Subventions aux entreprises étrangères: un débat doit avoir lieu

Publié le 21/06/2017 à 10:27, mis à jour le 21/06/2017 à 11:58

Subventions aux entreprises étrangères: un débat doit avoir lieu

Publié le 21/06/2017 à 10:27, mis à jour le 21/06/2017 à 11:58

[Les bureaux d'Ubisoft à Montréal. Photo : Bloomberg]

Seulement pour le secteur des TI, c’est plus de 500 millions de notre argent que le gouvernement donne, oui donne, aux entreprises étrangères comme incitatif afin qu’elles viennent s’installer au Québec.

Pour le seul domaine des jeux vidéo, le gouvernement couvre 37,5% du salaire versé aux employés admissibles. En d’autres mots, au lieu de payer un employé 75 000$, l’entreprise étrangère paye réellement 46 875$ et le gouvernement s’occupe du reste.

C’est Eric Boyko, cofondateur de Stingray qui a remis ce sujet sur la table la semaine dernière. Entrepreneur passionné, il s’est positionné très clairement contre les subventions aux entreprises étrangères, militant même pour leur abolition immédiate.

Sa sortie m’a ouvert les yeux sur cette pratique controversée et m’a fait réfléchir sur le besoin ou non d’être aussi généreux avec les entreprises étrangères.

Au premier regard, cette pratique est une manière d’attirer des entreprises convoitées dans une ville afin de créer des emplois de qualité. Ce faisant, les entreprises s’engagent à investir sur le long terme dans cette même ville.

La mondialisation jumelée à l’explosion technologique a fait en sorte qu’il n’y a plus de différence entre Barcelone et Montréal ou entre Shanghaï et Melbourne. Plus besoin d’être à Silicon Valley pour réussir en technologie, plus besoin d’être à Hollywood pour tourner un film.

Cette nouvelle réalité fait en sorte que Montréal ne se bat plus seulement avec Toronto et Vancouver, mais aussi avec Seattle, Séoul et Stockholm. L’accroissement de la compétition mène donc les gouvernements à offrir des ponts d’or aux entreprises étrangères.

De plus, le gouvernement freine en quelque sorte la fuite des employés hautement qualifiés. Au lieu de s’expatrier pour travailler dans une grande entreprise étrangère avec d’excellentes conditions, ces employés choisissent de rester ici.

Concurrence déloyale?

Cependant, la question mérite d’être posée. Est-ce de la concurrence déloyale? Pourquoi notre gouvernement aide-t-il une entreprise étrangère aux dépens d’une entreprise locale? Est-ce que le producteur indépendant de jeu vidéo à Québec reçoit de généreuses subventions de la part du gouvernement français ou espagnol?

Ce n’est pas qu’une réalité montréalaise. Même les villes les plus tendance, les plus iconiques, font tout en leur pouvoir pour attirer les entreprises chez elles. Congé de taxe, subventions salariales, prêts sans intérêt, toutes les tactiques sont bonnes.

Ce qui est triste, c’est que ces subventions ne sont qu’accessibles qu’aux entreprises qui n’en ont pas vraiment besoin. Saviez-vous qu’Ubisoft a généré un chiffre d’affaires dépassant les 2 milliards de dollars et dégagé un bénéfice net de plus de 150 millions en 2016?

Ne serions-nous pas plus gagnant d’offrir ces subventions aux entreprises québécoises voulant exporter, engager, agrandir?

Reste qu’il faut rendre à César ce qui appartient à César.

Diriger une grande entreprise est un jeu politique. À force de négociations, le dirigeant essaie d’obtenir le plus de concessions possible. Dans le fond, tant mieux pour les dirigeants de ces entreprises prospères, qui réussissent à obtenir de la part de différents gouvernements des avantages incroyables.

Pour ma part, je suis partagé. Bien que je comprenne les gouvernements qui offrent ce genre d’avantages, je suis plus ambivalent sur les arguments qu'avancent les grandes entreprises pour les percevoir.

Une chose est certaine, comme j’aime bien bâtir des ponts et suis convaincue que les meilleurs deals sont ceux où tout le monde est gagnant, je suis certains que nous pourrions, sans annuler unilatéralement ces subventions, repenser notre manière de faire afin d’aider aussi ceux qui en ont vraiment besoin.

À propos de ce blogue

Je me suis lancé en affaires quelques jours après avoir gradué de l’Université de Montréal en science politique. Un peu par hasard, beaucoup par folie, je suis devenu entrepreneur sans trop savoir ce qui m’attendait. Bien que ma première expérience en affaires fut catastrophique, je suis tombé en amour avec l’entrepreneuriat. Aujourd’hui, je suis à la tête d’un des plus grand producteurs de spiritueux et prêt-à-boire en Amérique du Nord et ce ne sont pas les projets qui manquent! Depuis novembre 2015, je partage chaque semaine ici mes idées, mes opinions et ma vision sur le monde des affaires et les sujets de société qui m’interpellent. Bienvenu dans mon monde!

Nicolas Duvernois

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