Où s'en va-t-on ?

Publié le 19/08/2011 à 15:07, mis à jour le 21/08/2011 à 18:21

Où s'en va-t-on ?

Publié le 19/08/2011 à 15:07, mis à jour le 21/08/2011 à 18:21

[Photo : Bloomberg]

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Où va-t-on?

Allons-y en cascade.

La décote de Standard & Poor's était-elle justifiée ?

Il est vrai que la maison de notation ne fait pas très bonne figure dans l'affaire de la décote des États-Unis. Cette erreur de 2 milliards de dollars américains (G$ US) sur les déficits accumulés des 10 prochaines années lui fait un peu perdre la face, mais, surtout, l'un de ses deux motifs principaux. La maison voulait voir des retranchements aux déficits de 4G $ US pour la période, les élus en proposaient 2G $ US. En tenant compte de l'erreur, le résultat est le même que si les élus avaient proposé des coupes de 4G $ US.

Il faut cependant aussi noter que les plans en place ne permettent pas d'entrevoir une réduction du déficit américain dans les prochaines années. De 74 % du PIB, la dette américaine doit grimper à 85 % d'ici 2021, selon Standard & Poor's.

Sur une échelle de qualité qui compte plusieurs barreaux, il vient un moment où on ne peut demeurer au sommet si aucun geste significatif n'est posé.

La décote était justifiée.

Vers où va-t-on ?

La question la plus difficile.

Les dépenses publiques aux États-Unis représentent 38,9 % du PIB (39,7 % au Canada), selon l'Index of Economic Freedom. Le déficit du gouvernement fédéral à lui seul s'élèvera à 9 % du PIB en 2011.

Sachant que le PIB américain a crû au dernier trimestre de 1,3 %, on voit tout de suite quel peut être l'impact d'une réduction des dépenses publiques sur l'économie. Une hausse des impôts serait peut-être un peu moins dommageable, mais ça reste à voir.

Tout dépendra en fait maintenant de l'horizon de temps sur lequel on décidera de lisser la diminution des déficits. Quelque chose nous dit que ce sera sur une assez longue période.

Assez pour éviter une récession ?

Pas sûr. Ça brasse aussi en Europe, alors que le prêt de 500 M$ de la banque centrale européenne à une banque non identifiée cette semaine a de quoi soulever des craintes financières. Des banques semblent avoir de la difficulté à se financer. Le système bancaire connaît des ratés, ce qui n'est pas pour insuffler de la confiance.

Il faudra voir notre réaction collective et combien on décidera de dépenser dans le contexte.

La Fed peut-elle aider ?

Pas beaucoup. La banque centrale américaine commence à manquer d'outils.

Différentes options lui sont offertes. Elle peut notamment lancer un programme d'assouplissement quantitatif. Elle imprimerait alors de l'argent qui lui permettrait de racheter des obligations et, théoriquement, de faire baisser les taux de 5 et de 10 ans.

Cette mesure, et d'autres du genre, ont cependant peu de chances d'offrir un important soutien. Elles visent surtout à créer un environnement offrant des taux d'intérêt faibles et à inviter les entreprises à investir.

Or, avec des obligations 5 ans à 1 % et 10 ans à 2,25 %, les taux d'intérêt sont déjà bas. Ce n'est pas parce que les taux sont élevés que les entreprises n'investissent pas, mais plutôt parce que la croissance des dernières années a été artificiellement soutenue par les déficits des gouvernements. À quoi bon investir lorsqu'on a déjà des surplus de capacité et que l'économie menace de tomber ?

Que fera la Bourse ?

Une autre question difficile.

Il risque d'y avoir beaucoup de volatilité au cours des semaines à venir. La cote AAA de la France est incertaine, tout comme les prochaines données du PIB américain.

On a tenté de voir ce à quoi pourrait ressembler le marché et à quel moment on devrait devenir nerveux.

À la suite de la crise financière, les profits des entreprises du S&P 500 avaient chuté en 2009 à 62,25 $ US, selon Reuters. Ils avaient ensuite rebondi à 84,73 $ US en 2010. La prévision 2011 est toujours à 97,05 $ US.

Cherchons le bas potentiel des trois prochains mois.

En appliquant un multiple historique de 15 au bénéfice de la crise (2009), la retraite potentielle du S & P 500 se situerait autour de 950 points, soit une baisse de 20 % par rapport à aujourd'hui (1 200 points).

Une baisse équivalente placerait le Dow Jones à 9 000 points.

Ce sont des creux que l'on ne devrait pas atteindre cependant. Du moins, pas avant quelque temps. En faisant reculer le bénéfice 2010 de 10 % (ce qui veut dire un recul de 25 % de l'anticipation 2011) et en appliquant le multiple historique moyen (15), le S&P 500 devrait s'échanger autour des 1 200 points et le Dow Jones, des 11 300 points. C'était le plancher qu'on envisageait pour les trois prochains mois il y a quelques jours encore. On est cependant maintenant bien en-dessous (10 900 points).

Cherchons maintenant le haut potentiel pour la même période.

On va supposer que l'économie continue à progresser, mais à très faible vitesse. Le bénéfice anticipé pour 2012 est à 90 $ US. Il est supérieur à 2010, mais inférieur à la projection actuelle pour 2011. À un multiple de 15, c'est une cible de 1 350 points pour le S&P ou autour de 12 800 points pour le Dow Jones.

Les deux scénarios sont défendables. À chacun de construire le sien et d'évaluer son risque.

DANS LE DÉTAIL

Sur le radar

Les bénéfices du S&P 500¹

2009 62,25 $

2010 84,73 $

2011 97,05 $

Évolution des PIB canadien et américain2

Année / Canada / États-Unis

2005 / 2,9 % / 3,2 %

2006 / 2,7 % / 3,2 %

2007 / 2,7 % / 2,0 %

2008 / 0,4 % / 1,1 %

2009 / - 2,5 % / - 2,6 %

2010 / 3,1 % / 2,8 %

¹ Thomson Reuuters 2 Index Mundi

Source : Bloomberg

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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