Olivier Schmouker - Comment réagir face à l'inconnu?

Publié le 24/05/2011 à 09:27, mis à jour le 26/05/2011 à 14:07

Olivier Schmouker - Comment réagir face à l'inconnu?

Publié le 24/05/2011 à 09:27, mis à jour le 26/05/2011 à 14:07

Plusieurs techniques permettent d’effectuer la séparation isotopique de l’uranium 235, la principale étant par diffusion gazeuse d'hexafluorure d'uranium, d’autres étant par diffusion thermique et par séparation électromagnétique. Pour la bombe, les scientifiques du Projet Manhattan ont utilisé un mécanisme appelé gun (canon) pour obtenir la masse critique d’uranium 235 : une masse d’uranium 235 (bullet) était lancée dans un tube vers une autre masse d’uranium 235, créant ainsi la masse critique nécessaire à l'explosion.

Quant au plutonium 239, il s’agit d’un élément de synthèse qui contient un isotope qui fissionne si vite que le mécanisme de type gun ne fonctionnait pas, étant trop «lent» en comparaison. Il a alors fallu trouver une autre solution, en l’occurrence un mécanisme à «implosion» – utilisant une boule creuse de plutonium qui s’effondre sur elle-même –, nettement plus rapide.

La première bombe au plutonium explosa le 16 juillet 1945 dans le désert de Jornado del Muerto, dans l’État du Nouveau-Mexique. L’explosion dégagea une force équivalente à 21 000 tonnes de TNT, une puissance phénoménale qui évoqua à Robert Oppenheimer un passage du Bhagavad-Gita, celui où le dieu Shiva dit «Pour intimider le Prince, Vishnu prit sa forme aux nombreux bras et s’exclama «Maintenant, je suis Shiva, le destructeur des mondes!»». Plus prosaïquement, son adjoint Kenneth Bainbridge, responsable des essais, présenta ainsi la chose : «À partir de maintenant, nous sommes tous des fils de putes»… Les deux bombes suivantes – Little Boy (uranium) et Fat Man (plutonium) – ont été larguées respectivement sur Hiroshima le 6 août 1945 et sur Nagasaki le 9 août de la même année. Le Projet Manhattan avait ainsi atteint son objectif dans le temps record de 2 ans, 3 mois, et 16 jours.

Mais tout cela n’a pas été aussi simple qu’il y paraît… M. Lenfle l’explique d’ailleurs clairement dans son étude. Le Projet Manhattan est souvent présenté comme un modèle parfait en matière de gestion de projets en parallèle, mais lorsqu’on le regarde en détail, on découvre que, certes, c’était la meilleure méthode à adopter pour progresser dans un tel territoire inconnu avec aussi peu de temps devant soi, néanmoins, les responsables du projet ont dérogé à la règle, et ce à un moment critique…

En février 1945, après un peu plus de six mois de tergiversations, la technique de diffusion thermique a été abandonnée pour effectuer la séparation isotopique de l’uranium 235, car elle ne donnait pas les résultats escomptés. Il a alors été décidé de ne plus tester les différentes techniques en parallèle, mais de mettre tous les efforts sur une seule d’entre elles, la plus prometteuse, soit la diffusion gazeuse d'hexafluorure d'uranium. Idem avec le plutonium, les équipes de recherche ont été redistribuées afin de donner la priorité au mécanisme d’implosion, lui aussi présentant le plus fort potentiel de réussite.

À propos de ce blogue

EN TÊTE est le blogue management d'Olivier Schmouker. Sa mission : aider chacun à s'épanouir dans son travail. Olivier Schmouker est chroniqueur pour le journal Les affaires, conférencier et auteur du bestseller «Le Cheval et l'Äne au bureau» (Éd. Transcontinental), qui montre comment combiner plaisir et performance au travail. Il a été le rédacteur en chef du magazine Premium, la référence au management au Québec.

Olivier Schmouker

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