Mais voilà, à force de décliner les corsets de toutes les façons imaginables, et ce depuis ses débuts dans les années 1980, peut-on encore parler d’élégance? Oui, les œuvres de Jean-Paul Gaultier peuvent-elles être dites «élégantes»? Interrogations d’autant plus pertinente que deux jeunes femmes sont passées à côté de moi, l’une d’elles montrant une robe on ne peut plus classique en murmurant «Ah, ça, tu vois, je pourrais le porter»…
Et je me suis donc tout naturellement posé la question suivante : «C’est quoi, au juste, l’élégance?». Je me suis alors souvenu du Dictionnaire philosophique portatif de François Marie Arouet, dit Voltaire, dans lequel une des entrées est le mot «Élégance». Sa définition : «Ce mot, selon quelques-uns, vient d’electus (choisi). On ne voit pas qu’aucun autre mot latin puisse être son etymologie : en effet, il y a du choix dans tout ce qui est élégant. L’élégance est un résultat de la justesse et de l’agrément.»
Voltaire poursuit en indiquant que Cicéron se servait de ce mot «pour exprimer un homme, un discours poli». Il s’agit dès lors d’une attitude, d’une forme d’expression du raffinement. «L’élégance d’un discours n’est pas l’éloquence, c’en est une partie : ce n’est pas la seule harmonie, le seul nombre; c’est la clarté, le nombre et le choix des paroles. (…) Un discours peut être élégant sans être un bon discours, l’élégance n’étant en effet que le mérite des paroles; mais un discours ne peut être absolument bon sans être élégant», ajoute-t-il.
«Un orateur peut convaincre, émouvoir même sans élégance, sans pureté, sans nombre. (…) Le grand point dans l’art oratoire, c’est que l’élégance ne fasse jamais tort à la force», précise-t-il.