La main-d'oeuvre québécoise a besoin de nouvelles aptitudes

Offert par Les Affaires


Édition du 20 Juillet 2019

La main-d'oeuvre québécoise a besoin de nouvelles aptitudes

Offert par Les Affaires


Édition du 20 Juillet 2019

Nous devons miser sur nos forces pour combler les lacunes et faciliter le passage des études au marché du travail. (Photo: Element5 Digital pour Unsplash)

COURRIER DES LECTEURS. L'économie québécoise a de quoi susciter l'optimisme. Les taux de chômage n'ont jamais été aussi bas, la confiance des consommateurs est élevée et les dépenses en immobilisations sont à la hausse. Dans l'ensemble, la croissance économique devrait être supérieure à la moyenne nationale cette année. De bonnes nouvelles, comme on les aime !

Or, ces indicateurs positifs actuels ne sont pas garants de l'avenir. En effet, le Québec, comme une bonne partie des États occidentaux, subit une transformation sans précédent alors que nous passons d'une économie fondée sur les emplois à une économie fondée sur les aptitudes, et ce, peu importe le secteur d'activité.

Nous pouvons évidemment en profiter pour assurer notre croissance et notre prospérité, mais nous avons tous la responsabilité de préparer la prochaine génération de travailleurs à la nouvelle réalité du travail.

Une nouvelle économie fondée sur les aptitudes

Le Québec jouit actuellement d'une position avantageuse. Le taux d'emploi des personnes de 20 à 29 ans, supérieur à celui de toutes les autres provinces, est de près de 79 % ! Celui des femmes dépasse la moyenne nationale de plus de 4 % (78,5 % contre 71 %). Ce qui est particulièrement impressionnant.

Ces chiffres imposants dissimulent toutefois une faiblesse : au niveau secondaire, notre taux de diplomation est inférieur à la moyenne nationale. De plus, une étude de RBC indique que les femmes occupent des postes fortement menacés par l'automatisation dans une proportion plus élevée que les hommes.

Ainsi, la nécessité d'un rehaussement des aptitudes est évidente dans les secteurs des technologies de l'information et des sciences de la vie. Bien qu'elle soit moins flagrante dans d'autres domaines, elle est aussi bien réelle dans des secteurs traditionnels comme l'agriculture, le transport et l'exploitation minière. Nous devons donc former assez de travailleurs qualifiés dans ces secteurs pour que la province continue de tirer son épingle du jeu sur la scène mondiale.

Une hausse du nombre d'inscriptions à des programmes de sciences, de technologie, d'ingénierie et de mathématiques constitue une partie de la solution. Cela dit, il ne faut pas négliger - ni sous-estimer - d'autres compétences essentielles : la collaboration, la communication et l'esprit critique.

Au cours de la dernière année, nous nous sommes entretenus avec des étudiants, des travailleurs en début de carrière, des enseignants, des décideurs et des employeurs de tous les secteurs pour mieux comprendre l'incidence de l'automatisation sur le travail et les compétences que devront posséder les jeunes Canadiens dans les années 2020. Ainsi, notre plus récent rapport, Combler les lacunes, souligne la demande croissante en aptitudes humaines complémentaires aux technologies nouvelles et émergentes. Pourtant, nous avons constaté notre échec dans notre tentative d'aider les jeunes à réussir dans la nouvelle économie fondée sur les aptitudes.

Un exemple : bon nombre des qualités et des compétences fondamentales que recherchent les employeurs sont inculquées par les programmes de formation générale.

Au Québec, en moyenne, 44 % des étudiants de niveau postsecondaire ont obtenu un diplôme de formation générale entre 2012 et 2016. C'est de loin le taux le plus élevé au pays. Malheureusement, bon nombre d'entre eux ont indiqué que les aptitudes acquises dans des programmes de formation générale, et notamment d'arts visuels et de la scène, de technologies de la communication et de sciences humaines, sont souvent négligées dans les processus d'embauche, les employeurs mettant davantage l'accent sur les titres de compétences.

De plus, ces aptitudes sont souvent développées pendant des activités parascolaires. Alors que la plupart des établissements d'enseignement postsecondaire offrent un relevé des activités parascolaires - c'est-à-dire un document qui dresse la liste des activités non scolaires qui ont lieu sur le campus -, peu d'étudiants et encore moins d'employeurs savent que ce document existe.

Préparer les jeunes à réussir

Le problème des aptitudes ne manque pas de solutions. L'une d'elles, l'instauration d'une moyenne pondérée cumulative pour les compétences générales dans les dossiers de scolarité, trouve écho tant chez les enseignants que chez les employeurs.

Ces derniers, par ailleurs, ont aussi un rôle à jouer. Par exemple, dans le cadre de notre projet Objectif avenir RBC, nous avons investi 500 millions de dollars pour aider les jeunes à accéder à des emplois enrichissants par l'acquisition d'une expérience de travail pratique, le perfectionnement des aptitudes, le réseautage, et l'accès à du soutien et à des services favorisant le bien-être mental. L'un des programmes permet à des diplômés de formation générale de faire un stage rémunéré d'un an à la Banque. Ils passent six mois en succursale, trois mois auprès d'un organisme philanthropique et trois mois dans un rôle fonctionnel. Et la très grande majorité des participants ont été embauchés moins d'un mois après avoir suivi le programme. Voilà donc un exemple concret de ce qui permet de mettre en place un pipeline de talents pour les entreprises au Québec.

Comme toujours, notre prospérité collective est directement liée à notre capacité à préparer les jeunes à réussir. Je suis d'avis que nous devons miser sur nos forces pour combler les lacunes et faciliter le passage des études au marché du travail.

Que vous soyez dirigeant d'une entreprise, parent, professeur, mentor ou citoyen, ces questions nous interpellent tous. Il en est de notre responsabilité afin de créer un meilleur avenir pour les jeunes au Québec.

Nadine Renaud-Tinker, présidente régionale Direction du Québec, RBC

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