le syndrome de la surqualification menace de vous frapper de plein fouet. Et le choc risque d'être terrible. Vraiment terrible.

Idem, si vous êtes un manager à la recherche des talents de demain, veillez porter une attention toute particulière aux candidats qui présentent plusieurs de ces traits, si ce n'est les trois. Car si la nouvelle recrue se met à souffrir du syndrome de la surqualification, cela risque de mettre à mal la cohésion de votre équipe, voire sa performance.

Que faire, dans un cas comme dans l'autre? Ça me semble assez simple : il suffit de réduire l'écart existant entre la qualification réelle de la personne concernée et les tâches qu'il lui faut accomplir au quotidien. Il convient de s'asseoir ensemble pour voir les nécessaires changements à apporter. Et le tour sera joué!

Que retenir de tout cela? Ceci, à mon avis :

> Qui entend prévenir les risques inhérents à la surqualification se doit d'adapter son quotidien au travail à ses talents réels. Il lui faut prendre le temps de discuter avec les membres de son équipe (ou simplement le manager) sur ce qu'il pourrait apporter au groupe et de voir, tous ensemble, comment cela pourrait se faire concrètement dans les jours et les semaines à venir. Puis, il suffit d'assurer un suivi efficace, histoire de corriger le tir chemin faisant, le cas échéant.

En passant, l'homme d'affaires français Marin Karmitz a confié lors d'une entrevue accordée au magazine Les Inrockuptibles : «Le grand talent accepte les critiques».

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À propos de ce blogue

EN TÊTE est le blogue management d'Olivier Schmouker. Sa mission : aider chacun à s'épanouir dans son travail. Olivier Schmouker est chroniqueur pour le journal Les affaires, conférencier et auteur du bestseller «Le Cheval et l'Äne au bureau» (Éd. Transcontinental), qui montre comment combiner plaisir et performance au travail. Il a été le rédacteur en chef du magazine Premium, la référence au management au Québec.

Olivier Schmouker

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