Gérer le changement: «Il faut que les gens comprennent l’urgence d’agir»

Publié le 06/03/2018 à 10:23

Gérer le changement: «Il faut que les gens comprennent l’urgence d’agir»

Publié le 06/03/2018 à 10:23

Comment faire adhérer au changement 150 employés et 26 000 professionnels de la santé quand les choses se font de la même façon depuis les années 80 ? C’est le défi qu’a relevé la RAMQ avec la refonte de ses systèmes de rémunération à l’acte. Un projet d’envergure qui a nécessité 67 000 jours / personnes de travail.

« On diffuse beaucoup d’information aux gens touchés par le changement, mais on les écoute peu, constate Anne-Christine Langlois-Thériault, chef d’équipe, gestion du changement et formation à la Régie de l’assurance-maladie du Québec (RAMQ). Dans notre cas, la communication bidirectionnelle a été un élément clé. Elle nous a permis de faire évoluer notre stratégie en fonction des préoccupations des personnes concernées. »

L’ampleur de la transformation, effectuée entre 2011 et 2018, nécessitait en effet une gestion du changement agile et exécutée dans les règles de l’art. Par exemple, le traitement des cas plus compliqués de demandes de paiement, auparavant effectué par des employés, a été presque complètement automatisé.

« Avant, les employés traitaient manuellement 500 000 cas de ce type par année, indique Anne-Christine Langlois-Thériault, qui participera à la conférence Gestion du changement, présentée par les Événements Les Affaires le 16 mai à Québec. Maintenant, le nouveau système informatique est capable de les gérer presque tous. Les employés dédiés à cette tâche ont bien sûr eu peur de perdre leur emploi. Il a fallu les rassurer et aussi valoriser leur expertise en les faisant migrer vers le contrôle et la gestion de risques. Car ces employés ont une fine connaissance des ententes avec les médecins et les autres professionnels de la santé qui sont assez complexes. »

Tendre l’oreille

L’équipe de gestion du changement a mis en place toute une structure pour être à l’écoute des craintes et des préoccupations des parties prenantes. Notamment, elle a convié des employés de différents secteurs à se faire les porte-parole de leurs collègues en intégrant un comité d’agents de gestion du changement. Elle a tenu des rencontres individuelles avec les employés qui avaient des inquiétudes particulières. Et elle a mené des sondages pour évaluer l’adhésion au projet et sa compréhension.

« Les résultats étaient mesurés par secteur, explique Mme Langlois-Thériault. Si nous constations par exemple que tel groupe d’employés ne voyait pas l’urgence d’agir ou ne comprenait pas la vision, nous nous assoyions avec leur gestionnaire pour élaborer un plan d’action. C’était une stratégie évolutive adaptée à chaque secteur. »  

Gestion du changement

Autre bonne pratique : la chef d’équipe de gestion du changement de la RAMQ participait aux ateliers d’adaptation des processus qui réunissait des utilisateurs et les développeurs des solutions informatiques. « Avec ma préoccupation pour l’humain, je venais un peu arrondir les angles. J’étais à la fois une traductrice, qui vulgarisait les propos des informaticiens, et une facilitatrice. Ma présence rassurait aussi les utilisateurs, car je suis de l’interne, comme eux. »

Par ailleurs, les séances d’information sur la refonte se faisaient sous le signe de la transparence. « S’il y avait des embûches ou des retards, nous le disions et nous expliquions pourquoi, souligne la conférencière. Quand on est transparent, on garde sa crédibilité et cela, c’est très précieux en gestion du changement. »

Ces séances comblaient aussi le besoin de certains employés de ventiler leurs émotions. Mme Langlois-Thériault n’hésitait d’ailleurs pas à y présenter le schéma de la courbe du changement (choc, négation, colère, peur, etc.). « C’est une façon de légitimer les sentiments. C’est normal d’avoir peur, d’être inquiet ou sceptique quand on vit une transformation. Et il ne faut pas avoir peur de le dire. »

Enfin, dans tout ce processus, les discussions de corridor ont joué un rôle important. « Au-delà des canaux de communication officiels, il faut être disponible pour parler de façon impromptue avec les gens », conclut la conférencière.