Bombardier: l'acte de foi et le tarmac

Publié le 13/02/2014 à 18:49

Bombardier: l'acte de foi et le tarmac

Publié le 13/02/2014 à 18:49

Photo: Bombardier

Alors, où en sommes-nous avec Bombardier?

Longuement attendue, la conférence téléphonique sur les résultats trimestriels aura finalement permis de faire le point sur l'état de situation.

Essayons d'y voir de plus près.

Quel est l'impact du délai du CSeries sur les liquidités

C'est l'une des principales inquiétudes qui flottaient depuis l'annonce du report de la mise en service en deuxième moitié de 2015. Les coûts supplémentaires engagés dans le développement de l'appareil allaient-ils forcer l'entreprise à aller renégocier ses conventions de crédit avec ses banquiers?

Bombardier a, à première vue, amplement d'encaisse (3,4 G$ US), mais 2 G$ de ces liquidités ne peuvent en réalité être dépensés en raison des conventions de crédit.

Aussi étonnant que cela puisse paraître, on n'est pas réellement parvenu à savoir combien le délai allait ajouter de coûts au CSeries. La direction parle maintenant d'un programme qui coûtera 4,4 G$ US, selon les normes comptables IFRS. Au dernier énoncé, le coût était à 3,9 G$ US. Cela laisse entendre un dépassement de 500 M$, mais apparemment, les deux chiffres ne sont pas réellement comparables.

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La seule chose claire, est que 750 M$ restent encore à dépenser en développement et que 300 M$ US d'intérêts restent à capitaliser. Ces chiffres ne sont cependant pas très éclairants pour l'instant.

Assez curieusement, la bonne nouvelle au chapitre de l'évaluation des liquidités vient presque de la décote de Moody's, survenue en journée jeudi. La maison de notation estime que Bombardier brûlera au total 750 M$ US en 2014, et que son encaisse (3,4 G$ US) et ses lignes de crédit (1,4 G$) seront adéquates pour répondre aux besoins de développement.

C'est donc ok pour les liquidités à court terme (sur la prochaine année), mais les craintes ne se dissiperont pas totalement. Avec les décotes de Moody's et Standard & Poors, les débentures demeurent dans la catégorie "spéculatives", et ne sont plus qu'à un cran du niveau "hautement spéculatif".

Il ne faudrait pas un nouveau report.

L'impact du délai sur la rentabilité future du CSeries?

C'est l'autre question qui flottait dans les esprits. Les coûts de développement sont capitalisés et seront amortis lorsque les livraisons de CSeries s'amorceront. Jusqu'à quel point ces dépenses reportées supplémentaires vont-elles gruger le bénéfice futur que l'on attend de l'appareil?

Comme la direction n'a pas fourni plus de détails sur la hauteur des dépassements de coûts, il n'y a évidemment pas eu de précisions là-dessus non plus.

Pierre Beaudoin a cependant quelques fois répété que, même avec les coûts supplémentaires, le programme demeurait à l'intérieur des hypothèses de rentabilité du plan d'affaires.

Il faut faire un acte de foi ici. On est personnellement porté à croire.

Dans le pire des cas, on semble être en présence de coûts supplémentaires de 500 M$. Il y a quelques semaines, on avait roulé quelques calculs maison hautement hypothétiques sur un dépassement de 1G$ US. Ceux-ci pointaient vers une diminution des bénéfices espérés pour le CSeries de l'ordre de 7 à 15%. C'était significatif, mais pas dévastateur.

Avec un dépassement qui semble de moitié moindre, la situation n'apparaît donc pas si préoccupante. S'il s'en vend selon les hypothèses, le délai lié à l'entrée en service ne fera pas une grande différence sur la rentabilité du CSeries.

Alors, pourquoi le titre recule-t-il?

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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