On n'entrera pas dans les détails du calcul, mais en tenant compte du temps nécessaire à l'élaboration du plan stratégique et à sa mise en place, et du délai avant d'obtenir les premiers résultats, il est facile de voir qu'on n'a donné aucune chance au coureur - M. Card - sur le plan de l'exécution.
Pourquoi ? Notre intuition est qu'une autre raison que la capacité d'exécution de M. Card (il n'y avait pas encore d'indice d'incapacité à l'époque) a davantage fait monter la température dans la salle du conseil : Kentz Group. Dès le départ, cette acquisition européenne de 2,1 milliards de dollars américains, survenue à l'automne 2014 et apparemment pilotée par M. Card, ne faisait pas l'unanimité dans le marché.
SNC a payé 10,4 fois le bénéfice avant intérêts, impôts et amortissement (BAIIA) alors que ses propres activités d'ingénierie se négociaient à une valeur estimée tout juste au-dessus de 5 fois le BAIIA. Si vous payez quelque chose 10 fois le bénéfice et que le marché décide de lui appliquer votre multiple de 5 plutôt que celui de 10, vous venez de détruire passablement de valeur.
Le pari de SNC, auquel on croyait personnellement, était qu'avec le temps le multiple appliqué à ses propres activités augmenterait, grâce à la croissance de Kentz et à une augmentation de la confiance des actionnaires. Et que l'affaire deviendrait fort payante.
Malheureusement, 16 % des revenus de Kentz proviennent du secteur minier, une industrie qui a faibli après l'acquisition. Surtout, 24 % proviennent du secteur pétrolier et gazier.
Il y a neuf mois (en janvier), lorsque pour la première fois on a commencé à parler à M. Card de son départ, où en était-on du côté du pétrole et du gaz ? Le baril, qui s'échangeait à 80 $ US au moment de l'acquisition, venait de dégringoler à 50 $ US. Tout comme le prix du gaz naturel, qui chutait de 4 $ à 2,50 $ US le mille pieds cubes pendant la même période.
Assez paradoxalement, Kentz Group est probablement actuellement la filiale qui fournit les résultats les plus intéressants à SNC. Et elle a, la semaine dernière, décroché un intéressant contrat pour une raffinerie en Irak. La question n'en reste pas moins de savoir si les grands bouleversements que traverse le secteur ne la rattraperont pas bientôt et ne viendront pas peser assez lourdement sur les résultats et le carnet de commandes.
Notre impression est que M. Card pourrait surtout avoir écopé en raison de l'acquisition de Kentz, dont les retombées au cours des prochains trimestres sont incertaines. Son départ n'est certainement pas un signal d'investissement.