Les Québécois, bons derniers en matière de santé financière!

Publié le 29/11/2019 à 06:06

Les Québécois, bons derniers en matière de santé financière!

Publié le 29/11/2019 à 06:06

Impossible, dès lors, de voir à moyen et long termes... (Photo: Brunel Johnson/Unsplash)

CHRONIQUE. Avoir une bonne santé financière, c’est primordial dans l’existence. Le hic? C’est que le Québec arrive bon dernier en matière de santé financière comparativement aux autres provinces canadiennes!

C’est du moins ce qui ressort de l’étude intitulée Urban Spotlight : Neighbourhood financial health index findings for Canada’s cities et publiée par l’organisme de bienfaisance Prospérité Canada et le Conseil canadien de développement social, à la demande de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM). Regardons ensemble de quoi il retourne…

L’étude s’appuie sur l’Indice de santé financière à l’échelle du quartier (ISFQ), lequel évalue l’état dans lequel les ménages se trouvent sur le plan financier, quartier par quartier. Cet indice tient compte de plusieurs indicateurs : revenus, actifs, endettement, niveau de pauvreté, etc.

Ici, les auteurs de l’étude se sont intéressés à la santé financière des ménages des 35 plus grandes villes du Canada. Voici l’essentiel de ce qui en ressort:

– Calgary et Edmonton en tête. Les Albertaines Calgary et Edmonton figurent aux premières loges du palmarès, loin devant les autres. Leurs indices dépassent en effet respectivement de 3,45 points et de 2,15 points la moyenne des indices des 35 villes considérées.

– En difficulté. Neuf villes sont considérées comme «éprouvant des difficultés», en raison du fait qu’elles ont «des revenus, un patrimoine et un endettement moins élevés que la moyenne» ainsi qu’«un niveau de pauvreté plus élevé que la moyenne». Parmi ces villes-là figurent Québec (–0,84 point en dessous de la moyenne), Montréal (–1,54), Saguenay (–2,08), Sherbrooke (–2,61) et Trois-Rivières (–2,90); soit toutes les villes québécoises retenues dans le cadre de cette étude.

Qu’est-ce qui coule particulièrement les ménages québécois? Un indicateur se distingue à ce sujet : les revenus. Ainsi, les Montréalais touchent des revenus inférieurs de 0,60 point par rapport à la moyenne des revenus des ménages des 35 villes considérées. Autre exemple frappant : à Trois-Rivières, les revenus sont inférieurs de 1,14 point. Ce qui fait de ces deux villes québécoises les moins bien loties en matière de performance des revenus par rapport à la moyenne canadienne établie par l’étude.

– Bonnes dernières. Les quatre villes qui arrivent tout au fond du classement canadien sont : Montréal, Saguenay, Sherbrooke et Trois-Rivières.

«Le rapport Urban Spotlight montre que notre santé financière dépend beaucoup de l'endroit où nous vivons, dit Elizabeth Mulholland, chef de la direction, de Prospérité Canada. Car la santé financière ne se résume pas aux seuls revenus, elle découle également, en grande partie, des actifs et des dettes.»

Cela étant, tout n’est pas noir. «Bien que les revenus et les actifs soient plus difficiles à obtenir dans ces communautés-là, le faible niveau d'endettement rend les ménages plus résilients face à la hausse potentielle des taux d'intérêt», soulignent les auteurs dans leur étude. Un point qui concerne avant tout Trois-Rivières puisque celle-ci figure parmi les trois villes canadiennes qui brillent par le faible ratio d’endettement (dettes/revenus) de leurs ménages, inférieur à 1.

Autrement dit, le jour où les taux d’intérêt se remettront à grimper franchement, la plupart des ménages québécois devraient moins en ressentir les contrecoups que les autres ménages canadiens. Ce qui est tant mieux. Mais voilà, il ne semble pas qu’une telle remontée soit à l’ordre du jour pour la Banque du Canada…

Bref, la santé financière des Québécois est chancelante, pour ne pas dire vacillante. Un signe qu’il est grand temps de leur apporter le soutien dont ils ont grandement besoin à ce sujet. Que ce soit – chers employeurs, chers gouvernements – par une nette appréciation des revenus, ou encore par un véritable allègement des dettes. Car – on s’entend – il n’est jamais bon de figurer parmi les plus mal en point sur le plan financier, surtout en ces temps politiques et socioéconomiques dits VUCA (pour Volatiles, Incertains (Uncertain, en anglais), Complexes & Ambigus).

Coïncidence? Hier justement, l'Institut de la statistique du Québec (ISQ) a dévoilé une étude qui a eu l'effet d'une bombe : il y était montré que les employés de l'État gagnaient aujourd'hui 13,2% de moins que les autres salariés québécois, et accusaient un retard de 6,2% quant à la rémunération globale, laquelle inclut le salaire, le régime de retraite et les avantages sociaux. Des chiffres révélateurs de la santé financière déficiente d'une catégorie importante des Québécois, qui n'ont pas manqué de faire bondir les syndicats...

«Ce retard est tout simplement inacceptable! Il est révélateur des sacrifices imposés, depuis plusieurs années, aux employés des réseaux de l'éducation et de la santé, et des ministères», a aussitôt lancé Sonia Ethier, la présidente de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ).

« On tourne en rond, rien ne change. Les employés de l'État, qui portent les services publics à bout de bras, sont toujours aussi mal rémunérés. Le gouvernement joue avec le feu. Alors que les conditions de travail ne cessent de se détériorer dans les réseaux de la santé, de l'éducation, des services sociaux ou de la fonction publique, et dans un contexte de pénurie de main-d'œuvre, comment le gouvernement peut-il espérer conserver à l'emploi son personnel et attirer de nouveaux travailleurs en refusant de payer son monde à leur juste valeur?» a ajouté Daniel Boyer, le président de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ).

«Alors que le réseau de la santé et des services sociaux (RSSS) a un immense besoin de main-d'œuvre, le gouvernement se doit d'offrir au personnel des conditions de travail attractives. Ça passe, entre autres, par un rattrapage salarial important », ont conjointement déclaré Andrée Poirier, la présidente de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), et Nancy Bédard, la présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), deux syndicats unis dans le cadre des négociations nationales qui s'amorcent justement en vue d’améliorer les conditions de travail des employés du secteur public.

Idem, la Fédération autonome de l'enseignement (FAE) a dénoncé l'écart salarial qui subsiste année après année entre les salariés québécois et l'ensemble des personnes employées dans la fonction publique, dont font partie les enseignants.

«Depuis trop longtemps, les profs voient leur pouvoir d'achat s'éroder. Alors que le personnel enseignant contribue à la vitalité économique du Québec, ils ne profitent pas de l'enrichissement collectif, qui permet au gouvernement québécois d'engranger des surplus importants», a dit Sylvain Mallette, le président de la FAE.

Ce n’est pas tout. Le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ), le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ), l'Association professionnelle des ingénieurs du gouvernement du Québec (APIGQ) et le Syndicat des constables spéciaux du gouvernement du Québec (SCSGQ) ont uni leurs voix pour déplorer «le fossé salarial qui se maintient depuis 10 ans» et pour demander au gouvernement Legault d'agir sans tarder, en soulignant par voie de communiqué que «les ingénieurs accusent à présent un retard de 31,5%, les professionnels de 17%, le personnel technique de 24%, le personnel de bureau de 30%, les employés de services de 23% et les ouvriers de 44%».

«Si rien n'est fait pour remédier à la situation, la crise dans les réseaux publics continuera de s'aggraver», a résumé Caroline Senneville, vice-présidente, de la Confédération des syndicats nationaux (CSN).

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