Québec inc. doit se mobiliser pour protéger le siège social d'Osisko


Édition du 22 Mars 2014

Québec inc. doit se mobiliser pour protéger le siège social d'Osisko


Édition du 22 Mars 2014

Il y a maintenant deux mois que Goldcorp a fait son offre d'achat d'Osisko. Cette dernière résiste du mieux qu'elle peut à l'assaut du géant minier de Vancouver, mais jusqu'à maintenant, le Québec inc. se fait bien discret.

Montréal peut-elle se permettre de perdre le siège social d'Osisko ? La réponse est non pour les huit raisons suivantes.

1 - Osisko est le fleuron minier du Québec. Elle exploite à Malartic la plus importante mine d'or du Canada. Osisko a produit en 2013 plus de 475 000 onces d'or. Sa valeur boursière est de 3,4 milliards de dollars. Une seule autre société minière québécoise exploite une mine d'or. Il s'agit de Richmont, qui n'a produit que 30 000 onces d'or en 2013 et qui a une valeur boursière de 75 millions de dollars.

2 - Les réserves d'or prouvées et probables de la mine de Malartic sont estimées à 9,4 millions d'onces. À un rythme d'exploitation d'environ 600 000 onces par année, la mine produira pendant 15 ans. Cela permettra à Osisko de se développer et de faire de son siège social montréalais la base d'une société minière de classe mondiale. La plupart des autres grandes minières du pays ont leur siège social à Toronto.

3 - Si Goldcorp met la main sur Osisko, c'en sera fait du siège social de cette dernière. Il faudra des décennies avant d'envisager d'en retrouver un de la même importance. Osisko a été créée grâce à une combinaison unique de facteurs.

4 - Osisko emploie à son siège social 60 personnes, dont plusieurs ont une expertise exceptionnelle. Grâce à leur présence à Montréal, Osisko contribue de façon importante à la société québécoise. Ainsi, près de 10 M$ ont été versés à des universités québécoises par Osisko et certains des dirigeants. Osisko fournit des stages à 25 aspirants ingénieurs de l'École de technologie supérieure. Elle finance des oeuvres philanthropiques. Un propriétaire non québécois de la mine de Malartic n'aura pas la même sensibilité à l'endroit des besoins des organismes sans but lucratif du Québec.

5 - Plusieurs fournisseurs du Québec ne recevraient pas la même attention d'un société dont le siège social est à Vancouver. Plus de 85 % des dépenses de 1 G$ effectuées pour mettre en production la mine de Malartic ont bénéficié à des dizaines de fournisseurs du Québec : des ingénieurs, des foreurs, des équipementiers, des constructeurs, etc. Il en va ainsi pour des dizaines de professionnels et de consultants. Ils font tous partie du réseau d'Osisko. Ils seront appelés à la suivre pour mettre en valeur les autres gisements qu'elle pourrait développer. Cette relation d'affaires sera brisée et des millions de dollars de contrats seront perdus si Osisko est fondue dans un autre groupe, qui a déjà ses propres fournisseurs. Un important générateur de richesse au Québec s'éteindrait.

6 - Osisko est un citoyen corporatif responsable. Elle a déjà versé dans une fiducie les 44 M$ nécessaires à la restauration de son site.

7 - Osisko fait partie de l'héritage québécois. Elle a été formée grâce à l'expertise de Québécois qui ont travaillé pour Cambior, une société créée pour exploiter des gisements découverts par Soquem, une société d'État créée en 1965 par le gouvernement libéral de Jean Lesage, dont le ministre des Ressources naturelles était René Lévesque. Cambior a été vendue en 2006 pour 1,16 G$ à la société torontoise Iamgold, qui l'a intégrée. Son siège social a été fermé, comme ce sera le cas pour celui d'Osisko si Goldcorp réussit à l'acquérir.

8 - La disparition du siège social d'Osisko ne profiterait à personne, sauf aux actionnaires qui ont acheté ses actions dans un but spéculatif. Opportuniste, la minière Goldcorp profite d'une période de vulnérabilité d'Osisko. Alors que son action a chuté à cause de la baisse du prix de l'or, Osisko n'a pas assez de liquidités pour racheter des actionnaires minoritaires.

À propos de ce blogue

Tour à tour rédacteur en chef et éditeur du journal Les Affaires pendant quelque 25 ans, Jean-Paul Gagné en est l’éditeur émérite depuis 2007. En plus de publier un commentaire hebdomadaire dans le journal et de tenir un blogue dans LesAffaires.com, il participe à l’organisation d’événements et représente le journal dans les milieux d’affaires. Il est aussi appelé à commenter l’actualité dans d’autres médias et à prononcer des conférences. Jean-Paul Gagné a consacré sa vie professionnelle au journalisme économique. Avant son entrée aux journal Les Affaires, qu’il a contribué à relancer pour en faire la principale publication économique du Québec, il a passé une douzaine d’années au quotidien Le Soleil, où il était journaliste économique et cadre à la rédaction. Jean-Paul Gagné est diplômé en économie et en administration. Il a reçu de nombreuses marques de reconnaissance, dont les prix Hermès et Gloire de l’Escolle de l’Université Laval, le prix Carrière en journalisme économique de la Caisse de dépôt et placement et Merrill Lynch et le Prix du livre d’affaires remis par Coop HEC Montréal et PricewaterhouseCoopers. Il siège au conseil d’administration d’organismes sans but lucratif.

Jean-Paul Gagné

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