Portrait-robot de l'employé de demain


Édition du 20 Septembre 2023

Portrait-robot de l'employé de demain


Édition du 20 Septembre 2023

L’employé de demain incarne et porte les batailles des générations précédentes. (Photo: 123RF)

EXPERTE INVITÉE. Rentrée 2023. La «grande démission» et la guerre des talents qui faisaient rage en 2022 sont moins violentes, quoique toujours présentes. L’inflation, l’incertitude économique et géopolitique ainsi que la hausse des taux d’intérêt refroidissent les ardeurs des employés quand l’occasion de quitter leur entreprise se présente. Entre le panier d’épicerie qui coûte plus cher et les paiements hypothécaires qui gonflent, la décision de quitter son employeur devient moins impulsive, car elle est plus lourde de conséquences.

Il semble que 71 % des employés repensent leur cheminement de carrière à la suite de ce qu’ils ont vécu durant et après la pandémie de COVID-19. Les résultats des études Lumapps (« Employee Retention Strategies for the Digital Workplace » et « The New Era of Employee Recruiting ») indiquent que les employeurs ont désormais une occasion de mieux retenir leurs talents, mais à certaines conditions. En effet, 59 % des répondants mentionnent qu’ils préféreraient rester, mais avec les « bonnes conditions », et 73 % affirment qu’ils aiment leur emploi.

Selon l’étude Gartner sur les neuf tendances au travail, l’employé d’aujourd’hui et de demain est:

• indépendant. Il recherche de la stabilité et veut avoir le choix « sur quoi, avec qui, dans quel objectif et avec quelle intensité » il va travailler. Il veut être autonome dans son travail et en contrôle de son environnement.

• déterminé. Il veut être entendu et compris. Il sait que l’entreprise ne peut pas tout lui donner, mais il veut de la transparence et de l’authenticité, c’est-à-dire tout le contraire de la langue de bois. Il s’attend à ce que les priorités soient clarifiées et la pression allégée pour qu’il puisse se concentrer sur ce qui doit être livré. La génération Z en particulier se sent mal préparée pour faire face à une pression accrue et à l’insécurité financière. Le bien-être au travail et la santé mentale sont au cœur de ses préoccupations et elle s’attend à ce qu’il en soit de même de la part de l’entreprise.

• explorateur. Il aspire à une carrière atypique et à un job réinventé. Il est prêt à sortir de sa zone de confort et des chemins de carrière traditionnels : 56 % des candidats répondants indiquent qu’ils sont prêts à postuler à des emplois en dehors de leur expertise et ils s’attendent à être considérés.

• conscient de ses limites. Il veut plus d’humanité, au-delà des mots et des programmes : 82 % des employés répondants disent qu’il est essentiel que les entreprises les considèrent comme des individus plutôt que comme de simples employés. Par exemple, l’employeur devrait leur offrir du repos de manière proactive pour les aider à maintenir leur résilience émotionnelle et leur performance, plutôt que de proposer du repos comme solution de récupération après que les deux se soient effondrés. Ils veulent des formations pour passer au travers des défis et des situations, sans jugement ni conséquences. L’accès à des conseillers, des psychologues ou des coachs qui leur offriront du soutien pour gérer les périodes de crise ou les conversations difficiles est un must.

• socialement responsable. Il est défenseur de l’environnement, de l’équité, de la diversité et de l’inclusion (EDI), tout en étant prenant conscience des limites qui y sont liées (42 % des employés pensent que les programmes EDI divisent plus qu’ils ne rassemblent). Le candidat de demain s’attend à ce que son organisation ait un plan d’action « étapiste » et réaliste plutôt que de chercher à « cocher toutes les cases » des meilleures pratiques. Ce n’est pas parce que l’entreprise a des politiques, des programmes et des formations que tous y adhèrent. Ce qui prime pour l’employé de demain, c’est que l’entreprise admette les limites de l’EDI sans baisser les bras et qu’elle aille chercher l’engagement de tout le monde, plutôt que de se concentrer sur son image externe pour se faire valoir.

 

L’automne est la dernière ligne droite avant de passer à l’année suivante. Est-ce que les candidats et les employés de 2024 auront vraiment de nouvelles attentes ou continueront-ils finalement à exprimer ce à quoi ils ont toujours aspiré… mais plus intensément ? Plus j’y pense et plus je me dis que les employés ont toujours souhaité être traités et considérés de la même façon depuis des générations. Avant, ils restaient silencieux ou plus discrets. Aujourd’hui, ils s’expriment haut et fort, ils s’unissent sur les multiples plateformes à leur disposition pour faire valoir leurs besoins et leur identité et ils refusent de se faire traiter en simples soldats ou exécutants.

Il n’y a plus d’échappatoire pour les entreprises. Elles n’ont pas le choix de les écouter et de leur offrir des solutions. L’employé de demain incarne et porte les batailles des générations précédentes, leurs gains comme leurs pertes, mais il exprime surtout la furieuse envie de vivre sa vie professionnelle et personnelle pleinement et intensément à l’abri de la dictature de l’entreprise.

 

 

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À propos de ce blogue

Nathalie Francisci est présidente exécutive pour le Québec chez Gallagher. Elle oeuvre en recrutement de cadres depuis 25 ans. Entrepreneure, experte en gestion des talents, elle est reconnue comme l’une des références au Québec. Femme d’affaires engagée, elle siège sur plusieurs CA. Conférencière et chroniqueuse, ses interventions font la différence par l’énergie et style direct qui s’en dégagent. Passionnée par nature, elle n’oublie jamais qu’elle travaille avec des gens, pour des gens. Elle partagera avec vous ses réflexions et expériences sur l’univers du recrutement et de la gestion des talents pour faire réfléchir autant les individus que les organisations. Nathalie Francisci a été Finaliste au Concours des Mercuriades en 2001, elle a reçu le Prix «Nouvelle Entrepreneure du Québec» en 2001 et «Entrepreneure – petite entreprise» en 2007 décerné par le RFAQ et elle a remporté le Prix Arista en 2008. Elle porte les titres de CRHA et de IAS.A.

Nathalie Francisci
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