Est-ce que votre CA est sous l'emprise du «Zoomthink»?

Publié le 24/02/2021 à 07:00

Est-ce que votre CA est sous l'emprise du «Zoomthink»?

Publié le 24/02/2021 à 07:00

Conférence Zoom

En tout temps, le meilleur intérêt l’organisation doit servir de phare pour éclairer les décisions du CA. (Photo: Compare Fibre pour Unsplash)

BLOGUE INVITÉ. L’autocensure mine la crédibilité de conseils d’administration et plombe inévitablement sa performance. L’absence de diversité au sein du CA favorise l’émergence d’une culture d’autocensure. Entre semblables, on se comprend et on se complaît. Ce terreau fertile est idéal pour faire germer la pensée groupale («groupthink»). Avec l’accumulation des rencontres virtuelles, on parle maintenant du phénomène «Zoomthink». Administrateurs, êtes-vous sous l’emprise du «Zoomthink»? 

Sous son emprise, les administrateurs sont souvent à la recherche d’un consensus à tout prix. Obnubilés dans cette quête d’un pseudo-consensus, ils seront ainsi enclins à préconiser l’option favorisée par la majorité des administrateurs, même s’ils sont en désaccord ou réticents. D’une part, plusieurs administrateurs ressentent une fatigue lancinante engendrée par l’accumulation de réunions virtuelles (un nouveau phénomène appelé la «la fatigue Zoom»). Les interactions virtuelles ne sont pas toujours aussi naturelles et fluides que celles en présentiel. D’autre part, certains administrateurs éprouvent un inconfort à prendre la parole pour exprimer leur opinion. 

Par crainte d’être ostracisés, des administrateurs seront réticents à questionner ou à demander des informations complémentaires, proposer des points de vue alternatifs pour ne pas aller à contre-courant de l’opinion collective dominante. Différents facteurs peuvent influencer l’indépendance d’esprit de l’administrateur comme la rémunération et le prestige associés à la fonction, la volonté de s’intégrer à un réseau, le souci de protéger sa réputation, etc. Ces facteurs peuvent influencer l’objectivité du jugement. La cohésion, l’inaction, l’évitement de la dissension ont alors préséance sur la recherche de la meilleure décision.

Le président du CA joue un rôle clé dans l’efficacité du fonctionnement du CA, la participation des administrateurs et l’échange d’information. Le style de leadership peut encourager les administrateurs à s’exprimer ou, au contraire, les dissuader à le faire. 

En proie à la pensée groupale, des CA seront enclins à justifier leurs décisions controversées en minimisant l’importance de celles-ci, ou en arguant, par mimétisme, que d’autres organisations ont agi similairement. 

Nous avons observé quelques astuces limitant l’impact du «Zoomthink» au sein de CA : 

  • La préparation rigoureuse des rencontres et la qualité de l’information au soutien des réunions;
  • L’établissement d’un climat de confiance encourageant les administrateurs à s’exprimer librement, sans contrainte;
  • La prise en compte des avantages, inconvénients et risques associés aux stratégies et décisions à prendre;
  • L’évaluation périodique du fonctionnement du CA et de la contribution des administrateurs et du président du CA; 
  • L’identification et la prise en compte des intérêts des parties prenantes dans la prise de décision; 
  • La consultation d’experts; 
  • La recherche d’alternatives logiques et cohérentes aux options proposées;
  • L’intégration d’administrateurs aux profils diversifiés arrimée sur une matrice des compétences;
  • La consigne donnée aux administrateurs de garder leur caméra ouverte pendant la rencontre et la possibilité d’émettre des commentaires via la boîte de messagerie prévue à cet effet;
  • La constitution de sous-groupes virtuels d’administrateurs pour traiter d’une question de manière approfondie et le partage en plénière.

 

En tout temps, le meilleur intérêt l’organisation doit servir de phare pour éclairer les décisions du CA. Les administrateurs sont investis d’un devoir de fiduciaire qui ne saurait être occulté par la pensée groupale. Le président du conseil d’administration exerce un rôle pivot pour en contrer les effets pervers. L’ouverture du président du CA, sa transparence, son écoute, son souci de faire le contrepoids et sa gestion équilibrée des interventions des administrateurs peuvent constituer des répulsifs redoutables à la pensée groupale.

À propos de ce blogue

Passionnée de gouvernance, Joanne Desjardins cumule plus de 20 ans d’expérience. Elle est avocate, membre de l’Ordre de CRHA, certifiée en gouvernance (ASC et C. Dir.) et détentrice d’un MBA. Elle est associée chez Brio conseils et responsable du bureau de Québec. Son expertise est reconnue en stratégie, gouvernance et gestion des risques. Propulsée par son énergie contagieuse, elle carbure aux défis. À l’affût des tendances, elle s’abreuve d’idées nouvelles et partage ses réflexions dans le cadre de ce blogue destiné à la gouvernance.

Joanne Desjardins

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