Relancer l'économie: n'oubliez pas la culture

Publié le 15/04/2014 à 14:38

Relancer l'économie: n'oubliez pas la culture

Publié le 15/04/2014 à 14:38

Photo: Tourisme Ile-d'Orléans

Dès le lendemain de son élection, le Premier ministre du Québec élu a confirmé l’intention de son gouvernement de reconduire le Fonds d’infrastructures Québec. Et même, a-t-il souligné, que son «équipe allait mettre tout en oeuvre pour accélérer les mises en chantier» et d’augmenter d’un milliard et demi de dollars les investissements dans ce domaine. Outre l’anneau de glace à Québec, les routes et les ponts, pourrait-on, monsieur Couillard, injecter une partie de cet argent dans notre patrimoine culturel?

Pendant la campagne électorale, vous avez mis la relance de l’économie à la tête de vos priorités. Vous vous êtes engagé à créer 250 000 emplois au cours des cinq prochaines années, notamment grâce aux investissements en infrastructures, à la relance du Plan nord et à la stratégie maritime. Très bien. Pourriez-vous élargir cette palette au Fonds du patrimoine culturel québécois?

Comme vous l’avez rappelé vous-même à plusieurs reprises, vous avez parcouru en tous sens les régions du Québec. Vous avez pu constater à quelque point notre patrimoine bâti est en danger: églises délaissées, grandes orgues vouées à la décrépitude, couvents et autres établissements religieux négligés, etc. Ce ne sont pas les ruines du Parthénon mais, à notre échelle, ces bâtiments sont notre mémoire collective. Une partie de nous-mêmes.

Voyez comment les gens sont dévastés quand, dans leurs villages, dans leurs quartiers, un incendie ou une catastrophe détruit une partie de leur passé.

Préserver et remettre en état de tels lieux demande de l’argent. Et de l’expertise. L’expertise en la matière existe au Québec. Il n’y a pas que des firmes d’ingénieurs et des entreprises d’asphalte au Québec. La Commission Charbonneau nous a aidés à mieux en connaître certaines, je sais. Existent aussi des architectes, de artisans de très haut niveau en la matière et j’en passe. Il y a un énorme travail à faire de ce côté.

En regard du budget du Fonds d’investissement Québec, celui du Fonds du patrimoine culturel représente des peanuts. Augmenter ce dernier ne mettrait pas à terre les finances du Québec, au contraire. Regardez les petits miracles qu’on peut accomplir sans dépenser des fortunes. Regardez des exemples de ce qui a été réalisé grâce à l’Entente sur le développement culturel de Montréal: la station-service de Mies van der Rohe sur l'île des Sœurs, les maisons rurales Brunet et Richer au parc-nature du Cap-Saint-Jacques, le Stewart Hall à Pointe-Claire. Lisez ces propos de Manon Gauthier, membre du Comité exécutif de la Ville de Montréal et responsable, entre autres, de la culture et du patrimoine: «La culture est pour notre administration un vecteur de développement majeur, autant d'un point de vue social qu'économique.»

En effet, ce n’est pas de pelleter des nuages que d’investir dans le patrimoine bâti et dans la culture: tous les états d’Europe l’ont compris depuis longtemps et ont articulé une grande partie de leurs stratégies de développement touristique autour de ces richesses. Tout récemment encore, le maire de Laval déclarait, lors de l’annonce du déménagement et du changement de nom du Centre Armand-Frappier (qui est un équipement culturel important, notons-le): «Investir dans l’éducation et la culture, c’est la meilleure chose qu’on puisse faire.»

Monsieur Couillard, lors du dévoilement du cadre financier du nouveau gouvernement libéral, vous avez dit que vous comptez réinjecter 15 milliards en dix ans dans le Fonds d’infrastructures Québec. Que vous comptiez aussi mettre sur pied un site Internet qui montrerait, par région, les projet en cours d’exécution, les coûts et le niveau d’avancement, le tout dans un souci de «transparence». Le monde du patrimoine bâti se prêterait fort bien à un tel exercice. Ce n’est pas à vous, je crois, qu’il faudrait, en faire une longue démonstration.

Vous avez aussi dit et je vous cite: «Avoir des infrastructures en bon état, c’est agir pour l’équité intergénérationnelle.» Les infrastructures d’un état, d’une société, ce ne sont pas que des routes et des ponts.

On s’entend là-dessus?