Bourse: la prophétie 2017

Offert par Les Affaires


Édition du 10 Décembre 2016

Bourse: la prophétie 2017

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Édition du 10 Décembre 2016

[Photo : 123RF/Alphaspirit]

«Qu'êtes-vous donc allé voir? Un prophète ? Oui vous-dis-je, et plus qu'un prophète...» - Luc 7: 26-28

Voici revenu le moment où le prophète sort ses feuilles de thé, frotte sa boule de cristal et ajuste sa calculatrice pour tenter de prévoir la direction que prendra le troupeau au cours des 12 prochains mois.

C'est chaque année un exercice difficile, qui fait perdre quelques cheveux de plus au prophète. Il est, au passage, contre-indiqué pour tout investisseur sérieux. Celui-ci devrait plutôt essayer de repérer des sociétés qui ont un rendement incertain sur un an, mais qui, sur une plus longue période, ont un potentiel certain.

Puisque la fonction réclame un pronostic, allons-y.

Mais d'abord, un retour sur 2016.

Ce qui était annoncé

Qu'annonçait la prophétie à pareille date l'an dernier?

«Le S&P/TSX devrait terminer l'année 2016 autour des 14560 points: une progression de 12%. Pendant ce temps, aux États-Unis, le S&P 500 devrait clôturer autour des 2200 points, en hausse de 7,5 %».

Qu'a fait le marché ?

À quelques jours de la fin du calendrier, Toronto est en hausse d'environ 17,8% (un 5% de plus que ce qui était annoncé) et l'indice américain est en progression de 10,8%. (NDLR: les indices ont monté de 3% de plus qu'au moment d'écrire ces lignes).

Pas mal pour le prophète.

Est-ce que tout s'est passé selon les écritures ?

Assez, comme on l'a vu, pour la prévision concernant les indices, mais pas tout à fait en ce qui concerne les bénéfices.

À pareille date l'an dernier, les grands stratèges s'attendaient à ce que les bénéfices grimpent de 9,5 % au Canada et de 8 % aux États-Unis en 2016. On trouvait à l'époque que c'était une prévision trop optimiste. Le prix du pétrole avait reculé et il nous semblait que ce recul n'était pas encore totalement reflété dans la rentabilité des pétrolières en raison de contrats de ventes à terme. Avec la Chine qui toussotait, il était aussi difficile d'anticiper une remontée du prix des métaux.

On avait donc réduit de moitié la prévision de croissance des bénéfices des experts au Canada (à 4 %) et ramené à 6% celle aux États-Unis.

Les bénéfices de 2016 ne sont pas encore connus (on ne dispose que de prévisions), mais ils devraient finalement progresser de 6,6 % au Canada et de 0,8 % aux États-Unis. Constat : le prophète avait pas mal de brouillard dans ses lunettes en ce qui concerne les bénéfices, et les grands stratèges, encore plus.

Évidemment, on compare un peu des pommes et des oranges dans ce qu'on vient d'écrire, puisque les progressions s'appuient sur les bénéfices réels de 2015 par rapport aux prévisions de 2016, tandis que nos prévisions et celles des stratèges s'appuyaient sur des bénéfices estimés en 2015 (en décembre 2015, nous n'avions pas encore les chiffres réels). Mais le calcul est quand même assez indicateur.

Que disent les écritures pour 2017

Il faut d'abord tenir pour acquis que les bénéfices actuellement prévus pour 2016 seront bien ceux qui se présenteront (756 à Toronto et 119 à la Bourse de New York).

Commençons par ce qui se passera chez l'oncle Sam. Avec l'élection de Donald Trump, les projecteurs sont tournés vers les États-Unis. Les décisions des prochains mois, en matière de protectionnisme, pourraient influer sur la croissance du monde entier.

Le consensus des stratèges est que les bénéfices des sociétés du S&P 500 progresseront de près de 12% en 2017. C'est une prévision qui semble encore une fois grandement optimiste. Il serait surprenant que les baisses d'impôts fédérales des entreprises (de 35 % à 15 %), promises par M. Trump, tout comme les investissements massifs dans les infrastructures, se matérialisent cette année. Notre pronostic fait plutôt état d'une croissance de 6%. Cela veut dire un bénéfice à 126 pour l'indice.

Quel multiple accoler à ce bénéfice ?

Les baisses d'impôts ne surviendront pas en 2017 et les investissements en infrastructure non plus. Mais ces mesures finiront par entrer en vigueur. Le multiple historique moyen est de 15. On adoptera un multiple de 18, l'humeur du marché étant enthousiaste à l'égard de ces développements éventuels. Cette humeur optimiste pourrait n'être que temporaire, étant donné la dégradation prévisible des finances publiques américaines, mais elle pourrait quand même s'étendre sur plus de 12 mois et permettre au S&P 500 d'atteindre les 2270 points. Pronostic du prophète en ce qui concerne le marché américain en 2017, donc: une progression d'environ 3% par rapport au niveau d'aujourd'hui.

Passons au S&P/TSX. Les prévisions des stratèges des bénéfices des sociétés canadiennes sont pour une progression de 23%. N'ajustez pas vos lunettes. Vous avez bien lu!

L'OPEP a beau avoir un accord, les prix ne pourront pas remonter tellement au-dessus des 50$US le baril sans que les producteurs non-membres n'ajoutent de la production. Le catalyseur ne semble pas suffisant pour justifier une telle progression des bénéfices. On opterait plutôt pour une croissance de 10% (supérieure à cette année), ce qui veut dire un bénéfice à 831.

Reste le multiple. En ces temps de marchés fortement évalués, on adoptera le même multiple qu'aux États-Unis. Pronostic du prophète en ce qui concerne le marché canadien: le S&P/TSX devrait se négocier à environ 14970 points, un recul de 0,3 %.

Conclusion?

En 2017, le marché américain devrait enregistrer une légère augmentation par rapport à aujourd'hui, tandis que le marché canadien est à risque de reculer.

«Recommande aux riches du présent siècle de ne pas être orgueilleux , et de ne pas mettre leur espérance dans des richesses incertaines...»- 1 Timothée 6 : 17

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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