Un fonds n'est pas un produit de luxe


Édition de Mai 2016

Un fonds n'est pas un produit de luxe


Édition de Mai 2016

Pour justifier des frais élevés, certaines sociétés présentent leurs fonds comme des produits de luxe. Mais l'investisseur n'y gagne rien.

Acheter un produit de luxe n'est pas toujours un acte rationnel. Les marques de luxe redoublent d'astuces pour faire rêver et pour con-vaincre le consommateur que leurs prix exorbitants en valent la peine. Le consommateur peut agir sous le coup de l'impulsion ou en retirer un plaisir qui va au-delà de la valeur réelle du bien. Quelle qu'en soit la raison, ce marché existe et répond à un besoin.

En gestion de portefeuille, on constate un phénomène similaire, mais le résultat n'est pas le même. Les gestionnaires, les conseillers et autres intervenants du domaine de la finance recourent à de multiples subterfuges pour convaincre l'investisseur de payer des frais élevés, lorsqu'ils sont clairement divulgués, en faisant miroiter le potentiel de rendements meilleurs. C'est une stratégie de vente éprouvée. Si les rendements futurs dépassent les attentes, les frais de gestion ne dérangeront pas le client. Et rien de plus facile que de trouver un fonds qui a obtenu de bons rendements relatifs au cours des dernières années. Puisqu'il y a des milliers de fonds disponibles, il y en aura toujours qui se démarqueront, même sur de longues périodes. L'investisseur est dès lors convaincu qu'il fait une bonne affaire et que les frais de gestion seront compensés par de meilleurs rendements. Or, toute notice d'offre mentionne que le rendement passé n'est pas garant du rendement futur. Cet avertissement est malheureusement trop vite oublié.

Dans le passé, deux principaux facteurs justifiaient des frais de gestion élevés. Tout d'abord, le travail de gestion de portefeuille demandait plus de temps, car l'utilisation d'outils automatisés était limitée. Ensuite, les rendements espérés des différentes catégories d'actif étaient nettement plus hauts, ce qui était dû notamment à des taux d'intérêt élevés. Les frais de gestion représentaient alors un plus faible pourcentage du rendement de l'investisseur et passaient un peu inaperçus. Ces deux facteurs sont maintenant caducs.

Aujourd'hui, il est possible d'exposer son portefeuille à la grande majorité des stratégies de placement à l'aide de nombreux produits à faible coût, dont les fonds négociés en Bourse (FNB). Il est par conséquent beaucoup plus difficile de justifier des frais de gestion supérieurs à 1 %, voire à 0,5 % ou moins pour des comptes plus importants, et ce, quelle que soit la stratégie envisagée. La multiplication de telles solutions de placement fait en sorte qu'une offre de gestion de portefeuille à frais de gestion élevés ne sert tout simplement plus le meilleur intérêt des investisseurs.

Des frais élevés de gestion d'un portefeuille ne doivent pas être perçus comme un investissement rentable, mais plutôt pour ce qu'ils sont, une dépense. Selon l'Institut québécois de la planification financière (IQPF), un portefeuille équilibré devrait générer environ 5 % de rendement par an (sur un horizon de quel-ques années) avant les frais. Si les frais payés sont de 2 % ou 3 % par an, la probabilité de rendements anémiques, et même sous le seuil de l'inflation, sera nettement plus élevée.

Contrairement à l'achat d'un produit de luxe, le fait de payer des frais élevés pour la gestion de son portefeuille est difficilement justifiable et n'apporte aucune satisfaction quantifiable. En fait, il ne fait qu'augmenter la probabilité d'avoir moins d'argent à la retraite. Un fonds d'investissement n'est pas un produit de luxe et ne devrait pas être perçu comme tel.

DE NOUVELLES RÈGLES ENTRERONT BIENTÔT EN VIGUEUR

En raison de la mise en application prochaine de la phase 2 du Modèle de relation client-conseiller (MRCC 2), la divulgation des frais de gestion payés par les investisseurs sera bientôt mieux encadrée et plus transparente. Les commissions de suivi seront aussi clairement divulguées, ce qui permettra à l'investisseur de mieux juger si les services rendus par son représentant justifient sa rémunération. Des surprises sont à prévoir et l'industrie réagit tranquillement. Au cours des dernières semaines, plusieurs gestionnaires de fonds communs de placement ont annoncé des réductions de leur frais de gestion. Ce sont des mesures qui vont dans le bon sens !

À propos de ce blogue

Ian Gascon est président de Placements Idema (www.idema.ca), un gestionnaire de portefeuille qui propose des solutions de placements personnalisées, à faible coût et utilisant des fonds négociés en bourse (FNB). «Les FNB démystifiés» est le premier blogue francophone dédié aux fonds négociés en bourse au Canada et Placements Idema est la première société au Canada à avoir lancé un service en ligne de gestion de portefeuille, maintenant mieux connu sous le terme «robot-conseiller».

Ian Gascon

Blogues similaires

Encore trop tôt pour sauter dans l’arène

Édition du 14 Juin 2023 | Dominique Beauchamp

ANALYSE. Les banques canadiennes pourraient rester sur le banc des pénalités quelque temps encore.