Pour appuyer son propos, Voltaire fait référence à La Fontaine… «Il est à remarquer que si l’élégance a toujours l’air facile, tout ce qui est facile et naturel n’est cependant pas élégant. Il n’y a rien de si facile, de si naturel que «La cigale ayant chanté | Tout l’été…» et «Maître corbeau, sur un arbre perché…». Pourquoi ces morceaux manquent-ils d’élégance? C’est que leur naïveté est dépourvue de mots choisis et d’harmonie. «Amants, heureux amants, voulez-vous voyager? | Que ce soit aux rives prochaines…» (La Fontaine, Livre IX, fable xi) et cent autres traits ont, eux, avec d’autres mérites, celui de l’élégance».
On le voit bien, l’élégance découle d’une alliance de grâce, de pureté et d’harmonie, que ce soit dans une forme ou dans un mouvement. Être élégant, c’est par conséquent faire montre de toutes ces qualités. Par exemple, on peut considérer l’élégance comme une forme de délicatesse morale, qui consiste à ne pas dire un mot plus haut que l’autre, ou encore à tempérer ses émotions vis-à-vis d’autrui dans l’optique d’entretenir avec lui une relation harmonieuse. Respecter l’autre, c’est ainsi avoir l’élégance de reconnaître ses torts.
A contrario, certains estiment peut-être que l’élégance trahit la vanité d’une personne. Ils croient que ceux qui redoublent d’efforts pour sans cesse bien paraître, que ce soit par de belles tenues vestimentaires ou par des manières savamment contrôlées, le font pour se sentir mieux dans leur peau, voire pour séduire. Ils voient l’élégance comme le témoignage d’un égoïsme monstrueux.
Le hic dans cette façon d’aborder la notion d’élégance? C’est qu’il y a là confusion entre amour de soi et amour-propre. L’amour de soi est tout à fait louable, car cela permet d’avoir une personnalité équilibrée. En revanche, l’amour-propre renvoie à l’apparence, il correspond à une passion artificielle et funeste, car celle-ci repose sur la comparaison avec autrui ainsi que sur le désir de paraître et de dominer. La vraie élégance est liée à l’amour de soi, pas à l’amour-propre.