C'est trop long...

Offert par Les Affaires

Publié le 24/02/2018 à 06:00

C'est trop long...

Offert par Les Affaires

Publié le 24/02/2018 à 06:00

[Photo : Tim Pierce]

Comme «10199» autres personnes, j’ai respiré le même air que Michelle Obama au Palais des congrès de Montréal, début février. Oui, je sais, je suis en retard pour vous en parler. Mais vous admettrez que la cause des femmes et, plus généralement, celle de la diversité, est un sujet qui ne s’épuisera pas de sitôt. Entendez-moi bien, j’aimerais qu’on puisse passer à un autre appel. Ça voudrait dire que la question est réglée. À l’aube de la 44e Journée internationale des femmes, on en est loin. Même au Canada.

Une étude publiée la semaine dernière, commanditée par l’Université Carleton, BMO, le gouvernement du Canada et les consultants de The Beancon Agency, rapporte que « nombre des entrepreneures interrogées ont dit ne pas se sentir bienvenues ou incluses dans l’axe d’intervention des réseaux d’affaires, des incubateurs et des accélérateurs. Les femmes autochtones entrepreneures ont dit devoir relever ces mêmes défis, en sus d’autres fardeaux comme les préjugés et le manque d’accès à la formation entrepreneuriale dans les réserves». En juin dernier, c’est McKinsey qui constatait que le Canada fait du sur-place en matière d’équité depuis 20 ans et qu’au rythme actuel, il lui faudra de 30 à 180 ans pour effacer les écarts qui pénalisent les femmes.

Insupportablement trop long. Je comprends donc que Michelle Obama se soit montrée si catégorique dans son discours. Pour atteindre l’égalité, «il faut s’en donner l’objectif, et les mieux placés pour le faire, ce sont les hommes... c’est un peu effrayant, n’est-ce pas ?» Rires dans la salle, mais la pique était acérée.

Le risque, avec un discours qui dénigre ainsi «les hommes» comme s’ils ne faisaient qu’un, c’est une bien-pensance qui valoriserait systématiquement des standards exclusivement féminins, alors que l’objectif n’est pas de remplacer les hommes par les femmes, mais bien de les unir. La richesse réside dans la diversité (combien de fois faudra-t-il le rappeler...) Le Québec pourrait ajouter de 7 à 9% à son PIB d’ici 2026 grâce à la parité, selon McKinsey.

Il faut donc amener le balancier au centre, pas à l’autre extrême. D’ailleurs, Mme Obama a bien pris soin de ne pas vous antagoniser, messieurs, en glissant plusieurs fois « je ne dis pas ça comme une critique». N’empêche, c’est sur les épaules des hommes qu’elle fait reposer la responsabilité de la diversité de genres. «Vous devrez vous sonder l’âme, vous demander à quel point vous êtes prêt à céder de votre pouvoir.»

C’est brut, mais c’est vrai. On peut bien demander aux femmes de «lean in», d’afficher leurs ambitions, de s’entraider, de se transcender - et elles sont de plus en plus nombreuses à le faire - il n’en reste pas moins que l’aiguille ne bougera pas avant longtemps si les hommes ne s’en remettent plus souvent au leadership féminin.

 

À propos de ce blogue

Julie Cailliau est éditrice adjointe et rédactrice en chef du Groupe Les Affaires, dont l’équipe de journalistes chevronnés publie le journal Les Affaires, le site lesaffaires.com et le magazine Les Affaires Plus. Elle est également présidente du conseil d’administration de la Fondation des prix pour les médias canadiens. Diplômée de l’École supérieure de journalisme de Lille, en France, Julie a pratiqué le métier de journaliste au sein de plusieurs publications françaises et québécoises. Dans une vie précédente, elle a œuvré à titre d’ingénieure en biotechnologies. Son « why », c’est d’apprendre et d’informer afin de nous permettre de faire les bons choix. La prise de conscience de l’urgence environnementale et l’émergence de l’entrepreneuriat social comptent pour elle parmi les tendances les plus réjouissantes actuellement.