Les dessous de l'affaire Osisko

Publié le 03/03/2014 à 17:30

Les dessous de l'affaire Osisko

Publié le 03/03/2014 à 17:30

Photo: Bloomberg

Osisko et Goldcorp s'entendent pour mettre fin à leurs démêlés judiciaires. Osisko renonce à mettre en place sa pilule empoisonnée (qui aurait étiré le processus de vente) et Goldcorp s'engage à ne pas accepter les actions d'Osisko avant le 15 avril. Autrement dit, le chemin est maintenant bien balisé: Osisko a jusqu'à la mi-avril pour trouver un acheteur qui surenchérisse.

L'affaire a des dessous et des à-côtés fort intéressants.

Commençons par les à-cotés.

Les à-côtés

Jusqu'à lundi, Osisko reprochait à Goldcorp de ne pas avoir respecté une entente de confidentialité, qui lui interdisait de faire une offre d'achat avant le 30 juin.

La prétention d'Osisko est que, à la suite d'un accès privilégié aux livres, Goldcorp détenait des renseignements confidentiels et tentait de la prendre de vitesse en faisant une offre directement à ses actionnaires. En désaccord avec celle-ci, le conseil d'Osisko estimait ne pas avoir assez de temps pour solliciter des offres concurrentes.

La stratégie utilisée par Osisko pour gagner du temps nous a dès le début fait sourire.

Au jour de la demande d'injonction, il fallait voir la réaction de notre confrère anglophone lorsque la procédure d'injonction d'Osisko fut accessible aux journalistes. "Oh non! En français!", n'avait-t-il pu retenir.

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Il est très rare que les grands dossiers économiques se déroulent en français au palais de justice. Les procédures d'Abitibi-Consolidated étaient en anglais, beaucoup de celles de Lac-Mégantic aussi. Il y a souvent des acteurs anglophones au dossier, et les cours s'adaptent à la situation. Mais Osisko avait cette fois choisi de jouer d'astuce. Le jour même, les procureurs de Goldcorp n'eurent d'autres choix que de demander une remise, la requête en injonction n'ayant pu être traduite à temps, et certains dirigeants de l'entreprise ne comprenant pas le français.

La preuve que l'on cherchait à gagner du temps?

Lundi, le communiqué de presse annonçant le règlement est en premier lieu sorti en anglais. Le communiqué français n'était pas prêt. Les explications du règlement hors cours et son entérinement par la cour supérieure se sont aussi faits en anglais. Il faut dire que le président de Goldcorp, Chuck Jeannes, était sur place. Il y avait lieu d'être courtois, et plus d'obligation de gagner du temps.

Autre à-côté intéressant de l'affaire, qui ne lui est pas intrinsèquement liée, mais qui permet de voir à quel point certains membres de la magistrature ont un sens élevé du devoir. L'entente entre les avocats d'Osisko et Goldcorp est survenue vers 2-3h dans la nuit de dimanche à lundi. Un courriel a été envoyé au juge Louis J. Gouin pour l'informer de la situation. Quelques minutes plus tard, le juge faisait savoir qu'il prenait acte de l'entente, au grand étonnement des procureurs. Le juge Gouin avait passé la fin de semaine à se préparer pour l'audience, et, à 3h du matin, il s'était remis au boulot afin d'être fin prêt. Apparemment, il travaille régulièrement ainsi. Voilà un exemple susceptible de rehausser la confiance du public dans l'administration de la justice.

Les dessous de l'affaire

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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