Élections: le référendum sur la souveraineté reste un enjeu majeur


Édition du 05 Avril 2014

Élections: le référendum sur la souveraineté reste un enjeu majeur


Édition du 05 Avril 2014

Bien des enjeux ont été soulevés au cours de l'épuisante campagne qui s'achève, mais l'un d'entre eux domine incontestablement tous les autres : c'est la possibilité de la tenue d'un référendum sur la souveraineté du Québec.

Cet objectif est d'ailleurs la raison première de l'entrée en politique de nouveaux candidats, comme l'a bien démontré Pierre Karl Péladeau.

C'est aussi la raison d'être du Parti québécois (PQ), ce qui explique qu'il reçoive l'appui de gens qui n'ont rien en commun, issus aussi bien de la gauche militante que de la droite antisyndicale, qui sont prêts à marcher sur des valeurs qu'ils ont défendues pendant des années pour «faire du Québec un pays». Pauline Marois ne peut pas prétendre que le but de cette élection soit simplement d'élire un gouvernement. Elle renierait le programme de son parti si elle se contentait de vouloir diriger une province. Après être devenue la première femme à diriger le Québec, son grand rêve à court terme ne peut être autre que d'enclencher le processus menant à un référendum sur la souveraineté. C'est légitime, mais il n'est pas évident que ce soit dans l'intérêt collectif. Les risques de cette aventure sont élevés.

Le processus électoral a été déclenché par des sondages qui ont amené les stratèges péquistes à croire à la possibilité de former un gouvernement majoritaire et à celle de favoriser la démarche menant au pays dont ils rêvent. Et même si la survie du gouvernement n'était pas menacée (celui-ci aurait pu faire adopter plusieurs éléments de ses projets de loi 14 sur la langue et 60 sur la charte des valeurs), le PQ avait élaboré une stratégie électorale bien réfléchie, appuyée sur le réflexe identitaire, comme Mario Dumont l'avait fait avec succès en 2007 pour propulser l'Action démocratique du Québec au statut d'opposition officielle, devant le PQ.

La stratégie péquiste s'appuie sur deux cordes sensibles : 1. la protection du français, que de nombreux francophones estiment menacé ; 2. la protection de certaines valeurs (neutralité religieuse de l'État, laïcité, égalité hommes-femmes, accommodements raisonnables), auxquelles adhèrent un grand nombre de citoyens.

Ces deux projets de loi sont litigieux sur certains aspects, ce qui importe peu aux stratèges péquistes. Ce qui leur importe, c'est que ces projets rejoignent les préoccupations des francophones et qu'ils se traduisent en votes pour leur parti, même si l'appui ainsi obtenu résulte d'un sentiment d'insécurité excessif sur le plan linguistique ou encore de la peur de l'autre, comme l'a illustré Janette Bertrand en parlant de la perte hypothétique du droit d'usage de la piscine qu'elle fréquente.

Contrairement à René Lévesque, les stratèges péquistes n'éprouvent aucune gêne à l'idée de restreindre encore les libertés linguistiques des non-francophones. On peut même se demander si certains militants ne seraient pas contents de l'exode des plus mécontents d'entre eux, qui seraient ainsi moins nombreux à voter contre le PQ.

Alors qu'elle a toujours prétendu que le projet de loi 60 était constitutionnel, voilà que Pauline Marois affirme que son gouvernement pourrait recourir à la clause dérogatoire de la Charte canadienne des droits pour protéger sa charte des valeurs contre tout recours juridique sur l'interdiction du port de signes et de vêtements religieux ostentatoires par les salariés de l'État et d'autres organisations. C'est odieux, mais bon...

À propos de ce blogue

Tour à tour rédacteur en chef et éditeur du journal Les Affaires pendant quelque 25 ans, Jean-Paul Gagné en est l’éditeur émérite depuis 2007. En plus de publier un commentaire hebdomadaire dans le journal et de tenir un blogue dans LesAffaires.com, il participe à l’organisation d’événements et représente le journal dans les milieux d’affaires. Il est aussi appelé à commenter l’actualité dans d’autres médias et à prononcer des conférences. Jean-Paul Gagné a consacré sa vie professionnelle au journalisme économique. Avant son entrée aux journal Les Affaires, qu’il a contribué à relancer pour en faire la principale publication économique du Québec, il a passé une douzaine d’années au quotidien Le Soleil, où il était journaliste économique et cadre à la rédaction. Jean-Paul Gagné est diplômé en économie et en administration. Il a reçu de nombreuses marques de reconnaissance, dont les prix Hermès et Gloire de l’Escolle de l’Université Laval, le prix Carrière en journalisme économique de la Caisse de dépôt et placement et Merrill Lynch et le Prix du livre d’affaires remis par Coop HEC Montréal et PricewaterhouseCoopers. Il siège au conseil d’administration d’organismes sans but lucratif.

Jean-Paul Gagné

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