Quatre menaces sur votre radar en 2023

Publié le 17/12/2022 à 09:00

Quatre menaces sur votre radar en 2023

Publié le 17/12/2022 à 09:00

En envahissant l’Ukraine en février 2022, la Russie a déclenché la plus importante guerre en Europe depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. (Photo: 123RF)

ANALYSE GÉOPOLITIQUE. Les années se suivent, mais ne se ressemblent pas. Qui avait prévu la pandémie de COVID-19 ou l’invasion russe de l’Ukraine? L’année 2023 pourrait aussi nous réserver de mauvaises surprises. Sans être un prophète de malheur, voici quatre risques auxquels votre organisation sera confrontée dans les 12 prochains mois.

Comme nous l’expliquions dans une récente analyse, il est primordial de classer les risques géopolitiques comme étant très probables, possibles ou improbables (une hiérarchisation classique dans l’analyse du risque). Car, sans hiérarchisation, on peut céder à des peurs exagérées.

Pour autant, si l’un de ces quatre risques devait se concrétiser en 2023, cela pourrait avoir un impact sur les revenus et les dépenses de votre organisation, voire sur son rendement dans le cas des investisseurs institutionnels.

Imaginez si plusieurs risques se matérialisaient en même temps...

 

1. Escalade militaire Ukraine

En envahissant l’Ukraine en février 2022, la Russie a déclenché la plus importante guerre en Europe depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Pour l’instant, le conflit est limité au territoire ukrainien, mais cette situation peut-elle perdurer?

Officiellement, cette guerre n’est pas un affrontement direct entre l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), menée par les Américains, et la Russie.

Toutefois, dans la perspective de Moscou, cette guerre en est une par procuration entre l’alliance atlantique et la Russie, et ce, par l’entreprise des armes fournies à l’Ukraine pour résister à l’agression.

Aussi, un risque d’escalade militaire impliquant directement l’OTAN est réel, d’autant plus si la Russie devait perdre cette guerre ou que l’Ukraine devait reprendre la Crimée, annexée par Moscou en 2014. 

Pour sa survie politique (et réelle), Vladimir Poutine ne peut tout simplement pas se permettre de perdre cette guerre.

Une réalité qui accroît les risques d'escalade; les Russes ont déjà évoqué cet enjeu avec les Américains

 

Scénario : possible

 

2. Récession mondiale

À moins d’une surprise de taille, l’économie mondiale devrait plonger en récession en 2023, s’entendent pour dire les prévisionnistes, dont ceux du Mouvement Desjardins.

La principale cause est la hausse successive du taux directeur des banques centrales depuis le début de l’année, et ce, afin de purger l’inflation de l’économie.

Le 7 décembre, la Banque du Canada a procédé à sa septième hausse depuis janvier, portant son taux directeur à 4,25%. En octobre, l’inflation au Canada atteignait 6,9%, selon Statistique Canada.

La banque centrale veut la ramener dans sa fourchette annuelle de 1 à 3%.

D'autres hausses de taux sont donc à prévoir, renforçant davantage la probabilité d'une récession.

 

Scénario : très probable

 

3. Crise financière post-crypto

L’effondrement du géant des cryptomonnaies FTX cet automne pourrait-il être le signe précurseur d’une crise financière majeure, comme l'a été la faillite de la banque d’affaires Lehman Brothers, en septembre 2008?

Chose certaine, les déboires de FTX et l’onde de choc provoquée dans cette industrie préoccupent les autorités.

Ce vendredi 16 décembre, les principaux régulateurs financiers américains se sont dits inquiets de la perspective de liens plus étroits entre les sociétés d'actifs numériques et Wall Street, rapporte la chaîne canadienne d’information économique BNN Bloomberg.

«Les activités de cryptoactifs pourraient présenter des risques pour le système financier américain, si leurs interconnexions avec le système financier traditionnel devaient se développer sans adhérer ou être associées à une réglementation appropriée», a déclaré vendredi la secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen.

Cette citation traduit une inquiétude certaine.

 

Scénario : possible

 

4. Effondrement du modèle chinois

Les choses vont de mal en pis en Chine. Le pays, qui semblait être un modèle de résilience économique au pic de la pandémie en 2020, est désormais dans «le trouble», affirme la chaîne d’information britannique BBC.

Cinq raisons sont en cause : la politique zéro-COVID fait des ravages ; les autorités n’en font pas assez pour stimuler l’économie ; le marché immobilier est en crise ; les vagues de chaleur (et la sécheresse) affectent des industries ; et les géants technologiques chinois éprouvent des difficultés.

À ces facteurs s’ajoute le déclin du modèle économique chinois axé sur l’entreprise privée, comme le rapportait récemment Les Affaires.

Le parti communiste chinois, dirigé d’une main de fer par Xi Jinping, a renforcé le secteur public et l’État policier, dans un pays où la croissance économique n’assure plus la stabilité politique.

Le modèle de développement économique chinois peut-il s’effondrer pour autant?

Par le passé, la Chine a démontré ses capacités à surprendre les analystes et à surmonter bien des crises politiques et économiques.

Aussi, le pays pourrait encore nous surprendre, malgré ses faiblesses structurelles.

 

Scénario : improbable

 

Comme on peut le constater à la lumière de ces quatre risques, votre entreprise pourrait potentiellement naviguer dans une mer très agitée en 2023.

Et un événement tout à fait inattendu pourrait aussi créer des vagues supplémentaires.

Un cygne noir d'une puissance imprévisible, pour paraphraser le statisticien Nassim Nicholas Taleb, à l'origine de la théorie du cygne noir.

D’où l’importance de vous préparer à toutes les éventualités, sans céder à la peur. Évaluez plutôt le niveau de risque auquel votre organisation est exposée, notamment en ce qui a trait à ses liquidités, si jamais ses revenus devaient chuter.

Bref, gardez-bien vos yeux fixés sur le radar.

À propos de ce blogue

Dans son analyse Zoom sur le monde, François Normand traite des enjeux géopolitiques qui sont trop souvent sous-estimés par les investisseurs et les exportateurs. Journaliste au journal Les Affaires depuis 2000 (il était au Devoir auparavant), François est spécialisé en commerce international, en entrepreneuriat, en énergie & ressources naturelles, de même qu'en analyse géopolitique. François est historien de formation, en plus de détenir un certificat en journalisme de l’Université Laval. Il a réussi le Cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada (CCVM) de l’Institut canadien des valeurs mobilières et il a fait des études de 2e cycle en gestion des risques financiers à l’Université de Sherbrooke durant 15 mois. Il détient aussi un MBA de l'Université de Sherbrooke. François a réalisé plusieurs stages de formation à l’étranger: à l’École supérieure de journalisme de Lille, en France (1996); auprès des institutions de l'Union européenne, à Bruxelles (2002); auprès des institutions de Hong Kong (2008); participation à l'International Visitor Leadership Program du State Department, aux États-Unis (2009). En 2007, il a remporté le 2e prix d'excellence Caisse de dépôt et placement du Québec - Merrill Lynch en journalisme économique et financier pour sa série « Exporter aux États-Unis ». En 2020, il a été finaliste au prix Judith-Jasmin (catégorie opinion) pour son analyse « Voulons-nous vraiment vivre dans ce monde? ».

François Normand