Et si tout le monde avait accès à vos données ?

Publié le 15/01/2018 à 11:37

Et si tout le monde avait accès à vos données ?

Publié le 15/01/2018 à 11:37

Au contraire des entreprises qui gardent jalousement leurs données, les gouvernements ont un devoir de transparence. Pourtant, la libération des données dans les municipalités du Québec en est encore à ses balbutiements. Certaines, dont Montréal, ont toutefois fait le saut.

Conditions des patinoires, programmation culturelle, subventions accordées par le conseil municipal, requêtes des citoyens au 311, contrats de déneigement, intervention des pompiers, actes criminels… Voici des exemples des quelque 300 ensembles de données actuellement disponibles dans le portail de données ouvertes de Montréal, encore la seule municipalité québécoise à avoir adopté une politique en la matière.

Mais pourquoi partager ses données ? « Parce que ça permet aux citoyens de mieux comprendre ce qui se passe dans leur ville en plus d’augmenter leur degré de confiance envers l’administration municipale, répond Stéphane Guidoin, directeur par intérim du Bureau de la ville intelligente et numérique de Montréal. Cela démontre aux citoyens que l’administration n’a rien à cacher et qu’elle est à leur service. »  

« Les gens peuvent fouiller et croiser des données, poursuit celui qui est l’un des invités de la conférence Expérience citoyen, présentée par les Événements les Affaires le 13 mars prochain. Par exemple, à partir des requêtes adressées au service 311, un citoyen a cartographié les endroits où il y a eu des plaintes relatives à la présence de rats. »

Autre avantage : les données ouvertes facilitent le développement d’applications utiles à la communauté. Le portail de données ouvertes de Montréal en recense d’ailleurs plusieurs : localisation de monuments, règles sur le stationnement selon les rues, statuts de déneigement des rues, salubrité des restaurants, etc.

Cependant, à part les développeurs informatiques, seule une minorité de la population a les connaissances requises pour lire et utiliser ces données brutes, convient Stéphane Guidoin. C’est pourquoi Montréal a créé les sites web Vue sur la sécurité publique, qui cartographie les actes criminels, et Vue sur les contrats, qui dresse une liste des contrats de plus de 2000 $ accordés par la ville.

expérience citoyen

À plusieurs, c’est mieux

D’autres municipalités québécoises (Sherbrooke, Laval, Québec, Gatineau, Rimouski, Longueuil, etc.) ont également libéré certaines de leurs données. Elles les partagent sur un portail commun, Données Québec, auquel participent aussi Montréal et le gouvernement du Québec.

« L’idée, c’est de mettre le plus de données possible au même endroit pour faciliter la vie des citoyens et des développeurs », dit Yves Seney, directeur des technologies de l’information de Sherbrooke, qui est l’un des instigateurs de cette plateforme. Un concours de programmation annuel (hackathon) est d’ailleurs organisé avec les quelque 1000 jeux de données qu’on y retrouve.

La libération des données accuse toutefois un retard dans plusieurs municipalités, dont Sherbrooke, qui fait tout de même bonne figure avec 45 jeux de données. « Ce n’est pas si simple, admet M. Seney, lui aussi conférencier à l’événement Expérience citoyen. Il faut y allouer des ressources et du temps. Mais il faut surtout une volonté politique forte. »

Selon lui, l’adoption d’une politique de données ouvertes est essentielle pour rendre la démarche légitime et se donner des principes directeurs, notamment quant à la confidentialité et aux risques liés à la sécurité.

Ainsi, à Montréal, les données sont catégorisées selon leur degré de sensibilité. « Quand il s’agit d’information plus sensible, nous demandons l’avis du Service du greffe, qui est responsable de la question de la protection des renseignements personnels, explique M. Guidoin. Par exemple, nous avons diminué la précision des données que nous avons publiées sur les punaises de lit. Sinon, il aurait été possible de trouver les immeubles concernés par ce problème. »

Pour Yves Seney, le mouvement vers les données ouvertes est irréversible et toutes les instances gouvernementales devront s’y mettre. « Les données appartiennent aux citoyens, dit-il. Les villes n’en sont que les fiduciaires. »