Et si Couche-Tard était le prochain Amazon?

Publié le 26/01/2021 à 12:37

Et si Couche-Tard était le prochain Amazon?

Publié le 26/01/2021 à 12:37

Une épicerie Carrefour

Couche-Tard n'a pas rompu les liens avec Carrefour. (Photo: 123RF)

BLOGUE INVITÉ. L’annonce a fait l’effet d’une bombe atomique dans le monde des affaires! Couche-Tard, le roi des dépanneurs, négociait afin de faire l’acquisition de Carrefour, le géant français des épiceries! En apprenant la nouvelle, j’étais vraiment excité du potentiel de cette transaction, mais surtout de la brillante stratégie derrière celle-ci! 

En tant qu’entrepreneur de mère saguenéenne et de père bourguignon, je suis extrêmement intéressé et fier de la possibilité de voir deux fleurons, québécois et français, possiblement s’associer et bâtir un géant mondial.

Pour tout vous dire, bien que je ne connaisse absolument en rien les objectifs de cette alliance voulue des deux parties, je dois dire qu’elle est, selon moi, totalement logique et nécessaire. Bien que je ne sois qu’un spectateur amateur dans toute cette saga, j’adore réfléchir sur les raisons du pourquoi!

Voici donc pourquoi je crois que Couche-Tard finira ultimement par acquérir Carrefour et deviendra ainsi un des rares joueurs qui pourra espérer se battre à armes égales contre Amazon. 

Allons directement au but. Tout a commencé il y a trois ans lorsque Amazon a avalé la chaîne d’épiceries Whole Foods. Beaucoup se demandaient bien la raison derrière cette acquisition qui détonnait avec l’idée que la majorité se fait sur le modèle d’affaires d’Amazon. 

Mastodonte de la vente en ligne, la réelle valeur de l’entreprise fondée par Jeff Bezos n’est pourtant pas la vente en tant que telle, mais plutôt la logistique et le transport derrière celle-ci. Il n’y a pas vraiment d’avantage compétitif à vendre de tout et n’importe quoi en ligne comme mille et un autres sites web, cependant, de préparer et de livrer des millions de commandes à travers la planète en moins de 24 heures s’avère un «game changer» absolument incroyable.

Tout comme Uber, pour ne citer qu’elle, ces deux entreprises ont un point en commun: elles vendent du temps.

Oui, vous avez bien lu, la force derrière leur modèle est le fait qu’elles offrent ce qui est le plus précieux au monde, le temps. Qu’elles transportent ensuite une personne, ou vendent des piles, des bavoirs pour bébés ou des stylos, leur offre produit est secondaire à leur véritable raison d’être : faciliter la vie du client en simplifiant au maximum les «frictions» du quotidien et en s’assurant de livrer le plus rapidement possible le client, l’objet ou le moment!

Uber offre avant tout une application technologique permettant au client, en moins de 10 secondes, de commander et de payer un «taxi». Avec une flotte de milliers de véhicules, l’attente est par conséquent très courte, le trajet de votre destination est déjà inscrit dans le GPS du chauffeur et vous voilà déjà arrivé à destination, avec en prime, l’option de noter votre expérience! Certes Uber transporte, mais elle donne surtout au client une facilité d’utilisation et un gain en temps considérable. 

Pour revenir à Whole Foods, il faudrait être fou de croire qu’Amazon ne va pas chercher à dupliquer son modèle d’affaires afin de bouleverser, après le commerce de détail, l’univers de l’épicerie en offrant sous peu, la livraison de celle-ci le lendemain ou même dans la journée.

Après tout, le seul obstacle entre livrer des boîtes de mouchoirs ou des aliments est l’importance et le respect de la chaîne de froid, qui a déjà majoritairement été élucidée par les entreprises de livraisons de boîtes repas telle Cook It.

Plutôt que de bâtir des entrepôts et un inventaire de produits aux quatre coins du pays, Amazon a plutôt choisi d’acheter un joueur important de l’industrie ayant déjà toute l’infrastructure et l’offre produit en place!

Quant à Couche-Tard, la croissance dont les dirigeants nous ont habitués au fil des années doit inévitablement passer par l’analyse de nouveaux modèles d’affaires. Déjà parmi les leaders mondiaux dans les dépanneurs et les stations-service, les options ne pleuvent pas. Pour croître, ils doivent acheter ou ouvrir de nouveaux dépanneurs et/ ou station-service où développer une nouvelle offre. Réalistement, avec le peu d’offre intéressante sur le marché concernant les chaînes de dépanneurs ainsi que le risque de cannibalisation et avec la réputation et le futur de l’essence de plus en plus compromis, l’option d’acheter Carrefour devient super intéressante et logique! 

Plus grand employeur privé de France, Carrefour possède plus de 5 000 magasins sur plusieurs continents ainsi que de différents styles allant de l’immense supermarché au petit marché du coin. Pour Couche-Tard, cette transaction leur permettrait de se positionner vis-à-vis un Amazon qui investirait massivement dans la livraison de l’épicerie.

Si transaction il y a, le nouveau Couche-Tard serait l’une des plus importantes entreprises au monde avec près de 500 000 employés, plus de 20 000 adresses dans une trentaine de pays et des revenus annuels de 180 milliards, comparativement aux 350 milliards d’Amazon.

Ceci étant dit, bien que le Gouvernement français s’oppose à l’idée de cette union, je reste convaincu de la logique, du sens stratégique et du bienfait de celle-ci pour l’un côté comme pour l’autre.

La mondialisation et la «technolisation» de notre quotidien fait en sorte d’ébranler des modèles d’affaires centenaires et bien entendu, comme dans tout changement de cette importance, il y a plusieurs victimes directes ou collatérales de cette évolution. En ayant quelques immenses acteurs dominants mondialement, la compétition devient presque impossible et le terrain de jeux, pour les millions d’autres acteurs, devient de plus en plus petit.

Je comprends la France d’être aussi protectrice envers l’un de ses fleurons, mais je crois plutôt que c’est en créant des alliances comme celle-ci que nous pouvons avoir une chance, à Québec ou à Paris, de ne pas américaniser le monde des affaires au grand complet et de permettre à d’autres entrepreneurs et d’autres entreprises, provenant des quatre coins du monde, de créer de la richesse et de bâtir des empires. 

À propos de ce blogue

Je me suis lancé en affaires quelques jours après avoir gradué de l’Université de Montréal en science politique. Un peu par hasard, beaucoup par folie, je suis devenu entrepreneur sans trop savoir ce qui m’attendait. Bien que ma première expérience en affaires fut catastrophique, je suis tombé en amour avec l’entrepreneuriat. Aujourd’hui, je suis à la tête d’un des plus grand producteurs de spiritueux et prêt-à-boire en Amérique du Nord et ce ne sont pas les projets qui manquent! Depuis novembre 2015, je partage chaque semaine ici mes idées, mes opinions et ma vision sur le monde des affaires et les sujets de société qui m’interpellent. Bienvenu dans mon monde!

Nicolas Duvernois

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