Le ­Canada est prêt pour la course mondiale à l’innovation


Édition du 09 Décembre 2020

Le ­Canada est prêt pour la course mondiale à l’innovation


Édition du 09 Décembre 2020

(Photo: 123RF)

 

­La vitesse fulgurante à laquelle on a conçu des vaccins pour lutter contre la ­COVID-19 montre à quel point le processus d’innovation s’est accéléré dans l’industrie pharmaceutique. D’autres secteurs vivent la même accélération, à commencer par les télécommunications, l’intelligence artificielle et la robotique. Dans cette course à l’innovation, les pays dotés d’écosystèmes structurés, ouverts et collaboratifs mènent le bal. Bonne nouvelle : le ­Canada est bien positionné sur l’échiquier mondial.
« ­Si l’on se compare à tous les pays dans le monde, nous sommes très bien placés », affirme ­Catherine ­Beaudry, spécialiste en innovation et professeure titulaire de la ­Chaire de recherche du ­Canada sur la création, le développement et la commercialisation de l’innovation à ­Polytechnique ­Montréal.
Or, de ­Montréal à ­Vancouver, il y a une perception assez répandue dans des milieux économiques selon laquelle le ­Canada – et, du reste, le ­Québec – serait un peu à la traîne en matière d’innovation derrière des géants comme les ­États-Unis, les principales puissances européennes et des pays d’Asie comme la ­Chine, le ­Japon et la ­Corée du ­Sud.
Pourtant, si l’on analyse la performance du ­Canada dans le « ­Global ­Innovation ­Index 2020 », un rapport produit par le ­Cornell ­SC ­Johnson ­College of ­Business, l’INSEAD et l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, force est de constater que l’économie canadienne figure effectivement parmi les leaders mondiaux, 
en se classant au 17e rang (la même position 
qu’en 2019).
Ce rapport bat aussi en brèche des lieux communs tels que le lien présumé entre la taille d’une économie et sa capacité 
à innover.
Les petits pays sont très innovateurs
Aussi, parmi le top 5 des pays les plus innovateurs au monde, on retrouve – en ordre – la ­Suisse, la ­Suède, les ­États-Unis, le ­Royaume-Uni et les ­Pays-Bas. Qui plus est, entre le 5e et le 17e rang (le ­Canada), on compte d’autres petits pays, comme le ­Danemark, la ­Finlande, ­Singapour, ­Israël et l’Irlande.
Le « Global ­Innovation ­Index 2020 » mesure deux principaux indices liés à l’innovation.
Premièrement, il évalue le ­sous-indice des intrants d’innovation (Innovation ­Input), qui comprend cinq facteurs mesurant les éléments d’une économie nationale qui permettent des activités innovantes : les institutions, le capital humain et la recherche, l’infrastructure, la sophistication du marché ainsi que la sophistication de l’écosystème d’affaires. 
À ce chapitre, le ­Canada performe très bien, car il figure au 9e rang, devant des pays comme la ­Corée du ­Sud, les ­Pays-Bas, le ­Japon et l’Allemagne.
Deuxièmement, le rapport évalue le ­sous-indice des produits d’innovation (Innovation ­Output), qui fournit des informations sur les extrants liés aux activités innovantes des économies. Il existe deux catégories : le partage des connaissances et les inventions technologiques, puis la commercialisation des innovations. 
À ce chapitre, le ­Canada performe moins bien puisqu’il se classe au 22e rang, derrière des pays comme l’Islande, l’Estonie et ­Malte.
Bref, si le ­Canada est un champion en recherche, 
il a encore des progrès à faire en ce qui a trait au développement et à la commercialisation des bonnes idées – les 
spécialistes en innovation interviewés dans le premier reportage de notre manchette ont pointé du doigt ce problème au ­Québec.
Cela dit, en ce qui trait au partage des connaissances, le ­Canada est vraiment un leader mondial, selon les 
données colligées par ­Catherine ­Beaudry.
Ainsi, pour ce qui est du nombre d’articles publiés par habitant, le ­Canada se classait au 5e rang mondial pour la période 2009‑2014, en plus d’arriver au 6e rang en ce qui a trait à l’impact des articles durant 
ces mêmes années, selon les statistiques annuelles les plus récentes du ­Conseil des académies canadiennes.
En 2015 (les données les plus récentes), le ­Canada figurait également au 11e rang au chapitre des brevets triadiques, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Ces brevets sont reconnus pour déterminer les innovations les plus importantes sur le plan économique, c’­est-à-dire celles qui mènent, par exemple, à la création d’entreprises et d’emplois.
Le ­Canada est aussi 
un pays compétitif
Le bon positionnement 
du ­Canada en matière d’innovation a aussi une incidence sur son niveau de compétitivité, car plus un pays est innovateur, plus il en retire des avantages économiques tels que les gains de productivité, la production de nouveaux produits et services, sans parler d’une meilleure organisation du travail dans les chaînes de valeur.
D’ailleurs, 17 des 20 pays les plus innovateurs du « ­Global ­Innovation ­Index 2020 » se retrouvent aussi dans le top 20 du « ­Global ­Competitiveness ­Report 2019 » publié par le ­Forum économique mondial, 
et ce, à l’exception de la ­Chine, de l’Irlande et de l’Autriche.
Le ­Canada y figure pour sa part au 14e rang, soit une baisse comparativement au 12e rang obtenu en 2018. Un recul qui tient principalement aux tensions commerciales avec les ­États-Unis et la ­Chine ainsi qu’à l’opinion moins favorable des chefs d’entreprise canadiens à l’égard de l’environnement économique au pays.
Malgré tout, insiste le ­Forum économique mondial, le ­Canada demeure une économie compétitive avec des conditions ­macro-
économiques très stables, un système financier solide, de bonnes institutions et un capital humain bien développé.
Par contre, le pays pourrait améliorer l’infrastructure et l’utilisation de la large bande mobile, en plus d’investir davantage dans la recherche et développement, et favoriser davantage la collaboration entre les entreprises, les universités et les centres de recherche.
Le ­Canada et le ­Québec ne sont pas les seuls 
États à créer des supergrappes et des zones d’innovation pour accélérer leur développement économique.
De par le monde, les entreprises, les centres de recherche et les gouvernements investissent des sommes faramineuses pour stimuler l’innovation afin de trouver le ­Saint-Graal technologique qui révolutionnera nos sociétés et nos économies. La bataille sera rude dans cette course mondiale à l’innovation, où les pays, les régions, voire des villes, devront jouer du coude pour attirer et retenir les talents, les entrepreneurs, les capitaux et les spécialistes en commercialisation.
Néanmoins, le ­Canada est bien positionné sur la ligne de départ.

 

CHRONIQUE. La vitesse fulgurante à laquelle on a conçu des vaccins pour lutter contre la ­COVID-19 montre à quel point le processus d’innovation s’est accéléré dans l’industrie pharmaceutique. D’autres secteurs vivent la même accélération, à commencer par les télécommunications, l’intelligence artificielle et la robotique. Dans cette course à l’innovation, les pays dotés d’écosystèmes structurés, ouverts et collaboratifs mènent le bal. Bonne nouvelle : le ­Canada est bien positionné sur l’échiquier mondial.

« ­Si l’on se compare à tous les pays dans le monde, nous sommes très bien placés », affirme ­Catherine ­Beaudry, spécialiste en innovation et professeure titulaire de la ­Chaire de recherche du ­Canada sur la création, le développement et la commercialisation de l’innovation à ­Polytechnique ­Montréal.

Or, de ­Montréal à ­Vancouver, il y a une perception assez répandue dans des milieux économiques selon laquelle le ­Canada – et, du reste, le ­Québec – serait un peu à la traîne en matière d’innovation derrière des géants comme les ­États-Unis, les principales puissances européennes et des pays d’Asie comme la ­Chine, le ­Japon et la ­Corée du ­Sud.

Pourtant, si l’on analyse la performance du ­Canada dans le « ­Global ­Innovation ­Index 2020 », un rapport produit par le ­Cornell ­SC ­Johnson ­College of ­Business, l’INSEAD et l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, force est de constater que l’économie canadienne figure effectivement parmi les leaders mondiaux, en se classant au 17e rang (la même position qu’en 2019).

Ce rapport bat aussi en brèche des lieux communs tels que le lien présumé entre la taille d’une économie et sa capacité à innover.

Les petits pays sont très innovateurs

Aussi, parmi le top 5 des pays les plus innovateurs au monde, on retrouve – en ordre – la ­Suisse, la ­Suède, les ­États-Unis, le ­Royaume-Uni et les ­Pays-Bas. Qui plus est, entre le 5e et le 17e rang (le ­Canada), on compte d’autres petits pays, comme le ­Danemark, la ­Finlande, ­Singapour, ­Israël et l’Irlande.

Le « Global ­Innovation ­Index 2020 » mesure deux principaux indices liés à l’innovation.

Premièrement, il évalue le ­sous-indice des intrants d’innovation (Innovation ­Input), qui comprend cinq facteurs mesurant les éléments d’une économie nationale qui permettent des activités innovantes : les institutions, le capital humain et la recherche, l’infrastructure, la sophistication du marché ainsi que la sophistication de l’écosystème d’affaires. 

À ce chapitre, le ­Canada performe très bien, car il figure au 9e rang, devant des pays comme la ­Corée du ­Sud, les ­Pays-Bas, le ­Japon et l’Allemagne.

Deuxièmement, le rapport évalue le ­sous-indice des produits d’innovation (Innovation ­Output), qui fournit des informations sur les extrants liés aux activités innovantes des économies. Il existe deux catégories : le partage des connaissances et les inventions technologiques, puis la commercialisation des innovations. 

À ce chapitre, le ­Canada performe moins bien puisqu’il se classe au 22e rang, derrière des pays comme l’Islande, l’Estonie et ­Malte.

Bref, si le ­Canada est un champion en recherche, il a encore des progrès à faire en ce qui a trait au développement et à la commercialisation des bonnes idées – les spécialistes en innovation interviewés dans le premier reportage de notre manchette ont pointé du doigt ce problème au ­Québec.

Cela dit, en ce qui trait au partage des connaissances, le ­Canada est vraiment un leader mondial, selon les données colligées par ­Catherine ­Beaudry.

Ainsi, pour ce qui est du nombre d’articles publiés par habitant, le ­Canada se classait au 5e rang mondial pour la période 2009‑2014, en plus d’arriver au 6e rang en ce qui a trait à l’impact des articles durant ces mêmes années, selon les statistiques annuelles les plus récentes du ­Conseil des académies canadiennes.

En 2015 (les données les plus récentes), le ­Canada figurait également au 11e rang au chapitre des brevets triadiques, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Ces brevets sont reconnus pour déterminer les innovations les plus importantes sur le plan économique, c’­est-à-dire celles qui mènent, par exemple, à la création d’entreprises et d’emplois.

Le ­Canada est aussi un pays compétitif

Le bon positionnement du ­Canada en matière d’innovation a aussi une incidence sur son niveau de compétitivité, car plus un pays est innovateur, plus il en retire des avantages économiques tels que les gains de productivité, la production de nouveaux produits et services, sans parler d’une meilleure organisation du travail dans les chaînes de valeur.

D’ailleurs, 17 des 20 pays les plus innovateurs du « ­Global ­Innovation ­Index 2020 » se retrouvent aussi dans le top 20 du « ­Global ­Competitiveness ­Report 2019 » publié par le ­Forum économique mondial, et ce, à l’exception de la ­Chine, de l’Irlande et de l’Autriche.

Le ­Canada y figure pour sa part au 14e rang, soit une baisse comparativement au 12e rang obtenu en 2018. Un recul qui tient principalement aux tensions commerciales avec les ­États-Unis et la ­Chine ainsi qu’à l’opinion moins favorable des chefs d’entreprise canadiens à l’égard de l’environnement économique au pays.

Malgré tout, insiste le ­Forum économique mondial, le ­Canada demeure une économie compétitive avec des conditions ­macroéconomiques très stables, un système financier solide, de bonnes institutions et un capital humain bien développé.

Par contre, le pays pourrait améliorer l’infrastructure et l’utilisation de la large bande mobile, en plus d’investir davantage dans la recherche et développement, et favoriser davantage la collaboration entre les entreprises, les universités et les centres de recherche.

Le ­Canada et le ­Québec ne sont pas les seuls États à créer des supergrappes et des zones d’innovation pour accélérer leur développement économique.

De par le monde, les entreprises, les centres de recherche et les gouvernements investissent des sommes faramineuses pour stimuler l’innovation afin de trouver le ­Saint-Graal technologique qui révolutionnera nos sociétés et nos économies. La bataille sera rude dans cette course mondiale à l’innovation, où les pays, les régions, voire des villes, devront jouer du coude pour attirer et retenir les talents, les entrepreneurs, les capitaux et les spécialistes en commercialisation.

Néanmoins, le ­Canada est bien positionné sur la ligne de départ.

À propos de ce blogue

Dans son analyse Zoom sur le monde, François Normand traite des enjeux géopolitiques qui sont trop souvent sous-estimés par les investisseurs et les exportateurs. Journaliste au journal Les Affaires depuis 2000 (il était au Devoir auparavant), François est spécialisé en commerce international, en entrepreneuriat, en énergie & ressources naturelles, de même qu'en analyse géopolitique. François est historien de formation, en plus de détenir un certificat en journalisme de l’Université Laval. Il a réussi le Cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada (CCVM) de l’Institut canadien des valeurs mobilières et il a fait des études de 2e cycle en gestion des risques financiers à l’Université de Sherbrooke durant 15 mois. Il détient aussi un MBA de l'Université de Sherbrooke. François a réalisé plusieurs stages de formation à l’étranger: à l’École supérieure de journalisme de Lille, en France (1996); auprès des institutions de l'Union européenne, à Bruxelles (2002); auprès des institutions de Hong Kong (2008); participation à l'International Visitor Leadership Program du State Department, aux États-Unis (2009). En 2007, il a remporté le 2e prix d'excellence Caisse de dépôt et placement du Québec - Merrill Lynch en journalisme économique et financier pour sa série « Exporter aux États-Unis ». En 2020, il a été finaliste au prix Judith-Jasmin (catégorie opinion) pour son analyse « Voulons-nous vraiment vivre dans ce monde? ».

François Normand