Cadre financier fédéral: la chaleur monte dans la cuisine

Publié le 07/12/2015 à 21:03

Cadre financier fédéral: la chaleur monte dans la cuisine

Publié le 07/12/2015 à 21:03

Photo: Shutterstock

Les semaines se suivent et les casse-têtes s'accumulent pour le nouveau ministre des finances à Ottawa, Bill Morneau.

Flashback, il y a deux ou trois semaines, avec le dévoilement des coûts reliés à l'accueil de 25000 réfugiés syriens. Dans son cadre financier électoral, le Parti libéral du Canada (PLC) prévoyait que l'opération coûterait 100M$ la première année et 50M$ la seconde (150M$ sur deux ans, point à la ligne). La dernière estimation fait plutôt voir qu'il en coûtera entre 564 et 678M$ sur six ans. Et c'est sans compter les réclamations que pourraient loger les provinces si elles doivent engager des sommes importantes.

Il y a quelques jours, autre surprise, à l'occasion du Sommet sur le climat: un financement de 2,65G$ sur cinq ans pour aider les pays les plus pauvres à diminuer leurs émissions de CO2. D'un épluchage exhaustif du dernier budget, du programme libéral, et de conversations avec les fonctionnaires, il ressort qu'il s'agit pour l'essentiel d'une nouvelle dépense qui n'était prévue à nulle part et qui viendra ajouter encore un peu plus de rouge aux états financiers.

Lundi enfin, troisième surprise avec la confirmation des baisses d'impôt pour la classe moyenne et la hausse d'impôt des plus fortunés (le 1%): on est short des deux côtés!

Sur la hausse d'impôt des plus riches, il manque 800M$ de revenus par rapport à ce qui était au cadre du PLC dans les deux premières années, et 500M$ en 2019-20. Le manque à gagner pourrait être encore plus important si on en croit la dernière étude de l'Institut Fraser, mais il n'y a pas unanimité là-dessus.

Quant aux baisses d'impôts accordées à la classe moyenne, il en coûtera 565M$ de plus que ce qui était prévu au cadre financier du PLC la première année et 1G$ de plus que prévu en 2019-20.

Le problème

On l'a déjà dit, le problème n'est pas réellement de réaliser des déficits pendant un certain nombre d'années. Surtout lorsque ces déficits sont principalement occasionnés par des investissements dans les infrastructures, investissement qui sont nécessaires pour remettre la maison à niveau.

L'important est que ces déficits soient temporaires. Il faut revenir à l'équilibre un jour, de manière à éviter le piège de l'endettement excessif.

La difficulté est que, avec les dernières annonces et la récente révision des prévisions de croissance, le déficit à éponger en 2019-2020 se situe probablement aujourd'hui non loin des 15G$.

C'est une somme quasi-impossible à résorber sur une seule année, si on ne souhaite pas toucher aux impôts. À titre d'illustration, entre 2010-11 et 2014-15, le gouvernement Harper a réussi à aller chercher pour 17,7G$ d'économies par le biais d'un contrôle des dépenses et l'élimination d'échappatoires fiscales (page 395 du dernier budget).

Le gouvernement Trudeau a indiqué qu'il entendait maintenir son programme d'investissements en infrastructures et ses engagements de réduction d'impôt. Soit. Mais d'où proviendra le renflouement?

Les précisions peuvent sans doute attendre au prochain budget. D'ici là, monsieur Morneau devrait cependant mettre le holà sur les dépenses non planifiées et accrocher quelques chapelets sur la corde à linge dans l'espoir de contrer les nouvelles surprises. Parce que, d'un point de vue budgétaire, il commence à faire chaud dans la cuisine.

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À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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