BLOGUE. Voilà maintenant des années que les internautes québécois lisent paisiblement des nouvelles en provenance des États-Unis à l'effet que des groupes de milliers d'individus sont poursuivis par telle compagnie de musique ou tel studio de cinéma pour avoir téléchargé illégalement un de leurs produits, sans être inquiétés. Voilà que tout va changer.
En vertu d'un jugement rendu le 29 août dernier par le juge Michel Shore de la Cour fédérale, Bell, Cogeco et Vidéotron doivent remettre au plus tard aujourd'hui au producteur Voltage Pictures LLC les coordonnées d'internautes québécois ayant présumément téléchargé illégalement une copie du film The Hurt Locker.
Pour les non-initiés, Voltage Pictures a réussi à obtenir une liste d'adresses IP de ces présumés pirates. L'adresse IP est une série de chiffres (quatre nombres de 0 à 255 séparés par des points) attribuée à votre ordinateur quand vous vous branchez à Internet. Cette adresse est publique.
Ce qui n'est pas public par contre, c'est l'identité de la personne derrière cette adresse. Pour l'obtenir, il faut règle générale demander aux tribunaux de forcer le fournisseur d'accès Internet concerné à nous la remettre. D'où la décision de la Cour fédérale.
Étonnamment, cette décision a fait très peu de bruit jusqu'ici au Canada. Ça pourrait changer rapidement, quand le premier internaute anonyme recevra la visite du huissier. Il sera intéressant de constater quels seront les dommages exigés par Voltage Pictures LLC, s'il y a lieu.
Même s'ils n'y sont pour rien, il sera aussi intéressant de voir quelle sera la réaction des internautes envers les fournisseurs concernés (Bell, Vidéotron et Cogeco). On ignore pour l'instant combien d'internautes sont ciblés (le dossier n'était pas accessible au moment d'écrire ces lignes), mais s'ils devaient être quelques milliers, la grogne pourrait éventuellement grimper.
Le professeur de droit à l'Université d'Ottawa Michael Geist soulignait sur son blogue que ce nouveau développement rendait encore plus essentielle l'adoption rapide de modifications à la loi sur le droit d'auteur. Les nombreuses élections des dernières années ont maintes fois reporté cette adoption. Parmi les provisions escomptées de ces modifications figure une limite de 5000$ aux dommages exigibles pour une telle infraction. Quand on connaît la propension des avocats américains pour les poursuites à gros montants...
D'un autre côté, pour les entreprises du secteur du divertissement, ce geste de Voltage pourrait être une bonne nouvelle. Une large part des internautes considèrent encore à tort le Web comme un buffet ouvert et y piratent des oeuvres, cinématographique ou musicales entre autres, sans aucun scrupule.
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À propos du blogue "Réseau sans filtre" :
Jean-François Codère suit les entreprises et les produits technologiques depuis maintenant 12 ans, pour le compte de diverses publications Web, imprimées et télévisées. Il s'intéresse particulièrement aux stratégies des entreprises et à l'innovation, la vraie, celle qui est accessible à tous, qui fait écarquiller les yeux et qui, petit à petit, change le monde.
