Comment demander de l'aide (sans perdre la face)?

Publié le 11/10/2017 à 06:06, mis à jour le 11/10/2017 à 06:33

Comment demander de l'aide (sans perdre la face)?

Publié le 11/10/2017 à 06:06, mis à jour le 11/10/2017 à 06:33

Il n'y a, en vérité, aucune honte à demander un coup de main... Photo: DR

Avez-vous noté, comme moi, combien il nous est difficile de demander de l'aide? C'est que nous avons peur de nous faire dire «non» en pleine face. De passer pour quelqu'un qui n'est pas à la hauteur de la mission qu'il a à remplir. Ou encore, de déranger les autres indûment.

La question saute aux yeux : «Mais pourquoi avons-nous si peur que ça de demander un coup de main à autrui?» Oui, pourquoi figeons-nous alors, tétanisés par mille et un questionnements plus ridicules les uns que les autres, du genre «Que vais-je pouvoir lui donner en échange?» et autres «Vais-je me sentir redevable au point de ne pas oser lui dire "non" lorsqu'à son tour il me demandera de l'aider?» Mystère.

En vérité, il n'y a là rien de mystérieux. C'est ce que j'ai compris en découvrant une étude passionnante à ce sujet, intitulée If you need help, just ask: Underestimating compliance with direct requests for help et signée par deux professeurs de comportement organisationnel, Francis Flynn, de Stanford, et Vanessa Bohns, de Cornell. Regardons ça ensemble...

Les deux chercheurs américains ont procédé à six expériences complémentaires qui visaient à identifier le meilleur moyen de surmonter notre peur de nous faire dire «non» lorsque nous ressentons la nécessité de demander de l'aide. Ils ont ainsi invité des dizaines de volontaires à se mettre dans la peau d'un sondeur : leur mission consistait à arrêter des passants pour leur demander de bien vouloir répondre à une série de questions qui, même si l'anonymat était garanti, étaient parfois très personnelles, pour ne pas dire embarrassantes. Pas évident, n'est-ce pas?

L'air de rien, ces expériences leur ont permis de faire de belles trouvailles:

> Pessimisme. Les participants ont systématiquement sous-estimé le nombre de gens qui répondraient favorablement à leur demande. Et ce, de manière spectaculaire : leur estimation était, en général, inférieure de 50% à la réalité. Autrement dit, ils se faisaient dire «oui» nettement plus souvent que ce qu'ils imaginaient a priori.

> Pression sociale. Les deux chercheurs américains ont bien entendu tenu à trouver l'explication de cette sous-estimation, et ils ont découvert qu'elle résultait sûrement d'un biais psychologique : nous avons du mal à estimer correctement l'inconfort des autres face à notre demande d'aide parce que nous oublions à ce moment-là combien il est «dur», voire «pénible», pour la personne sollicitée de dire «non». C'est que la pression sociale est forte : dans nos sociétés, il est très mal vu d'être sourd aux appels à l'aide d'autrui; celui qui s'y aventurerait passerait pour quelqu'un de méchant et égoïste.

«Les gens qui demandent de l'aide accordent nettement plus d'attention au coût que peut représenter un «oui» pour la personne sollicitée qu'au coût social que peut représenter un «non» pour elle. Ils sont obnubilés, par exemple, par l'idée que si leur collègue dit «oui», cela va le forcer à consacrer moins de temps à une tâche importante pour lui, et en oublient, du coup, qu'il va, en réalité, avoir du mal à leur dire «non», de peur de passer pour quelqu'un d'égoïste», disent les deux professeurs de comportement organisationnel.

Et d'ajouter : «Autrement dit, la peur du rejet est infondée. Car les gens sont beaucoup plus prompts à nous dire «oui» que ce qu'on imagine, soit parce qu'ils sont naturellement bienveillants, soit parce qu'ils subissent la pression sociale.»

Fascinant, vous ne trouvez pas? Moi, ça m'a renversé quand j'ai lu ça. Car c'est, au fond, d'une profonde intelligence.

Maintenant, que retenir de tout ça? Ceci, à mon avis:

> Demandez et vous serez exaucé. La meilleure façon de demander de l'aide est fort simple : il suffit de demander pour être exaucé (ou presque, car il y a toujours des exceptions qui confirment la règle). Pourquoi? Parce que les autres sont non seulement d'une nature bienveillante, mais aussi peureux à l'idée de passer pour quelqu'un d'antipathique.

En passant, le poète britannique Charles Churchill a dit dans L'Adieu : «L'orgueilleux aimera mieux se perdre que de demander son chemin».

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À propos de ce blogue

EN TÊTE est le blogue management d'Olivier Schmouker. Sa mission : aider chacun à s'épanouir dans son travail. Olivier Schmouker est chroniqueur pour le journal Les affaires, conférencier et auteur du bestseller «Le Cheval et l'Äne au bureau» (Éd. Transcontinental), qui montre comment combiner plaisir et performance au travail. Il a été le rédacteur en chef du magazine Premium, la référence au management au Québec.

Olivier Schmouker

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