United Airlines aurait pu augmenter la compensation

Publié le 12/04/2017 à 11:32

United Airlines aurait pu augmenter la compensation

Publié le 12/04/2017 à 11:32

Un accident hors du commun s’est produit dimanche dernier, à l’intérieur d’un avion de la United Airlines (N.Y., UAL). De façon inattendue, la société aérienne devait déployer à tout prix quatre employés de Chicago à Louisville dans le Kentucky afin de fournir le personnel nécessaire à un autre vol. Comme le vol 3411 était déjà complet, on créa une situation de surréservation, dans laquelle on devait sortir quatre voyageurs de l’appareil.

La compagnie procède normalement à une offre monétaire accompagnée d’accommodations, afin de trouver des volontaires. Au départ, l’incitatif s’élevait à 400$, pour ensuite monter à 800$, avec une offre finale de 1000$. Même à ce prix, aucun passager ne se portait volontaire. On a donc procédé à une sélection aléatoire. Trois des quatre voyageurs ont cédé leur siège sans discuter. Il en fut tout autrement avec le quatrième. Comme on peut le voir dans la vidéo, il a été nécessaire de faire appel à la police pour tirer de force l’individu hors de son siège, et ensuite «littéralement» le traîner dans l’allée jusqu’à la sortie.

La vidéo s’est vite répandue dans les réseaux sociaux, provoquant la consternation chez le public. Le chef de la direction de United Airlines, Oscar Muñoz, est intervenu pour défendre publiquement les décisions prises par ses employés, pour ensuite déclarer qu’il était désolé de la façon dont a été traité le voyageur expulsé. Mentionnons que la victime avait un passé troublant, comme on peut le constater ici.

Tout d’abord, soulignons que la surréservation constitue une pratique très courante, et elle permet de maximiser les profits des compagnies aériennes. Cette vidéo explique bien l’utilisation de cette stratégie. Elle comporte un calcul de probabilités dans le taux de présence des voyageurs. Le pire scénario pour la compagnie aérienne survient lorsque tous les voyageurs se présentent à temps pour leur vol, puisqu’elle doit les compenser et les accommoder.

L’incident de dimanche dernier n’avait peut-être jamais été anticipé dans les scénarios possibles. À n’en point douter, aucune compagnie aérienne ne voudra ou ne pourra recourir à la force dans le futur, de peur de créer un autre scandale médiatique. Que faire lorsqu’un voyageur sélectionné aléatoirement refuse de quitter l’avion? Devrait-on interdire la pratique de la surréservation, qui, doit-on le mentionner, s’avère tout à fait légale en ce moment?

Le gouvernement canadien s'est engagé ce lundi à protéger les droits des passagers aériens pour s'assurer qu'un incident comme celui survenu sur le vol de la compagnie américaine n'arrive «jamais» au Canada.

Certes, la surréservation pourrait être bannie, mais on ne peut avoir le beurre et l’argent du beurre. Des profits plus élevés se traduisent par des prix moins élevés. Le fait de maximiser le taux d’occupation des appareils permet ultimement à la société aérienne de charger moins cher pour ses billets, afin de contrer la compétition. Personnellement, nous ne serions pas contre des prix plus élevés, mais qu’en est-il du grand public?

Supposons que le public permet toujours la surréservation, nous pensons qu’il existe au moins une solution satisfaisante pour tous. Elle s’avère très simple: la société aurait dû augmenter l’incitatif davantage. Personne ne souhaitait quitter le vol pour 1000$? Aurait-ce été le cas à 1500$ ou à 2000$?

Comme la plupart des gens possèdent maintenant un téléphone intelligent, une application pourrait être créée permettant de trouver des volontaires à l’aide d’un système d’enchères, où le prix de la compensation grimpe graduellement jusqu’à ce que le nombre de volontaires désiré soit atteint.

Dans certains cas, le prix de la compensation dépasserait les montants anticipés par la société aérienne. Toutefois, elle ajusterait ses calculs en conséquence, comme elle le fait déjà pour anticiper le nombre de sièges vides par vol. Si elle devait malencontreusement débourser 5000$ par passager sur plusieurs de ses vols, elle aurait systématiquement moins recours à la surréservation. Notons que la capitalisation boursière de United Airlines a fondu d'un milliard de dollars depuis la crise de communication.

Malgré la possibilité de cette éventualité, tout le monde y gagnerait: les voyageurs accepteraient volontairement (avec joie dans certains cas!), et la société aérienne pourrait continuer de tenter de maximiser ses profits. Telles les actions à la Bourse, on laisserait le prix de l’incitatif être dicté par l’offre et la demande. Comme le disait Charlie Munger: «Malgré ma grande compréhension de ce sujet, j’ai toute ma vie sous-estimé la puissance des incitatifs».

P.S.: Un lecteur nous a signalé que des plafonds sont prévus par la loi pour les compensations. Selon un article récent, il serait établi à 1350$ en argent comptant par billet. Par conséquent, nous pensons que la loi devrait être révisée si l'on veut prévenir ce genre de problème dans le futur. 

 

Au sujet des auteurs du blogue: Patrick Thénière et Rémy Morel sont analystes financiers et propriétaires de Barrage Capital, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com


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