La filière minière au temps de la COVID-19

Publié le 29/07/2020 à 08:10

La filière minière au temps de la COVID-19

Publié le 29/07/2020 à 08:10

(Photo: 123RF)

Tranquillement, l’économie reprend son rythme et se dévoile sous un nouveau jour. Pour certaines industries, dont le secteur minier, la relance s’est entreprise, il y a déjà quelques semaines, avec nombre d’enjeux opérationnels qui plongent la filière minière dans une toute nouvelle réalité.

Opérer… en santé

Les mines ont rapidement compris le message. Bien conscientes du risque de contagion que leurs opérations peuvent représenter, les entreprises minières ont rapidement pris action. Le jour où le gouvernement décidait de ne plus restreindre au minimum l’exploitation minière, les joueurs de l’industrie s’engageaient à reprendre leurs activités dans le respect des travailleurs, de leur santé et de leur sécurité, sans oublier les familles et les populations environnantes.

L’enjeu n’est pas banal puisque plusieurs mines embauchent des travailleurs provenant de l’extérieur de la région immédiate du site. Certains viennent même de pays étrangers. La pratique est connue sous les vocables fly in/fly out ou drive in/drive out.

Cette réalité conditionne d’autres enjeux. Par exemple, ces mêmes travailleurs provenant de l’extérieur sont hébergés dans des installations comportant des aires communes — aires de repas, aires de repos, installations sanitaires et partage de chambre.

De belles conditions pour la transmission d’un virus!

Les exploitations minières québécoises et canadiennes ont évité certains des effets les plus graves de la pandémie, mais ces dernières restent confrontées à des défis qui les obligent à s’adapter à vitesse grand V. Les entreprises ont travaillé d’arrache-pied pour conformer leurs opérations aux exigences de distanciation physique.

Les sièges sociaux des minières sont passés au travail à distance, et de nombreuses entreprises ont, au moins temporairement, suspendu certaines activités non essentielles à très court terme comme l’exploration.

Ils se préparent également à l’incertitude continue, que ce soit à cause d’une deuxième vague attendue de la pandémie de COVID-19, de difficultés potentielles dans la chaîne d’approvisionnement ou des restrictions liées aux déplacements entre régions ou territoires.

Alors que les sociétés minières entrent dans la prochaine étape de leur réponse à la pandémie, comment peuvent-elles renforcer leur résilience et élaborer des stratégies pour la croissance future?

Réinventer les façons de faire

Quant aux mesures à l’intérieur des sites, elles s’avèrent complexes et exigeantes. La mine doit d’abord intensifier le nettoyage et la désinfection des équipements et des moyens de transport. Réorganiser le travail afin de limiter les contacts entre les travailleurs. Prévoir des parcours assurant la distanciation physique de deux mètres. Établir des procédures en prévision de l’apparition de symptômes chez un employé, un sous-traitant ou un fournisseur.

Les exploitations minières se situent en régions éloignées et souvent isolées. Les capacités de ces milieux à effectuer des tests, à prendre en charge les cas et à procéder à des évacuations, au besoin, peuvent s’ajouter aux enjeux sensibles.

Figures dominantes du travail minier souterrain, les cages d’ascenseurs font maintenant l’objet de minutieuses chorégraphies imaginées pour réduire au strict minimum les contacts entre individus.

Diminution du nombre de travailleurs par voyage, cloisons de plastique pour isoler les passagers, consignes de positionnement évitant les face à face, les stratégies abondent pour éviter le pire… en attendant le remède ou le fameux vaccin.

La COVID-19 a aussi permis à plusieurs employeurs miniers de faire preuve de sens communautaire et de multiplier les initiatives pour appuyer les organismes ou les travailleurs de la santé de leur milieu. Parmi celles-ci, notons des contributions financières, le don d’équipements de protection, de désinfectants et même de matériel médical.

Garder la tête hors de l’eau

Toutes les mesures rendues nécessaires par la COVID-19 —l’assainissement des équipements, les activités de gestion des sites, les procédures des équipes de travail, la gestion des campements, les façons de se transporter, les dispositions pour soigner et évacuer au besoin— auront des effets certains sur la rentabilité des opérations et la santé financière des mines dans les mois à venir.

Les défis sont nombreux.

Il faudra faire preuve de patience, de résilience, d’innovation et de créativité. Il faudra solliciter davantage les technologies numériques. Refaire les calculs de rentabilité. Revoir les planifications. S’assurer de liquidités suffisantes. Poursuivre la recherche de financement en contactant les investisseurs traditionnels et en développant des stratégies pour en intéresser de nouveaux.

L’histoire ne nous renseigne guère sur la façon de combattre le virus, bien que plusieurs sociétés minières opérant en Afrique avaient déjà dû opérer en combattant l’Ebola. Mais elle nous indique clairement que les crises majeures peuvent agir comme accélérateurs de changement et d’innovation, car elles marquent des périodes de grande rupture d’équilibre. À ce titre, elles sont porteuses d’opportunités souvent étonnantes.

Il faut donc demeurer à l’affût des occasions qui se profileront en sortie de crise.

 

 

À propos de ce blogue

Le regard d'un spécialiste du secteur minier au Québec auprès de l’industrie, des gouvernements et du grand public. Maxime Guilbault est associé au sein du groupe de Certification chez PwC Canada et leader du groupe Mines et Métaux pour le Québec. Au cours des 15 dernières années, il s’est spécialisé dans la prestation de services aux clients du secteur minier et il travaille avec des sociétés à différents stades, allant de l’exploration à l’exploitation. Plus récemment, Maxime s'est concentré sur les entreprises qui cherchent activement à développer de grands projets d'investissement. En 2017, Maxime a supervisé la rédaction de la plus importante publication mondiale de PwC sur l’industrie minière «Mine 2017. Stop. Think…Act».

Maxime Guilbault
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