«Le chercheur seul avec son idée dans son laboratoire, c’est fini»

Publié le 09/08/2017 à 16:12

«Le chercheur seul avec son idée dans son laboratoire, c’est fini»

Publié le 09/08/2017 à 16:12

Pour réinventer les produits laitiers, il faut plusieurs cerveaux. L’automne dernier, Agropur a lancé Inno Challenge, un concours pour trouver des idées de produits, d’emballages, d’occasions de consommation ou de procédés. Le point sur cette initiative d’innovation ouverte.

De l’idée au produit, le processus traditionnel d’innovation peut prendre jusqu’à trois ans. Et puis, il n’est pas toujours évident de sortir des sentiers battus. D’où la décision d’Agropur de s’adresser au monde entier. «On veut créer quelque chose de plus différent, de plus excitant, on cherche des idées disruptives, dit Michel Pouliot, vice-président R et D. On veut aussi accélérer notre cycle de développement pour suivre le rythme des consommateurs branchés d’aujourd’hui.»

Certes, ouvrir son processus d’innovation au public peut faire peur, convient-il. «Il faut casser le paradigme du secret. Mais gagner de la vitesse sur le marché, c’est souvent plus payant que d’essayer de protéger la confidentialité et de tout faire à l’interne.» Caroline Miron, directrice Incubateur et innovation ouverte, acquiesce. «L’innovation ouverte a d’abord été le fait d’entreprises technologiques. Mais maintenant, de grandes entreprises de produits de consommation, comme Procter & Gamble, General Mills et Nestlé y ont recours.»

Agropur serait toutefois la première entreprise canadienne du secteur alimentaire à avoir fait appel au crowdsourcing pour innover. M. Pouliot et Mme Miron partageront leur expérience lors de la conférence Gestion de l’innovation, présentée par Les Événements Les Affaires le 20 septembre à Montréal.  

Le programme Inno Challenge de la coopérative laitière de 8000 employés offrait 25 000 $ aux participants dont l’idée était retenue. Pour développer un prototype de leur concept, ceux-ci avaient de plus la possibilité de travailler avec Agropur et ses partenaires, le Quartier de l’innovation de Montréal ainsi que l’incubateur et accélérateur d’entreprises AG-Bio Centre.   

Le jeu en vaut la chandelle

Agropur lance entre cinq et dix nouveautés par année. «Il faut toujours alimenter notre pipeline d’idées, car beaucoup tombent au combat», dit M. Pouliot. Inno Challenge a permis de recueillir 63 idées en provenance de 8 pays. De ce nombre, trois ont été retenues. Deux proviennent d’entrepreneurs-chercheurs et la troisième, de l’Institut de technologie des emballages et du génie alimentaire du Collège de Maisonneuve.

Pour l’instant, la coopérative refuse d’en dire plus sur la nature des innovations, sauf que les prototypes ont été présentés à la haute direction en juin. Une décision sera prise prochainement à savoir s’ils seront amenés au stade de la commercialisation.

Plusieurs consommateurs ont soumis des recettes qui auraient été difficiles à industrialiser alors qu’Agropur s’attendait à recevoir davantage de propositions provenant de startups. Si c’était à refaire, ferait-elle les choses autrement ? «Nous préciserions davantage les critères, répond M. Pouliot. Nous recevrions probablement moins de propositions, mais elles seraient mieux adaptées à nos besoins.»

Il met en garde les entreprises tentées par l’aventure : il faut être réaliste dans ses attentes. «Oui, il peut y avoir des idées extraordinaires. Mais le travail pour les concrétiser reste à faire. À commencer par s’assurer que ces idées ont du sens pour son entreprise.»

Dans le secteur alimentaire, la démarche est encore plus complexe, selon lui, car l’exploration est limitée par les nombreuses exigences réglementaires. Néanmoins, pour Agropur, il y aura une prochaine fois, car elle entend bien continuer à faire de l’innovation ouverte. À suivre!