La tentation de Performance Sports et de Sportsman's


Édition du 27 Août 2016

La tentation de Performance Sports et de Sportsman's


Édition du 27 Août 2016

[Photo : Shutterstock]

Le moment est venu de nous ouvrir sur nos dernières tentations. Depuis quelques mois, nous sommes pratiquement chaque jour sur la trace de deux titres qui nous taraudent, mais avec lesquels on hésite chaque fois à conclure.

Une ambivalence qui aura finalement été une bénédiction dans un cas, mais qui est pour l'instant une malédiction en ce qui concerne l'autre. D'abord, parlons du péril évité.

La tentation de suivre Power Corp. dans Performance Sports (PSG, 2,30 $ CA)

En mars, le titre de Performance Sports Group, la société mère de Bauer et d'Easton, subissait toute une dégelée.

À la mi-janvier, la direction avait indiqué aux analystes que, pour 2016 (exercice se terminant en mai), le bénéfice de la société devrait varier de 0,66 $ à 0,69 $ US par action. Moins de deux mois plus tard, le 8 mars, la société revoyait ses prévisions et prévenait que le résultat varierait de 0,12 $ à 0,14 $ US.

Le titre dévissait alors et perdait la moitié de sa valeur pour tomber dans une zone de fluctuation de 4 à 4,50 $ CA.

Un rapide mouvement de marché est toujours intéressant en soi. Or, celui-ci n'était pas qu'intéressant. Il était aussi tentant. Pour ceci : à partir de ce moment, Power Corp. se mettait à accumuler les positions. Jusqu'à il y a quelques jours, alors que sa participation atteignait 17 %.

Si Power achète avec un tel entrain, pourquoi ne pas suivre ? Ce n'est pas comme si c'était le dernier venu.

Et il est vrai qu'il semblait y avoir une occasion attrayante. La révision des prévisions de la direction tenait en bonne partie, disait-on, à la faillite du détaillant The Sports Authority, qui allait fermer nombre de magasins (finalement tous). L'opération allait vraisemblablement inonder le marché de produits en liquidation et faire en sorte que les commandes soient moins grandes pour un temps dans le secteur au complet.

Demande plus faible pour une saison ou deux ne veut pas dire demande plus faible pour toujours. Il faut savoir saisir les anormalités et tirer profit du retour à la normalité.

Deux choses avaient cependant retenu notre attention.

1. Le ratio dette/BAIIA de l'entreprise, qui risquait cette fois d'atteindre les 10 fois. Les conditions de crédit étaient assez souples ; et les échéances de dette, éloignées (avril 2019 et avril 2021), mais quand même. Ce n'était pas un niveau confortable, la plupart des banques, dans les autres secteurs, devenant assez nerveuses à un niveau de 6 fois.

2. Une note de RBC Marchés des Capitaux, qui faisait un parallèle avec une situation apparentée qu'Adidas avait déjà traversée dans le passé. En ajustant les multiples pour tenir compte d'une dette plus élevée chez Performance Sports, RBC en arrivait à une cible à 4,65 $ CA. C'était à peu près le cours de négociation du titre à l'époque, mais on trouvait que RBC utilisait toujours un multiple trop élevé, compte tenu de la dette. Ce qui voulait dire, à nos yeux, que le titre n'était pas encore à un niveau suffisamment bas pour offrir un rapport risque/rendement intéressant.

Réserve salutaire. Il y a quelques jours, la direction publiait un communiqué selon lequel elle était incapable de produire son rapport annuel dans le délai prescrit par ses conventions de crédit, et son titre tombait encore de moitié. Il cote aujourd'hui à 2,30 $ CA.

Que se passe-t-il chez Performance Sports ?

Bien malin qui peut le dire. Le communiqué est laconique. Il se pourrait néanmoins que les résultats avec lesquels on travaillait jusqu'à maintenant ne soient plus bons.

Temps de se positionner dans le titre quand même ?

Peut-être. Le problème peut ne pas être d'une ampleur démesurée. Il ne s'agit plus ici d'investissement, mais de spéculation.

Mieux vaut attendre la suite. Il ne serait pas étonnant d'assister à une restructuration de la dette. Ce serait pénible pour tous (actionnaires et créanciers), mais cela ramènerait l'entreprise sur une fondation plus solide.

Toujours sur l'écran radar, donc, Performance Sports, mais dans l'attente d'un signal plus clair.

L'autre tentation : Sportsman's Warehouse (SPWH, 10,54 $US)

Passons à l'autre tentation, pour laquelle on aurait peut-être dû succomber plus tôt. La société est en fait une chaîne de magasins de sport, dont les services sont particulièrement axés sur les activités extérieures. La chasse et la pêche y occupent une place importante.

L'entreprise compte près de 70 établissements dans une vingtaine d'États. Elle cherche à s'installer dans de plus petites communautés où la concurrence est moins importante. Des analystes voient son potentiel d'ouvertures de magasins à au moins 300 établissements.

Au printemps, à la suite de résultats décevants où les attentes étaient élevées, le titre est passé de 14 $ US à moins de 8 $ US, soit 11 fois le bénéfice.

Au moment où on s'apprêtait à le quérir, oups ! début d'une série de fusillades aux États-Unis. «Il y a de la menace réglementaire comme jamais, les ventes d'armes à feu et le multiple pourraient encore souffrir, mieux vaut attendre», s'était-on dit.

Depuis, le titre a pris plus de 35 % et on s'arrache les cheveux. Il est à 15 fois les bénéfices, ce qui est toujours tentant : le titre se négocie à la moyenne historique du marché, et son potentiel de croissance est vraisemblablement supérieur (le bénéfice a progressé d'au moins 20 % à chaque exercice dans les dernières années).

On attend une correction de marché. Mais peut-être est-ce une erreur.

Sur le radar

Les recommandations des analystes qui suivent le titre de Sportsman's Warehouse (SPWH, 10,54 $ US)

3 Acheter

4 Surperformance

Cours cible : 14,65 $ US

Source : Thomson Reuters

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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