La santé psychologique, l'envers de l'entrepreneuriat

Publié le 13/04/2023 à 13:02

La santé psychologique, l'envers de l'entrepreneuriat

Publié le 13/04/2023 à 13:02

«75% des propriétaires de PME veulent céder leur entreprise dans les 10 prochaines années et 22% d’entre eux invoquent l’épuisement comme raison principale de leur choix.» (Photo: Stormseeker pour Unsplash)

Signataires:

Serge Beauchemin, associé directeur d’AQC Capital

Pierre Graff, PDG du Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec

Isabelle Le Ber, Présidente-directrice générale de l’École d’Entrepreneurship de Beauce

Nathaly Riverin, initiatrice de Persévérance entrepreneuriale

 

Parler de la santé psychologique chez les entrepreneurs est encore un tabou. Or, ça ne devrait plus l’être. Témoins privilégiés de l’épuisement psychologique et physique de nombreux entrepreneurs, il est temps d’enclencher le changement dans la culture entrepreneuriale québécoise et de faire davantage connaître les initiatives qui existent pour faire rebondir nos entrepreneurs. Surtout dans un contexte où le tissu entrepreneurial s’affaiblit au Québec.

● 75% des propriétaires de PME veulent céder leur entreprise dans les 10 prochaines années et 22% d’entre eux invoquent l’épuisement comme raison principale de leur choix, souligne la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante.

● Le bassin d’entrepreneurs est en chute libre… En effet, on constate une diminution moyenne annuelle de 7 200 entrepreneurs entre 2017 et 2021 (MEIE, 2021). La situation en 2022 n’est sûrement pas plus rose avec une croissance des faillites d’entreprises de 27% supérieure à 2021.

 

Lire aussi: Santé mentale des PDG : au fil de la guérison

Un décalage persistant entre la perception d’une personne entrepreneure «surhumaine» et sa difficile réalité

Pierre Graff, PDG du RJCCQ, met en garde contre la glamourisation de l’entrepreneuriat. On perçoit «les personnes entrepreneures comme des personnes fortes, autonomes et inébranlables, à un tel point que l’on peine à les imaginer fatiguées et épuisées.»

Diriger une entreprise est une lourde responsabilité. Pensons par exemple aux emprunts financiers, à la pression de satisfaire les clients, aux multiples délais à respecter, aux difficultés liées au paiement de ses fournisseurs, aux responsabilités de la gestion des employés, sans parler du stress psychologique et des angoisses qui les empêchent trop souvent de trouver le sommeil la nuit. La pénurie de main d’œuvre et les effets du ralentissement économique ont accentué cette situation, qui risque de s’envenimer si l’on se satisfait du statu quo.

Choisir l’isolement aux dépens de s’ouvrir aux autres

On estime qu’un entrepreneur sur 10 a déjà demandé de l’aide psychologique. L’appel à l’aide arrive souvent trop tard, tant sur le plan de la santé que sur le plan financier. Pourtant, les solutions existent et elles ne sont pas toutes d’ordre psychologique. C’est l’une des raisons d’être de certaines initiatives comme les programmes offerts par l’École d’entrepreneurship de Beauce. Pour Isabelle Le Ber, directrice générale de l’organisation et à la tête du programme Émergence, «nous avons toute une génération qui est prête à prendre la relève et à qui on doit tendre la main. C’est pourquoi nous avons encadré les entrepreneurs en début de parcours qui ne se sentent pas nécessairement prêts ou qui veulent s’outiller».

Serge Beauchemin abonde dans le même sens. «Pouvoir échanger et partager avec d’autres entrepreneurs est une des motivations importantes derrière l’organisme alias entrepreneur lancé il y a quelques années. Il faut briser l’isolement que vivent les entrepreneurs.»

Il faut faire davantage connaître et rayonner les initiatives qui contribuent à faire une différence. L’initiative Persévérance entrepreneuriale offre ainsi de l’accompagnement et de la formation personnalisée. Nathaly Riverin et son équipe veulent mettre l’entrepreneur en difficulté en lien avec un réseau d’experts chevronnés qui lui permettra de rebondir et de persévérer en affaires.

 

Lire aussi: OPINION par Dominic Gagnon - Troubles de santé mentale: les entrepreneurs sont-ils plus à risque?

Susciter de grands changements pour la culture entrepreneuriale québécoise

En 2021, selon l’Indice entrepreneurial québécois, le taux global d’intentions d’entreprendre se situe à 15,1%, en baisse de plus de 5 points de pourcentage depuis 2019. Dans un contexte de reprise économique, on ne peut se priver de ces 5 points de la volonté à entreprendre.

Pour se maintenir et se développer, entrepreneurs et repreneurs ont besoin du soutien de leur communauté. Le Québec se doit de prendre soin des gens d’affaires, des créateurs de richesse, qui tentent, tant bien que mal, d’alimenter une économie prospère. La piste d’action à considérer serait peut-être d’opérer un changement dans la culture entrepreneuriale, dans l’image que l’on se fait de ce qu’est être un entrepreneur et réussir.

Il vaut mieux prévenir que guérir si on veut revigorer ensemble l’économie du Québec.

À propos de ce blogue

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