Pouliot - Un précipice fiscal moins épeurant

Publié le 26/11/2012 à 09:19, mis à jour le 26/11/2012 à 09:19

Pouliot - Un précipice fiscal moins épeurant

Publié le 26/11/2012 à 09:19, mis à jour le 26/11/2012 à 09:19

À droite, le républicain John Boehner, président de la Chambre des représentants. À gauche, Barack Obama, président américain et démocrate.Photo:Bloomberg

BLOGUE. La sentez-vous ? L'inquiétude est de retour sur les marchés financiers. La falaise se rapproche et rend les indices volatiles.

Pendant longtemps, on a été convaincu que les États-Unis ne parviendraient pas à retrouver l'équilibre budgétaire sans déclencher par la même occasion une récession. Éponger un déficit équivalent à 8 ou 9 % du PIB, même sur quelques années, est forcément un puissant frein à la croissance.

Cette conviction est cependant moins forte depuis quelques semaines.

Ce qu'est la falaise fiscale

D'abord, un bref rappel sur ce qu'est la menace de la falaise fiscale.

À la fin de 2012, une série de mesures datant de l'administration Bush viennent à échéance. C'est le cas de plusieurs réductions d'impôt, de même qu'une série de dépenses de programmes et d'investissements.

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Une bonne nouvelle pour le budget. Le Congressional Budget Office prévoit que si rien n'est modifié, le déficit fédéral des États-Unis fondra de moitié.

Une moins bonne nouvelle pour l'économie, qui verrait sa croissance réelle amputée de 3,9 % et pourrait ainsi retomber en récession.

Pourquoi on est moins convaincu d'une récession

Dans un premier temps, parce que la situation financière des États-Unis au cours de la dernière année a été meilleure que prévu. Le 30 septembre, le gouvernement fédéral a clos son exercice financier 2012 avec un déficit de 1 089 billions $ US (trillions en anglais), l'équivalent de 7 % du PIB. Nettement mieux que les 8 ou 9 % du PIB qui étaient prévus quelques mois auparavant par les économistes.

Une compression plus importante des dépenses et de meilleures entrées fiscales expliquent la performance.

Vrai, c'est encore très élevé. Le déficit américain n'a en fait jamais été aussi important (en proportion du PIB) depuis la Seconde Guerre mondiale.

Mais regardons-y de plus près. Et portons surtout attention à l'approche qui se dessine.

Le réflexe est de penser qu'il faut ramener le déficit de 1,1 billion $ US à zéro. Il y a cependant consensus chez les Américains pour ajouter des déficits annuels à la dette plutôt que d'atteindre le déficit zéro. Ce faisant, nos voisins font le pari que leur dette croîtra, mais de façon proportionnelle à l'économie.

On n'est pas un partisan de cette approche, parce qu'elle a généralement pour effet de maintenir un niveau de dette assez élevé, ce qui complique les choses lorsqu'on rencontre des cycles de recul économique.

Cela dit, ne nous éloignons pas. Et jetons un coup d'oeil sur ce à quoi pourrait ressembler le sentier de la réduction du déficit.

Pour l'année qui s'amorce, la dernière cible budgétaire de la Maison-Blanche n'est en réalité qu'à 100 G$ US sous le déficit de 2012 (991 G$ US).

Ça semble un gros montant à renflouer, mais l'an dernier (30 septembre 2012), les Américains ont abaissé leur déficit de 208 G$, avec une économie en croissance d'environ 2 %. Sachant que les économistes tablent sur une croissance économique à peu près similaire pour 2013, réduire le déficit de 100 G$ cette année ne semble pas très demandant dans le contexte. Il n'y a pas un gros coup de frein à donner dans les dépenses ou de fortes hausses d'impôt à infliger. Comme en 2012, l'économie fait elle-même en partie le travail.

Pour 2014, la commande est plus importante : la cible demande une réduction de 330 G$ supplémentaires (661 G$). C'est ici qu'on peut être forcé de faire un plus gros effort budgétaire et heurter l'économie.

Il faut cependant noter qu'après 2014, les projections financières de l'administration Obama ne prévoient pas de réels abaissements supplémentaires du déficit. Jusqu'en 2022, il évolue constamment dans une fourchette de 550 à 650 G$ US. Le cap doit être maintenu, mais il n'y a pas d'efforts surhumains à faire. C'est dire qu'il n'y a pas non plus un si grand impératif à atteindre la cible de 2014.

Morale de l'histoire ?

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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