Ce défaut va vous permettre de briller comme jamais au travail!

Publié le 14/11/2016 à 06:06, mis à jour le 14/11/2016 à 06:22

Ce défaut va vous permettre de briller comme jamais au travail!

Publié le 14/11/2016 à 06:06, mis à jour le 14/11/2016 à 06:22

Être impatient, c'est savoir prendre des risques calculés vite et bien... Photo: DR

Nous sommes tous pareils : au travail, nous faisons tout notre possible pour mettre en avant nos qualités, et surtout, pour cacher nos défauts. Ce qui paraît logique puisque nos défauts ne peuvent a priori que nous nuire dès lors qu'il nous faut interagir avec autrui.

Mais voilà, et si cette idée que nous avons tous était erronée...

Eh bien, tenez-vous bien parce que je vais pulvériser cette idée reçue sous vos yeux! À l'instant-même. C'est que j'ai mis la main sur une étude carrément géniale, intitulée (Im)patience is a virtue: Time preference and incentives for innovative work. Celle-ci est signée par Evan Sadler, doctorant en économie à Harvard (États-Unis). Regardons ensemble de quoi il s'agit...

Mon nouveau livre : 11 choses que Mark Zuckerberg fait autrement

Le chercheur américain a noté, un beau jour, quelque chose de curieux... De nombreuses études ont montré que les employés qui affichent les meilleures performances au travail - ceux qui non seulement apportent le plus d'idées neuves, mais aussi qui les concrétisent par des projets couronnés de succès - ne courent pas, en général, après une prime, ou toute autre forme de récompense. Non, ce qui les motive à donner leur 110%, ce n'est pas vraiment l'argent. Et pourtant - chose étrange - les employeurs continuent de proposer de tels incitatifs à la performance.

Comment expliquer ce paradoxe? C'est ce que M. Sadler a voulu savoir.

Pour s'en faire une idée, il a concocté un modèle de calcul économétrique, lequel vise à déterminer quelle est la meilleure attitude à avoir pour les différents agents concernés dans un tel cas de figure.

Ainsi, le chercheur américain a considéré qu'il y avait deux agents : d'une part, un chef d'équipe (A), qui veut que son employé brille plus que jamais; d'autre part, un employé (B), qui veut triper dans son travail, c'est-à-dire avoir l'occasion d'exprimer tout son potentiel et, le cas échéant, d'en être récompensé en conséquence. Bref, il a simplifié à l'extrême une situation de départ que nous connaissons tous.

Puis, il a tenu compte de deux variables. La première concernait l'incitatif à la performance proposé à B par A, soit un pourcentage sur les revenus générés par les innovations qu'il parviendrait à mettre au point; un pourcentage pouvant aller de 0% (ce qui correspond à un salaire fixe, sans aucun intéressement aux ventes du nouveau produit ou service) à 100% (ce qui correspond à l'absence de toute rémunération fixe). La seconde, elle, concernait le temps consacré à innover : plus précisément, le modèle de calcul considérait que B se devait de plancher sur une série d'idées neuves dont le potentiel de succès commercial de chacune était variable, tout en étant libre d'abandonner une idée pour passer à la suivante (sachant que le passage d'une idée à l'autre lui faisait perdre du temps, en ce sens que chacun de nous a besoin d'une période d'adaptation pour passer d'une tâche complexe à une autre).

Vous voyez, tout ça correspond pas mal à notre quotidien au travail...

Résultats? Les voici sans tarder :

> Le danger des incitatifs insuffisants. Quand l'incitatif à la performance est trop faible aux yeux de B, ce dernier a la fâcheuse tendance de passer trop vite d'une idée à l'autre. Il lui est dès lors impossible de briller comme jamais dans le cadre de son travail puisqu'il lui arrive d'abandonner des idées pouvant mener à des projets à fort potentiel commercial.

> Le péril des incitatifs excessifs. Quand l'incitatif à la performance est trop fort aux yeux de B, ce dernier a alors la fâcheuse tendance à consacrer trop de temps sur des idées qui ne mènent nul part, en ce sens que leur potentiel commercial est dérisoire. Du coup, il lui est impossible de briller comme jamais au travail.

> La clé du succès? L'impatience! La situation optimale ne réside pas, en vérité, dans le dosage de l'incitatif à la performance, car il est concrètement impossible de le trouver à chaque fois pour chaque projet différent. Le truc, c'est en fait de miser sur l'autre variable, à savoir la façon dont B gère son temps pour mener à bien la série de tâches qu'il lui faut accomplir. Et il se trouve que la meilleure stratégie pour B est de faire preuve... d'impatience!

Oui, vous avez bien lu : être impatient n'est plus ici un défaut, mais bel et bien une qualité. Explication.

Le modèle de calcul a mis au jour le fait que, dans la plupart des cas de figure, mieux vaut que B soit quelqu'un d'impatient, c'est-à-dire pressé d'obtenir un résultat dans tout ce qu'il entreprend, et donc prompt à passer à autre chose si jamais il sent que le projet dans lequel il s'apprête à se lancer va être coûteux en temps. Cela va, certes, l'amener à abandonner une poignée de projets intéressants sur le plan commercial, mais, plus souvent qu'autrement, il mènera à bien des projets particulièrement porteurs, sans y avoir passé plus de temps que nécessaire. Bref, l'impatience permet de réaliser des projets intéressants... à faibles coûts! Et c'est ce point qui fait toute la différence.

«C'est clair, les employeurs ont globalement tout intérêt à privilégier l'embauche d'employés impatients. Car ce sont ceux-là qui lui permettront d'avancer plus vite que leurs concurrents, sans faire exploser leurs budgets pour autant», dit Evan Sadler dans son étude.

Maintenant, vous vous demandez sûrement si cette trouvaille théorique se vérifie sur le terrain. Eh bien, j'ai une surprise pour vous. Une grosse surprise!

Je vais de ce pas partager avec vous un extrait de mon nouveau livre, 11 choses que Mark Zuckerberg fait autrement (officiellement considéré par Amazon comme l'un de ses bestsellers!). Il se trouve, en effet, que Facebook carbure à l'impatience, pour ne pas dire à l'audace; et ce, avec le succès planétaire qu'on lui connaît...

Voici, donc, comment vous y prendre pour devenir impatients au travail :

« Accomplir de grandes choses signifie prendre des risques, dit Mark Zuckerberg. Ce qui peut faire peur et empêche d’ailleurs nombre d’entreprises de connaître la réussite qu’elles mériteraient. C’est pourquoi, dans un monde en pleine mutation, on est irrémédiablement voué à l’échec si l’on ne prend pas de risques, si l’on ne fait pas preuve d’audace. »

Et de clamer, haut et fort : « Le plus grand risque aujourd’hui, c’est de ne pas prendre de risques. Par conséquent, chez Facebook, nous encourageons tout le monde à prendre des décisions audacieuses, quitte à se tromper de temps à autre. »

Il arrive au PDG de Facebook de commettre, lui aussi, des bévues, à l’image du lancement raté des services News Feed et Mini Feed, qui visaient à rendre publiques les activités de chacun sur Facebook (p. ex. une notification indiquant que notre ami Alain est devenu ami avec Fabienne, etc.) et qui ont été massivement rejetés par les utilisateurs en 2006 : « Je dois admettre que nous nous sommes complètement plantés, a-t-il reconnu à l’époque sur sa propre page Facebook. Avec News Feed et de Mini Feed, nous voulions intégrer les informations de votre réseau de contacts à votre propre flux d’informations générales. Mais nous avons tout gâché en communiquant mal nos intentions et en vous donnant l’impression de vous faire perdre le contrôle des informations qui vous concernent. Et je tiens maintenant par-dessus tout à corriger tout ça…

« Ça peut paraître stupide, mais j’aimerais remercier chacun de ceux qui nous ont écrit pour se plaindre et qui ont formé des groupes pour protester. Il va de soi que je ne souhaitais pas déclencher une telle tempête de réclamations, mais le côté positif de tout ça, c’est que ça n’a pas été vain : nous vous avons entendus. »

Ce revers monumental l’a-t-il incité à tempérer ses ardeurs ? Aucunement. Mark Zuckerberg ressent un besoin viscéral de mener à bien des coups audacieux, il est d’ailleurs le premier à le reconnaître : « Je suis quelqu’un d’impatient, c’est indéniable, dit-il. Je veux toujours qu’on innove de plus en plus vite, de mieux en mieux. J’adore quand ça va vite, quand ça accélère, quand c’est risqué. J’ai alors la sensation que nous sommes en train d’accomplir quelque chose de grandiose. »

C’est clair, la prise de risques est maximale chez Facebook. C’est visiblement payant pour la firme de Menlo Park, mais l’est-ce de manière générale ? La plupart d’entre nous avons tendance à répondre par la négative à cette interrogation, ayant en tête plusieurs cuisants revers consécutifs à des décisions périlleuses qu’il nous est déjà arrivé de prendre, au travail comme dans notre vie privée. Néanmoins, peut-être gagnerions-nous à changer d’idée à ce sujet…

Comment savoir ? Fort heureusement, Masao Nagatsuka, professeur d'économie à l'Université Tezukayama à Nara (Japon), s’est penché sur la question, et il en est ressorti une étude passionnante dont les résultats devraient en surprendre plus d’un…

Il s’est intéressé au Temperament and character inventory (TCI), un outil d’analyse psychologique prisé des psychiatres. Selon celui-ci, notre personnalité repose sur sept traits particuliers, à savoir :

> Quatre traits liés à notre tempérament : le goût pour la nouveauté ; la hantise de la douleur ; la dépendance aux récompenses ; et la persévérance.

> Trois traits liés à notre caractère : l’aisance avec soi-même ; la coopération ; et la capacité à la transcendance.

Le but premier du TCI est de permettre la détection des comportements « anormaux » des individus à qui l'on demande de remplir un questionnaire permettant d'évaluer chacun de ces sept traits de personnalité. L’analyse des résultats peut permettre, par exemple, de mettre au jour le fait qu’une personne est sujette à des comportements « brusques et spontanés » au travail, ce qui l’amène souvent à prendre des risques démesurés pouvant nuire à l’ensemble de son équipe.

Curieux de voir ce que pouvait donner l'utilisation du TCI dans une étude d’économie comportementale, le chercheur japonais s'est intéressé à l’attitude des gens lorsqu'ils participent à des enchères. Il a ainsi choisi une sorte d'enchères, celle à un tour sous pli cacheté : chaque enchérisseur remet au commissaire-priseur une offre sous enveloppe, celui-ci examine par la suite toutes les offres faites ; celui qui a fait l'offre la plus élevée l'emporte (c'est là un procédé utilisé traditionnellement lors des appels d'offres pour les marchés publics, ou encore pour l’attribution des droits miniers sur les terrains de l'État).

Puis, M. Nagatsuka a concocté un modèle de calcul économétrique visant à déterminer les différents comportements des gens pendant une telle sorte d'enchères, en fonction de leurs traits de personnalité. Histoire de voir, par exemple, si quelqu'un qui rechigne en général à faire des efforts [faible persévérance] se montre déchaîné, ou pas, dans une enchère à un tour, ou encore si quelqu'un de prompt à se pardonner ses erreurs [forte transcendance] est plus disposé que les autres, ou pas, à faire des offres démesurées.

Ce qui, l’air de rien, lui a permis de faire de belles trouvailles :

> Avantage à ceux qui aiment la nouveauté. Ceux qui ont un goût prononcé pour la nouveauté sont naturellement poussés à remporter l'enchère à laquelle ils participent, de par leur tendance à s'exciter dès qu'il y a un nouveau défi à relever, sans oublier pour autant de calculer soigneusement leur coup. Cette mesure dans l'action leur est on ne peut plus bénéfique : dès lors qu'ils participent à plusieurs enchères d'affilée, ils finissent en général par en ressortir mieux nantis que les autres. Autrement dit, ce sont eux les grands gagnants, car ils savent doser avec justesse leur prise de risques.

> Désavantage à ceux qui redoutent la douleur. Les participants qui craignent d'échouer et d'en pâtir ont tendance à faire des offres largement supérieures à celles des autres, de peur de perdre et de s'en mordre les doigts, si bien qu'ils emportent souvent la mise, mais à un prix démesuré. Du coup, ce sont eux les grands perdants, car ils ne savent pas doser avec justesse leur prise de risques.

> Désavantage aux persévérants. Ceux qui brillent par leur persévérance ont tendance à faire des offres presque toujours insuffisantes pour l'emporter. Cela les empêche d'arriver en tête, enchère après enchère, faute de doser avec justesse leur prise de risques. Autrement dit, ce sont les éternels seconds des compétitions auxquelles ils participent.

> Mince avantage à ceux qui se sentent bien dans leur peau. Les participants qui se sentent à l'aise dans la vie qu'ils mènent présentent un trait de caractère qui joue en leur faveur, à savoir le contrôle de soi. Ils savent maîtriser leurs émotions, et mieux, en tirer profit le moment venu. En conséquence, ils sont les champions pour viser juste lors d'une enchère. Le hic ? C'est qu'à force de tenir compte de la concurrence et de chercher toujours à miser un tout petit peu plus que les autres, il leur arrive fréquemment de débourser nettement plus que ce que l'objet acquis vaut vraiment ; et au final, leurs profits sont aussi minces qu'une peau de chagrin. Bref, leur rigueur et leur constance dans l'atteinte de l'objectif visé finissent par leur jouer des tours.

Surprenant, n'est-ce pas ? Qui d'entre nous aurait dit que celui qui dose le mieux sa prise de risques n’est pas celui qui prise les récompenses, ni même celui qui fait preuve de persévérance, mais bel et bien celui que la nouveauté excite ?

L’idéal est, par conséquent, d’agir comme Mark Zuckerberg : prendre des risques considérables en prenant soin d’imiter l’un de ses traits de personnalité fondamentaux, soit son attrait naturel et immodéré pour la nouveauté. C’est en laissant s’exprimer son insatiable curiosité qu’il parvient à faire le choix à la fois juste et risqué, celui qui lui permet d’aller d’innovation radicale en innovation radicale. Ni plus ni moins.

« Beaucoup de gens croient qu’innover, c’est avoir une idée géniale, dit le PDG de Facebook. En vérité, c’est foncer et essayer plein de choses en même temps, sans craindre une seconde de se casser la figure. » Et de préciser : « C’est se mettre dans une situation telle que l’on n’a plus d’autre choix que d’avancer, encore et toujours, à la frontière des idées neuves et des vieilles idées ».

> Faire preuve d’audace à la Zuckerberg

1. Prendre conscience, si ce n’est déjà fait, de notre goût irrépressible pour la nouveauté. La curiosité nous allume, jour après jour : il suffit qu’il y ait, par exemple, quelque chose de nouveau au bureau (une nouvelle recrue, une nouvelle imprimante, etc.) pour qu’une étincelle jaillisse en nous et nous amène à en savoir davantage à ce sujet, par toutes sortes de moyens.

2. Prendre l’habitude de cultiver notre goût naturel pour la nouveauté. Comment ? En nous exposant le plus souvent possible à l’inconnu. Ça peut être, entre autres, la visite d’un musée, la lecture d’un article de journal déniché dans une section que l’on ne consulte jamais, ou encore la discussion inopinée avec un collègue d’un autre service à qui nous n’avons encore jamais adressé la parole.

3. Sortir à l’occasion de notre zone de confort. Un bon truc consiste à faire exprès de retenir une idée d’autrui, surtout si elle va à l’encontre de notre façon de penser. Pourquoi ? Parce que cela va nous forcer à considérer un autre point de vue, et par suite, nous amener à enrichir notre propre réflexion sur le sujet en question.

4. Nous amuser régulièrement à expérimenter en équipe un maximum d’idées à la fois. Puis, avoir l’humilité de tenir compte des résultats ainsi obtenus : certains d’entre eux nous réserveront nécessairement des surprises de taille, si bien qu’il convient de faire en sorte que de l’inattendu puisse naître l’inespéré.»

Voilà. Vous connaissez à présent le secret de Mark Zuckerberg pour être impatient au travail, et pour ainsi voler de succès en succès. À vous d'en faire bon usage!

En passant, l'écrivain français Paul Claudel a dit dans son Journal : «Le génie est une longue impatience».

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À propos de ce blogue

EN TÊTE est le blogue management d'Olivier Schmouker. Sa mission : aider chacun à s'épanouir dans son travail. Olivier Schmouker est chroniqueur pour le journal Les affaires, conférencier et auteur du bestseller «Le Cheval et l'Äne au bureau» (Éd. Transcontinental), qui montre comment combiner plaisir et performance au travail. Il a été le rédacteur en chef du magazine Premium, la référence au management au Québec.

Olivier Schmouker

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