Paradis: comment on pourrait s'être fait avoir par les Bahamas

Publié le 08/11/2011 à 09:24, mis à jour le 08/11/2011 à 12:08

Paradis: comment on pourrait s'être fait avoir par les Bahamas

Publié le 08/11/2011 à 09:24, mis à jour le 08/11/2011 à 12:08

 

Le congédiement de neuf courtiers par Desjardins la semaine dernière en relation avec des opérations non déclarées de comptes aux Bahamas, soulève une intéressante discussion sur l'évasion fiscale dans les paradis fiscaux. Où en sommes-nous?

Sur le cas en particulier, beaucoup de détails sont manquants et leur absence appelle à la prudence. Les enquêtes en cours devraient permettre de voir plus justement si on est dans une situation organisée d'évasion fiscale ou non et de mieux mesurer l'ampleur de la faute.

Obtenir ces chroniques par Twitter : @F_Pouliot

Si un système a existé, l'affaire pourrait encore permettre de renforcer le cadre réglementaire. Avec plus de certitude quant aux résultats, souhaitons-le, que les actions posées ces dernières années.

Le professeur en fiscalité André Lareau nous expliquait lundi comment le gouvernement canadien avait, ces dernières années, augmenté sa lutte contre les paradis fiscaux.

Avec les Bahamas par exemple, nous avons signé le 17 juin 2010 une entente d'échange de renseignements. L'entente n'a pas encore été ratifiée, mais devrait l'être prochainement.

On n'a cependant rien pour rien dans la vie. Pour obtenir cette entente (et quelques autres ententes avec d'autres pays) il a fallu donner du lest aux gens des Bahamas, qui ne voulaient pas voir le capital qui les fait vivre s'envoler.

En contrepartie, il a été conclu que les filiales des sociétés canadiennes établies dans les îles pourraient désormais rapatrier leur capital au Canada sans aucune imposition fiscale.

Bref, on a légalisé le paradis fiscal.

Le gouvernement semble faire le pari que même s'il ne pourra y prélever de l'impôt, plus de capital reviendra vraisemblablement au pays. Les compagnies voudront utiliser celui-ci pour procéder à des investissements ici, ce qui sera potentiellement générateur d'une activité économique supplémentaire. Ou encore augmenteront les dividendes à leurs actionnaires, qui paieront à leur tour de l'impôt.

On pourra aussi du coup avoir accès aux comptes des particuliers qui cachent leurs revenus et potentiellement aller chercher certaines sommes.

Il reste à voir cependant si, au final, ces ententes seront vraiment payantes pour le Canada. Pas mal de capital d'entreprises risque désormais dans l'avenir de se retrouver exempt d'impôt puisque qu'apparemment rien n'empêchera une société canadienne d'ouvrir une filiale dans les îles et d'y transférer des activités pour éluder l'impôt qu'elle paie actuellement.

À l'heure où les investissements se font davantage dans les pays émergents, quelque chose nous dit que ces ententes risquent d'être déficitaires pour le Canada, en plus de créer une injustice fiscale entre les compagnies qui auront les moyens d'utiliser le système et celles qui ne l'auront pas.

 

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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