Comment être chanceux à la Bourse?

Publié le 21/01/2017 à 18:16

Comment être chanceux à la Bourse?

Publié le 21/01/2017 à 18:16

La chance peut-elle expliquer le succès à long terme d’un investisseur en Bourse? Voilà une question très importante, car nous répondrions à une telle question par l’affirmative. Il y a 33 ans de cela, Warren Buffett donnait une conférence sur le sujet, à l’occasion du 50e anniversaire du célèbre livre «Security Analysis», écrit par Benjamin Graham et David L. Dodd. Son argumentation visait à contredire les gens qui estiment que le fait que certains investisseurs battent les marchés pendant longtemps ne constitue que le fruit du hasard.

Il donna l’exemple d’un tirage à pile ou face avec un sou. Supposons que 225 millions d’américains (environ la population de l’époque) lançaient un sou dans les airs. Au bout de 10 lancers, on devrait se retrouver avec environ 220 000 personnes ayant correctement prédit le bon côté à chaque fois. Si l’on poursuit l’exercice avec 10 autres lancers, on aboutirait avec environ 215 personnes.

Après avoir connu autant de succès, certains de ces 215 gagnants se vanteraient d’un tel exploit, et pourraient même être tentés de s’adonner à l’écriture d’un livre pour expliquer comment ils y sont parvenus. Or, une personne ayant le moindrement de connaissances en statistiques argumenterait à l’effet qu’on aurait pu obtenir des résultats similaires si les dés étaient lancés par des orangs-outans.

Toutefois, si un observateur découvrait que parmi les 215 orangs-outans gagnants, 40 provenaient d’un seul zoo se trouvant à Omaha, sa curiosité serait piquée. Il chercherait à s’informer sur ce qu’ils ont de différent des autres pour expliquer cette anomalie statistique.

La plupart des investisseurs appliquant les principes de Graham et Buffett connaissent un certain degré de succès. Parfois, des erreurs importantes peuvent être commises, mais découleront davantage des mauvaises décisions de l’investisseur que du manque d’efficacité de l’application de l’investissement valeur. Par exemple, Terry Lundgren, chef de la direction du détaillant de vêtements Macy’s (N.Y., M), déclara l’an passé qu’il y avait trop d’espace de ventes au détail aux États-Unis, comparativement à d’autres pays. Fermer des magasins constituait une stratégie nécessaire pour restaurer éventuellement l’équilibre entre l’offre et la demande. Dans un tel contexte, peut-on facilement établir la valeur de l’immobilier d'une grande chaîne de magasins? Combien vaut un emplacement dont personne ne veut? Nous sommes donc demeurés sceptiques sur l’apparence de marge sécurité présente dans l’immobilier de certains détaillants, dont les titres se transigent à des prix attrayants.

Walter Schloss, un des disciples de Benjamin Graham à l’époque où ce dernier enseignait, avait l’habitude de détenir une centaine de titres en portefeuille. Au cours de sa carrière, il a acheté et vendu des milliers de titres . De 1956 à 1984, soit 28 ans, ses rendements affichés s’élèvent à 21,3% par an, contre 8,1% pour le S&P. On peut être chanceux sur quelques titres, mais pas de façon constante sur des milliers de titres.

M. Schloss s’efforçait de sélectionner des titres pour son portefeuille dont les compagnies sous-jacentes détenaient pas ou peu de dettes. Il désirait également que l’entreprise affiche un bon historique sur les 10 années précédentes, ainsi qu’une forte participation des initiés dans le titre. Évidemment, le critère le plus important constituait un faible ratio d’évaluation, notamment la valeur marchande par rapport à la valeur au livre.

M. Schloss ne possédait pas de titres qu’il comptait détenir indéfiniment. Il visionnait son portefeuille comme étant un magasin qui acquiert des biens, et qui les revend à profit, à l’intérieur de quatre ans si possible.

Finalement, il avait l’habitude de dire : «Si une société vaut un dollar et que je peux l’acheter pour 40 cents, quelque chose de bon pourrait m’arriver». Autrement dit, il mettait les chances de son côté. Voilà une extraordinaire façon d’attirer la chance!

En ce qui nous concerne, nous nous efforçons de toujours mettre nous aussi, les chances de notre côté. Nous ne pouvons pas prédire ce que nous ferons à court terme, ni garantir un quelconque résultat en appliquant les principes de Graham et de Buffett. Nous pensons cependant qu’en restant disciplinés, la «chance» devrait continuer à nous favoriser dans le futur.

 

Au sujet des auteurs du blogue: Patrick Thénière et Rémy Morel sont analystes financiers et propriétaires de Barrage Capital, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com

À propos de ce blogue

Patrick Thénière et Rémy Morel sont associés et gestionnaires de portefeuille chez Barrage Capital, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com

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