Le Brésil a la gueule de bois, mais il peut se relever

Publié le 16/01/2016 à 09:05

Le Brésil a la gueule de bois, mais il peut se relever

Publié le 16/01/2016 à 09:05

Source photo: Shutterstock

ANALYSE DU RISQUE - Recul du PIB, inflation galopante, coûts d'emprunt élevés... Le Brésil vit une crise majeure au grand dam des investisseurs étrangers. Mais à long terme, le pays a tout ce qu'il faut pour rebondir, affirme la Banque Nationale.

«Depuis quelques années, le pays fait face à des vents contraires croissants tant au niveau politique et qu’économique», écrit dans une note Angelo Katsoras, analyste géopolitique associé chez Banque Nationale Marchés Financiers.

Le Brésil -un pays du BRIC comptant 206 millions d'habitants- est frappé de plein fouet par une récession.

En 2015, le PIB devrait se contracter de 2,5%, tandis qu'il devrait reculer de 2,5% cette année, et ce, malgré la tenue des Jeux olympiques cet été.

L'inflation pose aussi tout un problème dans la septième économie mondiale.

En 2016, elle devrait s'établir à 10,7%, soit le taux le plus élevé depuis 2003 à 14,7%. Cette hausse des prix tient en grande partie à la dévaluation du réal brésilien, qui fait bondir les coûts des importations.

Autre tuile pour le Brésil: les coûts d'emprunt du gouvernement sont élevés. Le taux des obligations brésiliennes à 10 ans s'élève à 16%, selon Bloomberg.

Les déboires de la pétrolière Petrobras, une société d'État responsable de plus de 10% des investissements totaux réalisés au Brésil, n'aident pas non plus l'économie brésilienne.

Par exemple, d'ici 2020, Petrobras a réduit ses prévisions de production de 4,2 millions à 2,8 millions de baril de pétrole. Ce qui réduira les revenus du gouvernement brésilien, souligne le Financial Times.

De plus, la présidente brésilienne Dilma Roussef fait face à une procédure de destitution.

Le président de la Chambre des députés, Eduardo Cunha, ennemi juré et ancien allié de Roussef, a lancé la procédure le 2 décembre, en l'accusant d'avoir maquillé les comptes publics en 2013, un an avant sa réélection.

Les raisons d'espérer à long terme

Malgré les difficultés économiques et politiques qu'il traverse, le Brésil a plusieurs atouts qui peuvent l'aider à sortir de cette crise, affirme Angelo Katsoras.

Par exemple, la classe moyenne connaît une croissance fulgurante.

Les Brésiliens qui gagnaient de 600 $US à 2 600 $US par mois représentaient 37,6% de la population du pays en 2003 (67,9 millions de personnes), comparativement à 56% en 2013 (112,6 millions), selon le Wall Street Journal.

Non seulement cette classe moyenne consomme, mais elle assure aussi une stabilité politique au pays.

Historiquement, en Occident, les pays dotés d'une forte classe moyenne en ont été plus stables et ont eu tendance à se démocratiser, rappellent les historiens.

Un autre avantage du Brésil réside dans ses formidables ressources agricoles, souligne Angelo Katsoras.

«Malgré le récent déclin des prix des denrées, les fondamentaux à long terme pour ce secteur demeurent forts.»

Il y a trois raisons d'être optimiste, selon l'analyste de la Banque Nationale.

- la population mondiale devrait s'accroître de 2 milliards d'habitants d'ici 2050.

- la perte de terres agricoles au profit de l'urbanisation, la pénurie d'eau et la pollution dans plusieurs régions du monde forceront plusieurs États à importer leurs denrées de pays producteurs comme le Brésil.

- la montée du niveau de vie à travers le monde, notamment en Chine et en Inde, fait augmenter la demande pour la viande, les oeufs et les produits laitiers, des aliments produits en grande quantité par le Brésil.

Cela dit, le pays a de grands défis à relever pour assurer sa prospérité à long terme, selon Angelo Katsoras.

Le géant sud-américain doit diversifier son économie, contrôler ses dépenses, augmenter la qualité et l'efficacité de ses infrastructures, ainsi que réduire la corruption.

La santé financière de Petrobras pose aussi un risque important. Une situation qui pourrait même forcer le gouvernement à renflouer la société d'État et/ou à restructurer sa dette.

Malgré tout, Angelo Katsoras demeure optimiste pour le Brésil.

«Étant donné la solide fondation de sa démocratie, son importante classe moyenne, ses institutions de plus en plus indépendantes et ses vastes ressources, nous voyons le Brésil comme un pays ayant un grand potentiel à long terme.»

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À propos de ce blogue

Dans son analyse Zoom sur le monde, François Normand traite des enjeux géopolitiques qui sont trop souvent sous-estimés par les investisseurs et les exportateurs. Journaliste au journal Les Affaires depuis 2000 (il était au Devoir auparavant), François est spécialisé en commerce international, en entrepreneuriat, en énergie & ressources naturelles, de même qu'en analyse géopolitique. François est historien de formation, en plus de détenir un certificat en journalisme de l’Université Laval. Il a réussi le Cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada (CCVM) de l’Institut canadien des valeurs mobilières et il a fait des études de 2e cycle en gestion des risques financiers à l’Université de Sherbrooke durant 15 mois. Il détient aussi un MBA de l'Université de Sherbrooke. François a réalisé plusieurs stages de formation à l’étranger: à l’École supérieure de journalisme de Lille, en France (1996); auprès des institutions de l'Union européenne, à Bruxelles (2002); auprès des institutions de Hong Kong (2008); participation à l'International Visitor Leadership Program du State Department, aux États-Unis (2009). En 2007, il a remporté le 2e prix d'excellence Caisse de dépôt et placement du Québec - Merrill Lynch en journalisme économique et financier pour sa série « Exporter aux États-Unis ». En 2020, il a été finaliste au prix Judith-Jasmin (catégorie opinion) pour son analyse « Voulons-nous vraiment vivre dans ce monde? ».

François Normand