Mines: faut-il suivre messieurs Parizeau et Allaire?

Publié le 23/11/2011 à 09:25, mis à jour le 25/11/2011 à 14:01

Mines: faut-il suivre messieurs Parizeau et Allaire?

Publié le 23/11/2011 à 09:25, mis à jour le 25/11/2011 à 14:01

BLOGUE. Il faut instaurer au Québec un nouveau modèle mondial de régime minier, modèle qui fera exploser les redevances. Il faut aussi investir dans plusieurs sociétés minières afin que le Québec profite de leur rentabilité et récupère l'aide qu'il leur consent en infrastructures routières, portuaires et en électricité.

La première suggestion vient d'Yvan Allaire, un professeur universitaire à l'UQAM et aux HEC, ancien administrateur de la Caisse de dépôt. La seconde, de l'ancien premier ministre du Québec, Jacques Parizeau. Les deux participaient mardi à un intéressant colloque de l'Institut de recherche en économie contemporaire (IREC) aux HEC.

PLUS : Le Plan Nord appauvrira les Québécois, plaident des experts

Un nouveau régime minier

D'abord sur la suggestion de monsieur Allaire.

Dans une récente étude comparative des taux d'imposition entre provinces (Digging Deeper, Canadian mining taxation), Price Waterhouse simule la rentabilité d'exploitation d'une nouvelle mine au Québec.

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La mine projetée a des réserves de 2 millions d'onces, qui seront exploitées sur 10 ans (plus trois ans de préparatifs), à raison de 200 000 onces par année. Les quatre premières années, le prix de l'or est à 1200$ l'once, pour le reste du temps, il est à 1050$ (à 1 700 $ l'once aujourd'hui).

Résultat de l'exploitation du projet: un taux de rendement interne de 71,4%. Dit autrement, en moins d'un an et demi d'exploitation votre mine est payée et le reste des années est du bénéfice.

De sa carrière, monsieur Allaire dit n'avoir jamais vu de projets aussi payants.

Sa suggestion: faire en sorte que la rentabilité des sociétés minières du Québec soit plafonnée à un taux de rendement de 30% et que tout ce qui excède revienne plutôt au Québec sous forme de redevances.

C'est big et ce serait tout un coup de pouce pour les finances publiques du Québec. Il calcule que sur dix ans, un projet du genre rapporterait sous le régime actuel 585 M$ au trésor. Alors que sous le plafond du 30% de rendement, Québec récolterait plus de 1,9 G$. Les redevances sont au moins trois fois plus importantes et plus le projet augmente en importance, plus il peut devenir payant.

Ce n'est pas un calcul de monsieur Allaire, mais en appliquant une simple règle de trois aux redevances reçues cette année (304 M$), c'est près de 1 G$ de plus à chaque année qui entrerait dans les coffres du Québec. Et probablement même davantage.

Une bonne idée?

Peut-être, mais il apparaît difficile de penser que l'on pourra amener ça seul.

Ce serait faire un bon coup financier pour quelques années, mais à terme, ce serait aussi probablement la fin du développement et de l'exploration minière au Québec. Les minières continueraient bien entendu d'exploiter leurs gisements actuels (le minerai ne s'en ira pas et les infrastructures non plus), mais continueraient-elles à explorer ici? Le doute est important. À quoi bon investir dans des endroits où notre rendement est plafonné à 30% quand on a le monde ouvert devant soi sans plafond? Et l'Ontario avec un taux de rendement interne à 78,2%...

D'autant que le 30% n'est pas garanti, si jamais les prix s'effondrent.

Il n'est pas sûr non plus que l'on enverrait un bon message comme terre d'accueil d'investissements. On a à une certaine époque consenti un régime aux sociétés minières qui leur laissait entrevoir des bénéfices sans trop de contraintes pour le futur. Si on leur demande soudainement beaucoup plus, il faudra aussi expliquer à Terre-Neuve pourquoi on refuse de rouvrir Churchill Falls et de partager avec elle les bénéfices d'un marché plus porteur qu'on ne l'avait prévu dans le temps.

Cela dit, il vaut la peine de creuser l'idée de monsieur Allaire, dans une approche pancanadienne, avec peut-être un peu plus de retenue.

La suggestion de monsieur Parizeau

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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