Comment devenir un orateur digne de Steve Jobs?

Publié le 14/10/2014 à 06:09

Comment devenir un orateur digne de Steve Jobs?

Publié le 14/10/2014 à 06:09

> Truc numéro 1 : le pathos

En ce jour de mars 2008, l'heure était on ne peut plus grave. Les commissaires de la Sec étaient convaincus qu'Apple avait truqué des documents boursiers officiels, et tenaient entendre Steve Jobs à ce sujet. C'est qu'en tant que PDG, il était responsable, en cas de violation avérée des règles de Wall Street. C'était bien simple, il encourait ni plus ni moins qu'une condamnation à la prison.

Quelle stratégie a-t-il employé pour échapper aux griffes qui tentaient de le capturer? Il n'a aucunement cherché à nier les faits, ni même à les minimiser. Non, il a joué la carte de l'émotion…

«J'ai toujours passé le plus clair de mon temps à rendre service à ceux qui travaillent chez Apple, et, vous savez, à leur faire des surprises, à les réjouir, à leur montrer tous les bienfaits d'avoir une carrière au sein d'Apple. Pour eux comme pour leur famille. Et je faisais ça, alors même que j'avais, moi, la sensation que le conseil d'administration n'avait pas autant d'attention pour moi. Ce qui me blessait. Vraiment. Il faut comprendre. J'ai consacré, quoi, ces quatre ou cinq dernières années de ma vie à me dédier entièrement à Apple, à ne pas passer le temps que j'aurais dû avec ma propre famille, et tout ça. Vous comprenez. Tout ce temps-là, j'ai eu l'impression, moi, que personne ne se souciait vraiment de moi», a-t-il notamment dit aux commissaires, histoire de les émouvoir, de montrer à quel point il s'était sacrifié pour le bonheur des autres, et donc pour signifier à quel point il serait cruel, à présent, de l'écharper pour "quelques dérapages" dus au fait qu'il était prêt à tout pour satisfaire autrui.

Bon. Lu comme ça, à froid, ces mots ne semblent pas si émouvants que ça, j'en conviens. Mais il faut imaginer une personne touchante et sincère les prononcer réellement devant vous, les yeux dans les yeux, l'air démuni, fragile et sensible, et, croyez-moi, il est impossible que votre cœur ne soit pas vrillé en tous sens.

Steve Jobs est ainsi parvenu à émouvoir des commissaires qui en avaient pourtant vu d'autres durant leur carrière. Il a si bien réussi qu'il a été absous de toute responsabilité personnelle dans cette affaire. Et Apple a finalement juste eu à payer une amende, pour un crime qui aurait pu se traduire par des conséquences dramatiques pour sa pérennité.

Le PDG d'Apple a ici usé du pathos. Du quoi? Du pathos, soit la corde sensible de l'émotion qui est en chacun de nous et qui a été mise en évidence par Aristote. Ce pathos qui, lorsqu'il est bien utilisé, permet d'aller jusqu'à se faire plaindre par son opposant : dans le cas présent, les commissaires en sont arrivé, de fait, à penser «Pauvre, pauvre Steve».

À propos de ce blogue

EN TÊTE est le blogue management d'Olivier Schmouker. Sa mission : aider chacun à s'épanouir dans son travail. Olivier Schmouker est chroniqueur pour le journal Les affaires, conférencier et auteur du bestseller «Le Cheval et l'Äne au bureau» (Éd. Transcontinental), qui montre comment combiner plaisir et performance au travail. Il a été le rédacteur en chef du magazine Premium, la référence au management au Québec.

Olivier Schmouker

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